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Le bonheur, une idée neuve à Rennes ?


Si l’on sait, depuis la chanson de Barbara, que Nantes est une ville morose où, essentiellement, il pleut, Rennes réserve bien des surprises égayantes. La préfecture d’Ile-et-Vilaine a lancé, sur son site Internet, une vaste consultation citoyenne sur un thème qui n’a laissé indifférente aucune midinette bretonne à coiffe tradi : « Qu’est-ce que le bonheur ? » et cela dans le contexte d’un « forum » que Libé organise ce week-end. L’AFP, les yeux embués d’une dégoulinante mièvrerie, se plait à relayer les définitions du bonheur, tantôt sentencieuses tantôt triviales, sélectionnées par on-ne-sait-trop-qui et affichées dans les rues de Rennes… Le bonheur c’est footbalistiquement « la galette saucisse du Stade rennais », c’est religieusement « être en paix avec soi et les autres », c’est inévitablement « l’ici et le maintenant » ou encore c’est festivement « le Love+friends+chocolate+sex+rock’n’roll »… Yeah ! La mairie se félicite en ces termes de cet inquiétant record de participation : « On espérait entre 300 et 400 contributions mais nous en sommes à plus de 3.000 ! » Ces aimables Rennais, n’ayant certainement guère d’autres chats à fouetter en attendant fébrilement les cycliques « Transmusicales », se repaissent donc de bonheur et offrent l’instantané d’une société sans négativité, peuplée d’individus estimant connaître la recette de l' »homme heureux ». On sait que le sémillant Saint-Just, représentant du Comité de salut public utilisa cette fameuse formule « Le bonheur est une idée neuve en Europe » pour conclure et appuyer sa démonstration selon laquelle il fallait lutter sans répit contre les « ennemis » de la Révolution française. Et si, à Rennes, on commençait par afficher ainsi son bonheur, telle une quelconque « pride » passagère, et que l’on finissait par couper la tête de ceux qui n’ont pas d’idée de ce qu’est cet idéal incertain qui aide à vivre, mais pas à penser ? Et si le bonheur, c’était d’aller plutôt à Nantes ?



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Il est l’auteur de L’eugénisme de Platon (L’Harmattan, 2002) et a participé à l’écriture du "Dictionnaire Molière" (à paraître - collection Bouquin) ainsi qu’à un ouvrage collectif consacré à Philippe Muray.

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