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Un président, ça se mérite

L’épouse du président Macron estimerait que les Français ne méritent pas son mari


Un président, ça se mérite
Rabat, Maroc, 30 octobre 2024 © JEANNE ACCORSINI/SIPA

Ciel, son mari! Brigitte Macron a le droit de dire ce qu’elle veut en privé. Et les Français ne sont pas de petites choses fragiles qu’il faudrait à tout prix « respecter »…


Une petite phrase de Brigitte Macron sur les Français enflamme les réseaux sociaux. Ce sont des propos rapportés par Le Monde que l’on trouve dans un long texte sur la solitude du président[1], lequel verrait actuellement nombre de ses anciens amis se détourner de lui, sans doute autant pour désaccords que parce qu’il ne peut plus rien leur offrir. Lors du voyage présidentiel au Maroc, Brigitte Macron aurait confié à Arielle Dombasle, l’épouse de Bernard-Henri Lévy : « Les Français ne le méritent pas ».

Indignation générale

Je n’y étais pas, et je ne peux donc pas confirmer ces propos. Le Monde non plus n’était vraisemblablement pas entre Mmes Macron et Dombasle… Mais, cela a évidemment suffit pour provoquer un véritable déchaînement numérique, un flot d’attaques souvent minables, haineuses, voire blessantes. Les réseaux sociaux, quoi ! En tout cas, rien à voir avec la critique politique.

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D’abord, on ne sait pas si elle l’a dit. Donc, c’est un ragot. Et, même si elle l’a dit, ce sont des propos privés. Brigitte Macron n’a aucune fonction officielle et tient son rang qui n’existe pas avec beaucoup d’élégance. Elle dit ce qu’elle veut en privé. Ras-le-bol des journalistes qui se comportent comme la Stasi sous le beau prétexte d’informer ! Le respect de la vie privée est un pilier de la démocratie; Benjamin Constant parlait splendidement de la « jouissance paisible de l’indépendance privée ». Sur le fond, je n’entends pas un propos politique, j’entends surtout une femme qui défend son mari parce qu’elle souffre des attaques contre lui.

Cependant, est-ce que ça ne traduit pas une forme de déconnexion, voire de mépris ?

Pour une fois, je voudrais me mettre à la place des élus. Ce genre de remarque privée traduit peut-être aussi un sentiment d’injustice très partagé dans tous les camps politiques. Beaucoup d’élus ont le sentiment de se donner à fond pour le pays. Ils ne font peut-être pas la politique qu’on souhaiterait, mais ils travaillent dur et se lèvent tôt, alors qu’ils gagneraient plus et auraient une vie plus simple dans le privé. En prime, ils se font insulter et traiter de profiteurs à longueur de journées. Il faut comprendre ce sentiment d’injustice.

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Ceci étant, c’est vrai aussi, le pouvoir déconnecte. Montesquieu dirait peut-être que le pouvoir absolu déconnecte absolument. Par ailleurs, Emmanuel Macron est supérieurement intelligent et il le sait. Peut-être un peu trop… Convaincu qu’il sait mieux que les Français ce qui est bon pour eux, il enrage qu’ils ne s’en rendent pas compte. Cela prouve au demeurant que l’intelligence cérébrale ne suffit pas, pour gouverner, il faut aussi une intelligence charnelle qui fait sans doute défaut à notre jeune président. Le roi Salomon demandait à Dieu de lui donner un cœur intelligent. Quant au mépris, réel ou supposé, j’en ai un peu marre de ces pleurnicheries. Je ne veux pas que le président de la République me considère, ni qu’il m’aime, mais qu’il fasse une bonne politique pour le pays. Sur ce point, on a parfaitement le droit de critiquer durement Emmanuel Macron, et de lui dire qu’il a le peuple qu’il mérite. Mais comme aurait dit Pompidou, arrêtez d’emmerder Brigitte !


Retrouvez Elisabeth Lévy dans la matinale de Jean-Jacques Bourdin au micro de Sud Radio


[1] https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/12/01/depuis-la-dissolution-de-l-assemblee-nationale-le-lent-crepuscule-d-emmanuel-macron_6423144_823448.html




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Fondatrice et directrice de la rédaction de Causeur. Journaliste, elle est chroniqueuse sur CNews, Sud Radio... Auparavant, Elisabeth Lévy a notamment collaboré à Marianne, au Figaro Magazine, à France Culture et aux émissions de télévision de Franz-Olivier Giesbert (France 2). Elle est l’auteur de plusieurs essais, dont le dernier "Les rien-pensants" (Cerf), est sorti en 2017.

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