Je dois l’avouer, cette histoire de grippe machin nin nin ne m’intéresse que de très loin. Cette dernière pandémie en date et en tournée mondiale, enfin sur tous les écrans pour l’instant, me laisse froid. On a un peu trop crié au loup ces dernières années et je ne marche pas.
Souvenez-vous de la vache folle. Au départ la promesse d’une hécatombe qui pourrait bien régler les problèmes du chômage, des retraites et des embouteillages sur lesquels butent toutes les politiques. A l’arrivée, des milliers d’animaux abattus, plus de rognons, de tripes et de cervelles sur les marchés (ce qui est pour les fins gourmets une catastrophe en soi) et des mesures protectionnistes contre la perfide Albion à cornes. Evidemment, avec cette politique sanitaire, on n’a plus entendu les enfants pleurer dans les cantines et avec cette politique agricole, on n’a plus entendu les paysans pleurnicher pendant une bonne semaine mais on attend encore la vague de décès spongiformes promise. Aujourd’hui, tout le monde vous le dira, Kreutzfeld-Jakob, c’est très surfait.
Pour les médias, un clou du spectacle chasse l’autre et quand les moutons et les vaches épargnés sont retournés paître, ce sont les volailles qu’on a prises en grippe. Quelques milliers de poulets refroidis, quelques centaines de canards assignés à résidence et quelques dizaines de crétins masqués dans la rue mais la grippe aviaire ne s’est pas envolée comme prévu. Les soupçons se sont alors portés sur les Mexicains mais ceux-ci ont des ambassadeurs dans le monde entier contrairement aux cochons, vous connaissez la suite, la grippe est devenue porcine. Les pauvres n’ont pas eu le temps de faire nouf nouf qu’ils étaient à leur tour abattus en masse. Particulièrement dans l’un de ces pays du soleil moyennement levé où l’islam et son rapport aux porcs à quatre pattes a encore prouvé au monde son caractère visionnaire.
À l’époque, si j’avais été guide suprême du monde libre, j’aurais volontiers levé une armée pour faire payer leur crime aux islamistes qui ont sauté sur l’occasion pour régler des comptes anciens en obtenant la tête de nos frères porcins car je me sens plus d’affinités avec mes cousins à la queue en tire-bouchon qu’avec les obscurantistes qui leur font la peau. Mais je ne suis guide de rien et c’est sûrement une chance pour la paix mondiale.
Voilà pourquoi cette nouvelle forme de grippe apocalyptique qui ressemble surtout à l’Arlésienne, je m’en fous, je l’ignore, je la méprise. Pas de quoi justifier les salaires des pontes de l’OMS ni l’armée de fonctionnaires que la peur entretient.
Pour tout dire, la chin et nin, je l’avais presque oubliée quand je suis tombé sur une affiche qui en traitait et dont le slogan était : « VACCIN = GENOCIDE ». Comme on dit, ça m’a interpellé. Mais comment peut-on être aussi contre ? J’ai beau savoir depuis Julien Coupat que les contres, ça ose tout et que c’est même à ça qu’on les reconnaît, je suis toujours surpris quand le grotesque rejoint à ce point l’indécence.
Les antis-vaccins, groupuscule parti en croisade pour nous convaincre que les laboratoires nous empoisonnent pour arrondir leurs fins de mois avec la complicité de l’Eétat et de tous les médias à part peut-être Daniel Mermet, quoique, n’ont pas l’air vaccinés contre le ridicule. De rage, je serais presque allé me faire vacciner. Après m’être un peu emporté contre ces enfants gâtés de la société industrielle, je me suis revu en guide suprême de ce monde où la science et le médicament ont eu raison de l’offrande et de la prière aux dieux des maladies mortelles et je me suis mis à rêver que du haut de mon pouvoir absolu, je pourrais prendre ces imbéciles au mot.
Je commencerai par leur interdire l’accès à tous les vaccins et, avec l’assurance que donne l’exercice de la dictature, je les regarderai crever doucement de toutes ces affections dont ils ont oublié jusqu’à l’existence. Quand leurs enfants commenceront à s’éteindre de la rougeole comme c’est le cas en Afrique faute de vaccins, et que ces militants viendront demander pardon à plat ventre, je me montrerai clément et les ferai interner dans l’hôpital psychiatrique de leur choix.
Mais tout ça n’arrivera pas. D’abord parce que la dictature est un rêve que je caresse souvent mais qui ne me tente pas vraiment. Je suis sûr que commander absolument, à part pour quelques pervers, doit être aussi ennuyeux qu’obéir absolument. Ensuite parce que je connais un peu ces ingrats que la société du progrès médical inquiète. En pleine santé, ils alarment, pétitionnent, affichent et propagent les rumeurs les plus absurdes mais dans la souffrance, font table rase de l’idéologie paranoïaque qui les nourrit et courent à l’hôpital pour exiger le droit à la morphine pour tous. Et c’est tant mieux. Quand le bon sens l’emporte sur la peur, ça me rassure. Même chez le roi des contres.
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