Au sein de l’ONU, l’Assemblée générale se subdivise en commissions. La troisième, chargée des questions sociales, humanitaires et culturelles, se déclarant « consciente de l’importance de prévenir, de combattre et d’éliminer les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires » serait selon un communiqué des Nations Unies du 14 novembre « demeurée néanmoins profondément divisée par une référence à l’orientation sexuelle dans un projet de résolution ». Ladite résolution, répondant au doux nom de L.29/Rev.1, mentionnait depuis 2000 à l’alinéa b de son article 6 la « discrimination notamment fondée sur les préférences sexuelles ». Elle est revotée sans broncher tous les deux ans -ou plutôt, elle l’était jusque là.
En effet, sur proposition insistante du Groupe des Etats d’Afrique et de l’OCI, un amendement a été adopté à une majorité écrasante pour supprimer cette référence impie et la remplacer par « discriminations, quel qu’en soit le fondement ». Les rédacteurs ne manquent pas d’humour.
Gays, lesbiens, trans… et aveugles
Bizarrement, les confrères ayant évoqué la question, et surtout les principaux intéressés, font une curieuse lecture de l’épisode.
Ainsi Christine Le Doaré, présidente du Centre Gay, Lesbien, Bi et Trans de Paris, impute-t-elle la responsabilité de la décision… aux évangéliques américains, dont on se demande quand ils auraient rejoint l’OCI et depuis quand ils imposeraient leur loi au Maroc et au Mali, qui ont présenté l’amendement. Voilà en en effet le compte-rendu des débats tel qu’il est presenté sur le site de l’ONU :
« La représentante du Maroc, au nom de l’Organisation de la Conférence islamique (…) s’est dite troublée par les tentatives visant à se concentrer sur des droits individuels spécifiques et a réaffirmé que la notion d’orientation sexuelle ne devrait pas figurer dans ce texte. La communauté internationale devrait, selon elle, éviter une interprétation sélective de certains droits de l’homme. Cette situation pourrait entraîner un précédent dangereux. L’OCI continuera de protéger la notion de famille en tant que noyau fondamental de la société. »
Ses défenseurs avaient un argument de poids, compréhensible du point de vue de la richesse de la variété culturelle : il n’existe pas d’accord international sur cette « notion » ! Ils ont donc suggéré d’en traiter à l’occasion d’une réunion intergouvernementale. Promis, en 2012 le monde entier reconnaîtra dans les fondements un lieu commun à diverses sexualités. Et cette notion étant admise comme internationale et transculturelle, les homosexuels ne seront plus l’objet de persécutions, exécutions et assassinats en Iran (où, selon les déclarations de Mahmoud Ahmadinejad, ils n’existent tout simplement pas et ne sont donc pas pendus), au Sénégal, au Cameroun, en Irak, en Egypte, en Arabie Saoudite, en Ouganda…
Les délégations occidentales et notamment la Finlande, la France et la Suisse auraient exprimé leurs regrets. C’est très gentil. Surtout après avoir voté oui.
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