En faisant les antiquaires, je suis tombé, chez un bouquiniste, sur les pages dactylographiées et quelque peu jaunies d’un texte intéressant, teinté d’une violence contenue. Impossible d’en connaitre l’auteur et le vendeur n’a pas pu m’éclairer sur ce point. Le passage me rappelle que la sociologie est peut-être un sport de combat, que les chances sont décidément inégales à la naissance et que les privilèges de classe, de caste et de bandes se perpétuent, toujours, sans fin. Je lis et relis encore mais pas moyen d’identifier l’auteur qui parle si bien de ce que l’on reçoit en héritage, de ce capital social et culturel qui à la toute fin des fins vous place devant les autres dans les centres de pouvoir et de décision. Voilà ce que ça dit:
« … Il s’agit toujours d’exclure en distinguant, que ce soit dans l’apparence – la marque a remplacé l’habit et la voiture de collection le carrosse -, le langage et une sociabilité fermée. Si Versailles a disparu, les élites vivent toujours dans les mêmes quartiers et se retrouvent entre elles dans des espaces étroits édifiés à l’abri des regards indiscrets : clubs privés, restaurants sélects, cercles de réflexion hérités des salons d’antan, sans oublier les voyages, les chasses, les lieux de villégiature pour happy few où l’on se retrouve entre soi, comme les défuntes aristocraties allaient prendre les eaux. Les dirigeants s’y croisent, se parlent, s’échangent des services, des informations dont le commun des mortels est dépourvu, dans une promiscuité inconnue des grandes démocratie fédéralistes, comme l’Allemagne. Seule différence notable : la place considérable et récente prise par l’argent et les médi… »
La suite est déchirée. J’ai pensé à Pierre Bourdieu, même à Pierre Carles voire Serge Halimi, comme j’ai interviewé Monique Pinçon (de chez Pinçon et Charlot), sociologue des riches, pour On revient vers vous je lui ai immédiatement demandé si ce texte était d’elle, mais non. Le paragraphe en question m’a également fait penser à ce qu’on peut lire chez Cycéron, mais il est blogueur. Bref, ces quelques lignes me plongent dans une certaine perplexité d’autant qu’elles auraient pu être écrites récemment par un de ceux qui ont manifesté devant le Crillon, juste avant un dîner du Siècle, pour dénoncer ce qu’ils estiment être une collusion des élites politiques et économiques et certains hauts représentant des médias traditionnels. A mon avis, ce texte émane d’un courant de pensée aguerri dans la critique des élites mais à vrai dire, je n’en sais pas davantage, peut-être est-ce tout simplement, la page d’un mémoire de socio…
Si vous avez une idée, donc, n’hésitez pas
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