En se rendant au chevet de la France profonde qui refuse de disparaitre, Emmanuel Courcol réussit à faire vibrer la corde sensible sans sombrer dans la guimauve ou le prêche social. Mercredi en salles.
Thibaud (Benjamin Lavernhe), fils de bonne famille provinciale, est devenu, talent et travail aidant, un jeune chef d’orchestre de renommée mondiale – il enseigne à Cleveland et se produit partout sur la planète. Le maestro apprend qu’atteint d’une leucémie, seul un donneur de moelle épinière pourra le sauver ; il a bien une sœur qui sacrifierait pour lui ce morceau de chair, mais les examens révèlent qu’elle n’a pas le même ADN. Thibaud découvre alors le pot aux roses, un secret bien gardé par ses parents : celui de son adoption. Tout comme celui de l’existence cachée d’un frère cadet de même sang, élevé quant à lui à Roubaix par une nourrice, dans un milieu populaire, comme on dit. Et voilà notre Thibaud parti faire connaissance avec son Jimmy (Pierre Lottin), cantinier et tromboniste à ses heures : avec lui, la greffe peut prendre. Encore faut-il qu’il soit donneur.
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Comédie douce-amère
Prolégomènes d’une intrigue toute en fantaisie, en émotion et en fanfare, selon le titre du film, porté d’un bout à l’autre par des répliques senties et des comédiens impeccables – à commencer par le photogénique Pierre Lottin, 35 ans, dans le rôle de Jimmy, comédien découvert dans Les Tuches 1, 2 et 3, d’Olivier Baroux, et qui jouait déjà il y a quatre ans dans Un triomphe, le film précédent d’Emmanuel Courcol, cet ancien acteur de théâtre passé sur le tard à la réalisation…
Il faut s’en réjouir. Comédie douce-amère menée avec brio, En fanfare fait vibrer la corde sensible, tout en esquivant le triple écueil de la farce, de la guimauve et du prêche social. Sous le signe de la musique et dans le paysage de cette France profonde pas encore tout à fait disparue, se noue la rencontre miraculeuse de deux âmes tendres, de cultures apparemment dissonantes, de destins sensément irréductibles, de galaxies sociales séparées par un gouffre économique, mental, anthropologique : d’un côté, arrimé à cette communauté ouvrière paupérisée du Nord dont l’usine est en sursis, et courtisé par une cégétiste au grand cœur (Sarah Suco), le Jimmy, prolo et jeune père divorcé en souffrance affective, discret collectionneur de vinyles, connaisseur de jazz et modeste joueur de trombone ; de l’autre Thibaud l’esthète ambitieux, l’érudit raffiné à l’article de la mort, et qui passe du clavier au pupitre, de Schubert à Verdi, et bientôt de l’orchestre classique au flonflon…
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Conte de fée bien ancré dans le réel, En fanfare prend appui sur un casting d’excellente facture pour chanter, avec beaucoup de délicatesse, l’hymne nostalgique et rêveur de la réconciliation des contraires. Pour liant, quelques morceaux choisis, – de ces must du répertoire musical dont on ne se lasse jamais.
En fanfare. Film d’Emmanuel Courcol. Avec Benjamin Lavernhe, Pierre Lottier, Sarah Suco. France, couleur, 2024. Durée : 1h43
En salles le 27 novembre
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