La reconstruction de Notre-Dame de Paris, et les modalités de sa réouverture avec le président de la République, font l’objet d’interminables polémiques nationales. Mais, la religion catholique, et toutes ces polémiques, c’est ça aussi notre France !
Emmanuel Macron parlera sur le parvis de Notre-Dame le 7 décembre. Je dis bien devant Notre-Dame, pas dedans. Notre-Père qui n’est pas aux cieux mais à l’Élysée descendra en effet de son Olympe le 7 décembre et prononcera son homélie sur le parvis. Il parait qu’il se serait bien vu le faire à l’intérieur, juste avant la messe. Mais son entourage a dû le convaincre que cette confusion des genres serait du plus mauvais goût, et que tout ce qu’il dirait serait alors emporté par une polémique.
Donc, ce sera César le 7 décembre, et Dieu le 8, avec la première messe dans la cathédrale depuis le drame d’avril 2019.
Mais malgré tout, cette visite fait quand même brailler quelques laïcards. Le parvis n’est pas une église, ne leur en déplaise ! Il appartient au peuple de Paris et de France, cela n’a donc rien de choquant. Et je dirais d’ailleurs la même chose si c’était la mosquée de Paris, autre élément de notre patrimoine et de notre histoire.
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Le 7, Emmanuel Macron sera en quelque sorte le maître d’œuvre ; l’État remettra alors les clefs du chantier au client, l’Église. À l’Élysée, on annonce un grand discours sur le thème du « pari tenu ». Mais, connaissant Emmanuel Macron, on peut aussi espérer quelques envolées sur la France millénaire.
Cependant, quand il veut quelque chose, notre président renonce rarement. Il s’est donc aussi concocté une visite de chantier dès le 29 novembre. Il l’aura donc bien, son grand moment dans la nef de Notre-Dame. En petit comité, bien sûr : juste les 2000 compagnons qui ont travaillé sur le chantier, les donateurs (c’est-à-dire tout le gratin des affaires), quelques invités… et les caméras de télévision. Une cérémonie intime !
Qu’Emmanuel Macron veuille profiter de la réouverture de Notre-Dame pour renouer avec les Français, que ces derniers lui soient un peu reconnaissants pour avoir tenu les délais, c’est légitime. Il l’avait promis, il l’a fait. Cinq ans après, Notre-Dame de Paris renaît de ses cendres et on le doit largement à sa volonté. Par ailleurs, le président de la République n’a pas tant d’autres grands succès éclatants ou réalisations à montrer… En plus, il nous a épargné le « geste architectural » dont il nous menaçait. La flèche de Viollet-le-Duc a été restaurée à l’identique.
On dit de moi que je suis intransigeante sur la laïcité. Et on s’étonne que cela ne me choque pas que le président Macron assiste à la messe du 8 décembre. Intransigeante ne signifie pas extrémiste ou obtuse. La séparation entre l’Église et l’État signifie que l’État n’obéit pas aux lois de dieu et ne se mêle pas des affaires des églises, sauf pour vérifier qu’elles respectent bien sa loi. Cela ne signifie pas qu’ils ne se parlent jamais. Ni que nos élus n’ont pas le droit d’aller à la messe. Le général De Gaulle y allait, par exemple, même si en public, il ne communiait pas.
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Enfin, en France, le catholicisme n’est pas une religion parmi d’autres. C’est notre ADN, notre terreau culturel, notre inconscient anthropologique. Notre-Dame, c’est notre inscription dans l’Histoire, c’est la France éternelle. Ses cloches ont sonné les grandes heures de la nation, de la fin de la guerre de cent ans à la Libération de Paris. Quand Emmanuel Macron ne sera plus qu’un chapitre dans les livres d’histoire (et la plupart d’entre nous, même pas une note de bas de page…), Notre-Dame sera toujours là.
Reste à espérer que le président Macron soit touché par la grâce et l’esprit saint, et qu’il renonce à son funeste projet de remplacer les vitraux de Viollet-le-Duc, pourtant restés intacts après l’incendie, par les œuvres d’artistes à la mode comme Buren ou d’autres. Parfois, la plus belle trace qu’on puisse laisser dans l’histoire, c’est d’avoir l’humilité de ne rien changer.
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