François Bayrou a annoncé que des « conventions citoyennes décentralisées » seraient organisées à travers tout le pays pour débattre de la question : « Qu’est-ce qu’être français? » Sans attendre un premier tour de table officiel, Céline Pina a posé cette question dans un village au cœur de la Bourgogne
Une petite commune bourguignonne de 500 habitants. Il fait froid en cette soirée de février. Au milieu du salon, un feu de poêle réchauffe l’atmosphère. Dans cet environnement représentatif de ce qu’on nomme à Paris « les territoires » (une appellation qui permet, dans le même mouvement, d’embrasser et d’ignorer la richesse humaine des provinces françaises), ils sont six à avoir accepté de venir discuter politique – en réalité, même s’ils ne le savent pas, métapolitique.
Portraits croisés d’une communauté rurale
Jean-Pierre, 75 ans, ancien cadre commercial, Sophie, 49 ans, infirmière pénitentiaire, Michel, 65 ans, ex-policier, Pascale, 50 ans, cadre dans une banque, David, la soixantaine qui vient de prendre sa retraite de la SNCF, et Mika, 32 ans, menuisier. Six piliers d’une petite communauté de 500 âmes, non loin d’Auxerre. En marge de cette rencontre, ont également témoigné Gabriel, 20 ans, élève en prépa et Elsa, 22 ans, étudiante en sciences humaines.
Les plus âgés ne semblent guère à l’aise quand je leur soumets le thème du jour : « Qu’est-ce qu’être français ? » La question, il est vrai, n’est pas banale, et surtout elle paraît piégée, car elle suscite la crainte d’être jugé socialement si on y répond sans filtre.
Les plus jeunes se montreront moins réservés. Il faut dire qu’ils étaient encore enfants en 2009, quand le « grand débat sur la valeur de l’identité nationale », lancé en grande pompe par l’Élysée, a permis à la gauche d’intenter un procès en racisme systémique à Nicolas Sarkozy.
Autre temps, autres mœurs ? En 2025, la nouvelle mouture du débat, voulue par François Bayrou, n’a pas provoqué de levée de boucliers particulière en France, si ce n’est dans quelques rédactions au progressisme particulièrement sensible. Ainsi, dans ce village de Bourgogne, aucun de mes interlocuteurs ne s’indigne quand je pose la question. Et tous savent parfaitement de quoi il est question – de l’immigration incontrôlée et de ses méfaits, de la panne de l’assimilation.
Michel, le policier à la retraite, choisit d’aborder ce terrain mouvant par Mayotte : « Cette île est envahie par une immigration tellement importante que la situation est devenue ingérable. Mayotte est en France, mais personne n’y vit comme en France. La situation, dramatique, apparaît définitive. Les Français de là-bas ont, de fait, perdu une partie de leurs
