Les Français sont en train de prendre conscience qu’après avoir bataillé pour se prémunir contre les « abus de pouvoir » de toute sorte, leur société est aux prises avec des « abus de droit ».
Il y a des moments d’actualité où le concept rejoint le tragique, où la réflexion de haut niveau s’accorde avec le bon sens triste et résigné. Où une étincelante analyse de Marcel Gauchet dans Le Figaro est confirmée, à hauteur de douleur – « toute ma vie a volé en éclats » – par la mère de Lola, deux ans après le meurtre de celle-ci.
Mais avant, sur un mode réduit, l’affrontement de deux France : celle du Monde qui dénonce « l’idéologie de Bruno Retailleau » et celle ignominieuse qui fait vivre un calvaire au jeune Nathan âgé de 15 ans parce que sur son compte TikTok il a partagé une vidéo où il pose avec Marine Le Pen. La haine des réactions à son encontre dépasse l’entendement. Tous les boucliers naturels ont sauté : le respect du troisième âge, la protection de l’enfance.
Pour Le Monde, avoir des idées conservatrices, une pensée structurée, la mettre en application sur le plan régalien à partir de l’impact d’un réel qui chaque jour démontre sa dangerosité, c’est « l’idéologie de Bruno Retailleau ». La seule idéologie qui vaille est celle de gauche : brassant des naïvetés et des illusions contre la réalité.
Revenons à Marcel Gauchet qui dans son nouveau livre Le Noeud démocratique, définit le clivage politique de notre temps comme « l’opposition entre néolibéralisme et populisme ». Le premier a consisté longtemps à « mettre à l’abri les droits personnels de l’emprise abusive du politique » quand le second doit viser aujourd’hui à « réarmer les libertés du bras d’une autorité politique ».
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Marcel Gauchet réhabilite le populisme qui « dans sa masse est pour l’efficacité de l’État dans le respect du droit. La sensibilité populiste ne comprend pas que les deux soient incompatibles. La non-exécution des OQTF, voilà un thème typique de l’exaspération populiste ». Il met en garde sur une dérive qui nous a conduits « après avoir lutté contre les abus de pouvoir, à nous mettre aux prises avec des abus de droit ».
Rien n’est pire, au quotidien, que de se priver de la parole douloureuse et dramatiquement irréfutable de citoyens qui ont vu leur vie sombrer parce que le crime a frappé, quand ils attendent le jugement et des réponses à leurs questions. Je crains que leur espérance judiciaire ne soit déçue.
Il n’empêche que la mère de Lola touche nos esprits et nos cœurs quand elle énonce ce que la tragédie lui a enseigné : « Malheureusement on est impuissant. On ne peut rien faire contre tous ces drames. C’est la France… J’espère qu’un jour les choses bougeront et que tout sera fait pour lutter contre toute la violence et l’insécurité qu’il y a dans ce pays. Il faut reconnaître que c’est de pire en pire… On a l’impression qu’on enlève tout aux policiers qui sont là pour nous protéger, alors que les voyous sont récompensés. Ce n’est pas normal. Il faut aussi que les gens qui n’ont rien à faire chez nous restent chez eux ». C’est la traduction simple et émouvante du populisme que Marcel Gauchet a défendu. Un populisme du quotidien.
Et faut-il vraiment, pour que la gauche politique et médiatique se rengorge, après un tel témoignage, s’en prendre à Bruno Retailleau qui n’a que le tort de penser et d’agir comme une immense majorité le souhaite ?
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