Tsipras à Davos


Tsipras Davos

« Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts » s’est réjoui Alexis Tsipras devant un parterre de journalistes et d’hommes d’affaires à Davos. On ne saurait mieux dire. Un an après son coup de poker référendaire, un an après que le chef de Syriza a déclaré « la troïka est morte », le Premier ministre grec est passé presque inaperçu au forum de Davos. La Grèce rebelle qui faisait trembler le système monétaire européen et la croissance mondiale a plié. Le flamboyant leader qui faisait miroiter aux jeunes socialistes un prochain grand soir européen s’est rangé. Dans l’ambiance feutrée de la station suisse, Alexis Tsipras a pu échanger avec les grands argentiers et les grandes banques mondiales. Le temps où le Premier ministre grec faisait figure de pestiféré de l’économie mondiale n’est plus qu’un mauvais souvenir.

Christine Lagarde, directrice du FMI, en a profité pour renouer avec le partenaire électoral de Jean-Luc Mélenchon et Pierre Laurent. Après la brouille de l’hiver dernier, les choses sont rentrés dans l’ordre: « nous étions une partie des problèmes, désormais nous voulons faire parti de la solution » a résumé Alexis Tsipras. Wolfgang Schauble l’a pris au mot et a profité de leur conférence commune pour rappeler les engagements des pays comme le sien. Car malgré leurs efforts, les grecs sont encore loin de leurs objectifs en terme de déficit public.

Bref Tsipras n’était pas perdu à Davos. Il a eu le plaisir de retrouver des camarades de l’Internationale socialiste qu’il connaît désormais bien comme le commissaire européen Pierre Moscovici, le social-démocrate allemand Sigmar Gabriel et bien sûr Manuel Valls avec qui il a échangé une chaleureuse poignée de main.Pour la première fois en France, un Premier ministre s’est rendu au World Economic Forum avec une bonne partie de son gouvernement. Le premier Président de la République à s’y rendre était Nicolas Sarkozy en 2010 (ce dernier avait d’ailleurs prononcé un discours quasi altermondialiste). Le socialiste d’Evry et le gaulliste de Neuilly ont bien des points communs, à ceci près que Manuel Valls s’est bien gardé de critiquer le capitalisme mondial. Il a au contraire défendu sa ligne social-libérale. Mais contrairement à Tsipras, Manuel Valls n’a jamais revendiqué la lutte des classes. Déjà en 2015, le symbole de Davos avait fait sourire les commentateurs qui avaient encore en mémoire le discours du Bourget: « Mon ennemi c’est le monde de la finance! » Autrement dit, l’ennemi de François Hollande c’était Davos. Et il s’y était rendu trois ans plus tard. Aujourd’hui, plus personne n’y fait attention. Aujourd’hui, plus personne n’est choqué par la participation du Premier ministre. Ou presque.

Tandis que Tsipras et Valls discouraient sur l’estrade au milieu du gratin mondial des affaires, plusieurs milliers de personnes défilaient une fois de plus dans les rues d’Athènes pour protester contre la politique d’austérité pratiquée par Syriza.  Mais il n’y a pas qu’en Grèce qu’agriculteurs, pêcheurs et syndicalistes du secteur public sont en colère. En Bretagne aussi la contestation se poursuit. Et les interviews d’Emmanuel Macron, invité vedette des chaînes de télévision américaines à Davos, ne devraient pas aider Stéphane Le Foll à éteindre l’incendie.

*Photo : SIPA.AP21847103_000027.



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est responsable des questions internationales à la fondation du Pont neuf.

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