Les critiques concernant la délégation pléthorique des invités de son voyage officiel au Maroc ne suffisaient pas. Dans la foulée, le président de la République a estimé nécessaire de montrer une nouvelle preuve de repentance envers l’Algérie, qui voyait ce fameux déplacement d’un mauvais œil.
Pour son voyage tapis rouge au Maroc, nous avons eu sa petite cour privée de repris de justice. Un condamné pour abus de faiblesse sur une personne de grand âge et d’encore plus grande fortune, un triste sire ex-député bas de plafond coupable, lui, d’avoir tabassé à coup de casque de moto un de ses semblables, et surtout le troisième de ces individus de notable mérite, le très influent et très prisé Yassine Bellatar, convaincu quant lui de divers faits de délinquance dont de très affables menaces de mort.
Salut la compagnie !
Yassine Bellatar dont il se dit qu’il aurait eu assez d’influence auprès du président pour l’avoir convaincu de ne pas s’associer l’an passé à la marche contre l’antisémitisme organisée conjointement par la présidente de l’Assemblée nationale et le président du Sénat. Yassine Bellatar qui, lorsqu’il était propriétaire d’un café PMU à Sevran veillait tout particulièrement à ce que l’accès en soit interdit aux femmes, ce que montra fort bien à l’époque un reportage de France 2. Sur ce point, je me demande comment la Première Dame, dont on nous vante si complaisamment la fibre féministe, a pu s’accommoder d’une telle compagnie au sein de la cohorte officielle. Il est vrai que dans la déliquescence morale actuelle de ce petit monde-là, on n’en est plus à une compromission près.
La présence de ces gens déshonorés dans une délégation officielle ne pouvait que nous déshonorer nous-mêmes. Comment aurions-nous pu être fiers de l’image frelatée que cette représentation de la France nous imposait et imposait à nos hôtes marocains ?
Il y avait eu aussi, quelques jours plus tôt, dans la bouche du chef de l’État, les inepties historiques et les mots désagréables crachés à l’encontre d’Israël et de son peuple, stupidités sur lesquelles nous ne reviendrons pas ici[1].
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Enfin, il y a à présent, non plus des humiliations mais ce qui relève en réalité de l’insulte. Une insulte à nous autres Français, une insulte à la France notre patrie, une insulte à la mémoire de ceux qui se sont battus en Algérie pour le drapeau et qui, nombreux, trop nombreux, y ont perdu la vie.
Bombe mémorielle
Le 1er novembre, jour de commémoration de l’insurrection en Algérie qui a mis le feu aux poudres, le président Macron y est allé, quant à lui, de sa bombe mémorielle. Le dirigeant Larbi Ben M’hidi, « un des six dirigeants du FLN a été assassiné en mars 1957 par des militaires français placés sont le commandement du général Aussaresses », voilà ce qu’écrit le communiqué élyséen[2]. Vous avez bien lu. Le choix des mots est de première importance. M. Macron n’écrit pas que l’individu en question a été éliminé, par exemple. Non, son choix s’est porté sur le terme assassiné, celui qu’on emploie pour désigner, en droit, les meurtres avec préméditation. Cela revient à ravaler au rang d’acte criminel perpétré par de vulgaires assassins de droit commun ce qui est – et reste – pour violent qu’il soit, un fait de guerre. Là est effectivement l’insulte. Là se faufile la preuve indiscutable de l’intention délibérée de piétiner la mémoire nationale.
Ces faits m’incitent à considérer que, désormais, M. Macron pourrait légitimement revendiquer une place de choix dans les défilés et manifestations de M. Mélenchon. Celui-ci brandirait avec fierté sa pancarte « La police tue » et le Jupiter dégringolé de l’Olympe une autre banderole avec ces mots en lettres de sang : « L’Armée assassine ». Est-il besoin de rappeler en passant que le président de la République n’est autre que le chef des Armées ! Sans commentaire. Tout aussi inutile d’évoquer, je pense, l’utilisation que le pouvoir algérien fera de cette énième auto-flagellation.
Quant à moi, je suis convaincu que rien de cela n’est le fait du hasard. Pas plus la honteuse présence de ces types plus que douteux dans le voyage officiel que ce communiqué cinglant, le moment choisi et le vocabulaire employé. En narcissique caractérisé, M. Macron, déçu, blessé de l’image de lui-même que lui renvoie désormais le miroir qu’est l’opinion du peuple de France, s’en prend à ce miroir. Il cherche à le briser, ou tout au moins à le salir, à le souiller. Et c’est bien ce à quoi il s’emploie en nous imposant, d’une part l’humiliation d’infréquentables mis à l’honneur dans un voyage officiel, et d’autre part, cette déclaration insultante sur notre passé militaire.
Les jours de la Toussaint sont souvent assez tristes, assez sombres. Ils le sont dans la sphère familiale, dans l’intime. M. Macron aura au moins réussi à hausser cette affliction au niveau de la nation entière. Espérons que cette formidable réussite suffira à cautériser quelque peu les égratignures de son ego démesuré.
[1] Mi-octobre, la presse rapportait que le président de la République aurait déclaré, lors du Conseil des ministres : « M. Netanyahou ne doit pas oublier que son pays a été créé par une décision de l’ONU. Par conséquent il ne devrait pas s’affranchir des décisions de l’ONU ». NDLR.
[2] https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2024/11/01/commemoration-du-1er-novembre-2024-70eme-anniversaire-du-declenchement-de-linsurrection-du-1er-novembre-1954
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