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Un ministre…


Un ministre…

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Depuis plusieurs jours, Rama Yade fait l’objet de tirs nourris de la part de la plupart des chevau-(pas très)légers de la Sarkozie. Nadine Morano et Frédéric Lefebvre, avec leur finesse habituelle, avaient ouvert le feu. Il semble bien que François Fillon, dont le boulot semble bien de se débarrasser des importuns[1. Spéciale dédicace à Dame Christine Boutin.], leur ait emboîté le pas ce matin.

Rama Yade agace le président depuis plusieurs mois. Sa sortie lors de la venue du Guide libyen fin 2007, son refus de mener la liste francilienne aux élections européennes, ses déclarations en pleine affaire « Jean de l’EPAD » ont déplu, doux euphémisme, à Nicolas Sarkozy. Et, malgré le fait qu’elle soit dans le collimateur, alors qu’un vent de révolte souffle parmi sénateurs et députés, voilà la secrétaire d’Etat au sport qui se désolidarise de sa ministre de tutelle sur la suppression du droit collectif à l’image, niche fiscale permettant aux clubs professionnels de mieux rémunérer leur joueurs.

Sur ce dossier, Rama Yade a, à la fois, tort et raison. Tort parce qu’il est absolument indigne en cette période de crise que subsiste ce genre d’avantage. On aimerait d’ailleurs que le bouclier fiscal fasse l’objet de la même indignation. Raison parce qu’il ne faudra pas s’étonner que les championnats nationaux, et notamment celui de football, redeviennent encore moins attractifs qu’auparavant pour les meilleurs joueurs, nos clubs étant particulièrement désavantagés par rapport à l’Angleterre et l’Espagne. Que l’on sache, ce n’est pas Rama Yade qui s’est couchée à Biarritz l’an dernier lorsqu’il s’agissait de vendre à la Commission de Bruxelles un retour au quota de joueurs nationaux[2. Le fameux 6+5 cher à Joseph Blatter, président de la FIFA.] dans les équipes. C’est son prédécesseur Bernard Laporte et… Nicolas Sarkozy lui-même qui se faisait pourtant fort d’imposer une spécificité sportive et qui, disait-il, avait convaincu son collègue Gordon Brown. Devant l’idéologie de la concurrence libre et non faussée, tout ce joli monde a cédé et a renoncé à la seule solution qui permettrait un rééquilibre dans les championnats, quelle que soit la fiscalité des pays.

Depuis quelques jours, donc, les appels à la démission de Rama Yade n’ont pas porté leur fruit tant désiré. « Un ministre, ça ferme sa gueule ou ça démissionne », disait Jean-Pierre Chevènement, qui s’y connaît puisqu’il a quitté trois gouvernements[3. En 1983, sur le tournant de la rigueur, en 1991 à propos de la guerre en Irak puis en 2000 sur un projet portant atteinte à l’indivisibilité de la République. Admettons qu’à chaque fois, le panache ne manquait pas.]. Mais cette jurisprudence n’est plus de saison. D’abord, parce que les Chevènement ne courent plus les rues désormais. Ensuite, parce que la nature d’un gouvernement nommé par Nicolas Sarkozy relève davantage aujourd’hui du casting, comme dirait Eric Zemmour. Dans ce schéma, ce n’est pas aux acteurs de démissionner, mais au metteur en scène de virer ceux qui ne lui conviennent plus. Enfin, Rama Yade est la personnalité du gouvernement la plus haute dans les sondages de popularité. Son intérêt n’est pas de démissionner, surtout sur un sujet aussi mineur qu’une niche fiscale pour sportifs pros, mais plutôt de se faire virer pour indiscipline, laquelle s’avère la composante essentielle de sa bonne image dans le pays.

A l’heure où j’écris ses lignes, on ne peut évidemment pas savoir qui gagnera le bras de fer. Si Rama Yade, finalement, ne résiste pas à la pression – et démissionne -, ou si Nicolas Sarkozy et François Fillon doivent se résoudre à en faire une martyre ou, pis encore, passer l’éponge. Cette dernière solution ne semble pas idéale pour calmer les ardeurs des parlementaires qui pourrissent actuellement la vie du gouvernement.



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