Accueil Édition Abonné Avril 2025 Identité nationale: dessine-moi un Français

Identité nationale: dessine-moi un Français

Ce qui devient une absence


Identité nationale: dessine-moi un Français
Blocage du rond-point de Mandelieu, dans les Alpes-Maritimes, 17 novembre 2018. La fraternité vécue des gilets jaunes reste, pour certains, le dernier souvenir d’une identité française partagée © Frédéric DIDES/SIPA

François Bayrou a annoncé que des « conventions citoyennes décentralisées » seraient organisées à travers tout le pays pour débattre de la question : « Qu’est-ce qu’être français? » Sans attendre un premier tour de table officiel, Céline Pina a posé cette question dans un village au cœur de la Bourgogne


Une petite commune bourguignonne de 500 habitants. Il fait froid en cette soirée de février. Au milieu du salon, un feu de poêle réchauffe l’atmosphère. Dans cet environnement représentatif de ce qu’on nomme à Paris « les territoires » (une appellation qui permet, dans le même mouvement, d’embrasser et d’ignorer la richesse humaine des provinces françaises), ils sont six à avoir accepté de venir discuter politique – en réalité, même s’ils ne le savent pas, métapolitique.

Portraits croisés d’une communauté rurale

Jean-Pierre, 75 ans, ancien cadre commercial, Sophie, 49 ans, infirmière pénitentiaire, Michel, 65 ans, ex-policier, Pascale, 50 ans, cadre dans une banque, David, la soixantaine qui vient de prendre sa retraite de la SNCF, et Mika, 32 ans, menuisier. Six piliers d’une petite communauté de 500 âmes, non loin d’Auxerre. En marge de cette rencontre, ont également témoigné Gabriel, 20 ans, élève en prépa et Elsa, 22 ans, étudiante en sciences humaines.

Les plus âgés ne semblent guère à l’aise quand je leur soumets le thème du jour : « Qu’est-ce qu’être français ? » La question, il est vrai, n’est pas banale, et surtout elle paraît piégée, car elle suscite la crainte d’être jugé socialement si on y répond sans filtre.

Les plus jeunes se montreront moins réservés. Il faut dire qu’ils étaient encore enfants en 2009, quand le « grand débat sur la valeur de l’identité nationale », lancé en grande pompe par l’Élysée, a permis à la gauche d’intenter un procès en racisme systémique à Nicolas Sarkozy.

Autre temps, autres mœurs ? En 2025, la nouvelle mouture du débat, voulue par François Bayrou, n’a pas provoqué de levée de boucliers particulière en France, si ce n’est dans quelques rédactions au progressisme particulièrement sensible. Ainsi, dans ce village de Bourgogne, aucun de mes interlocuteurs ne s’indigne quand je pose la question. Et tous savent parfaitement de quoi il est question – de l’immigration incontrôlée et de ses méfaits, de la panne de l’assimilation.

Michel, le policier à la retraite, choisit d’aborder ce terrain mouvant par Mayotte : « Cette île est envahie par une immigration tellement importante que la situation est devenue ingérable. Mayotte est en France, mais personne n’y vit comme en France. La situation, dramatique, apparaît définitive. Les Français de là-bas ont, de fait, perdu une partie de leurs


Article réservé aux abonnés
Pour lire la suite de cet article et accéder à l'intégralité de nos contenus
Formule numérique dès 3,80€
Déjà abonné(e)  ? Identifiez-vous

Avril 2025 - #133

Article extrait du Magazine Causeur




Article précédent Comprenne qui pourra
Article suivant Quand un journaliste anti-Trump mange à la Maison Blanche, les Démocrates s’insurgent
Ancienne conseillère régionale PS d'Île de France et cofondatrice, avec Fatiha Boudjahlat, du mouvement citoyen Viv(r)e la République, Céline Pina est essayiste et chroniqueuse. Dernier essai: "Ces biens essentiels" (Bouquins, 2021)

RÉAGISSEZ À CET ARTICLE

Pour laisser un commentaire sur un article, nous vous invitons à créer un compte Disqus ci-dessous (bouton S'identifier) ou à vous connecter avec votre compte existant.
Une tenue correcte est exigée. Soyez courtois et évitez le hors sujet.
Notre charte de modération