Il y a très exactement un siècle, au prix d’un massacre horrible et d’un pilonnage d’artillerie sans précédent dans l’Histoire, d’attaques au gaz, au prix de villages rayés de la carte, de populations jetées sur les routes, au prix du sacrifice de dizaines de milliers de Poilus, tués, gazés, amputés et disparus, l’armée allemande fut bloquée à Verdun et la France fut sauvée. L’enfer que fut cette bataille, l’une des plus sanglantes de l’histoire de l’humanité, est inimaginable.
Frères de sang
Seuls restent à ces sacrifiés le souvenir et la mémoire qui ornent chaque place de nos villages. Des noms, des fratries entières arrachées à leur quotidien. Des pères, des frères, des fils. Ils reposent désormais sur cette terre lorraine dont le paysage porte encore les stigmates des millions de tonnes d’obus qui s’y sont déversés. Peu importent les raisons de cette guerre, peu importent les débats et les polémiques autour des massacres inutiles et du pacifisme. Pour ces soldats de métropole d’Afrique et du Maghreb, tous Français et frères de sang, nous avons le devoir de nous souvenir et d’avoir à l’esprit le sens de leur sacrifice.
Crime contre la mémoire
Savoir que le 29 mai, les délégations franco-allemandes emmenées par Angela Merkel et François Hollande vont assister à un concert de Black M est une insulte sinon un mépris sans nom porté à cette mémoire. Cette dernière pourtant si souvent invoquée par l’élite de la nation pour faire acte de repentance. Cette mémoire qui nous demande de nous souvenir des accords d’Evian et oublier les massacres de harkis ou encore de saluer le général vietnamien Giap comme héros en oubliant les milliers de soldats français morts pour une certaine idée de la France en Indochine. Cette mémoire qui permet à un rappeur qui n’a pas manqué de rappeler son mépris pour « ce pays de kouffars » (comprendre « mécréants ») qu’est la France de chanter pour qu’on se souvienne du sacrifice des héros de Verdun. Ce rappeur qui disait à ses détracteurs « Venez, on va bien s’amuser ». C’est là tout ce dont Verdun lui inspire.
163 000 soldats y sont tombés pour la France
« Pas là pour du love my nigga, tu verras pas le black qui béggaie » (sic) vaut bien du Ernst Jünger ou du Remarque. Non ? Personne ne veut faire voter les morts, « le procédé est assez méprisable » dirait le Président Jean Gabin devant les caméras de Verneuil. Mais par décence pour nos poilus, si vous les méprisez, si cette histoire ne vous inspire que honte et repentance, alors oubliez-là. Mais ne l’insultez pas. D’autres s’en souviendront à votre place. On laissera le philosophe François-Xavier Bellamy conclure en 140 caractères : « Le plus simple des soldats tombé en silence à Verdun avait plus de grandeur que le règne du vide, du fric et de la haine incarné par Black M ». Ce 29 mai, les 163 000 soldats français tombés en silence à Verdun reposeront sous la terre qu’ils ont défendue au prix de leur vie. Au-dessus d’elle, leurs descendants chanteront avec Black M leur mépris, au mieux leur ignorance de ce qu’ils ont été.
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