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McKinsey et la tare de consanguinité

Le billet de Dominique Labarrière


McKinsey et la tare de consanguinité
Capture France 2

Le magazine « Cash Investigation » d’Elise Lucet est venu une nouvelle fois reprocher à la macronie d’avoir fait appel trop souvent au prestigieux cabinet de conseil américain.


Il se trouve que Philippe de Villiers n’a pas attendu l’ayatollah Lucet et son Cash Investigation pour dénoncer la collusion entre le cabinet privé Mc Kinsey et Emmanuel Macron. Bien avant tout le monde, le créateur du Puy du Fou révélait que, dès le début de la première campagne présidentielle du transfuge de la banque Rothschild, les mercenaires de chez Mc Kinsey étaient à la manœuvre. Bénévolement, ne manquait-on pas de faire valoir. Sauf, que, par la suite, le retour sur investissement aura été des plus profitables pour cette officine américaine de conseils en stratégie tous azimuts : politique, marketing, communication, etc. C’est tout juste si l’Élysée, les gouvernements successifs du quinquennat, n’ont pas fait appel à la lumière (coûteuse) de ces hautes intelligences pour déterminer la couleur des moquettes ministérielles et choisir le fournisseur des tailles crayon.

Humilité intellectuelle

On pardonnera au quidam lambda que je suis de trouver bizarre que des gens aussi instruits, aussi bien formés aux choses de la politique, aussi sûrs d’eux-mêmes et de leurs supposés talents, des gens aussi bien entourés au sein de leurs cabinets ne puissent pas trouver en eux-mêmes et autour d’eux les pistes, les solutions, les voies à emprunter pour faire marcher le pays ? On est effectivement fondé à se poser la question. Cela dit, s’enquérir de conseils extérieurs n’est certainement pas en soi une mauvaise idée. Ni une pratique condamnable a priori. On pourrait même déceler dans cette démarche quelque chose comme une manifestation d’humilité intellectuelle. À ceci près que la modestie ne paraît pas être la vertu dominante de ce petit monde-là.

À lire aussi, du même auteur: L’or puant des couches-culottes

Un autre aspect ne cesse d’intriguer lorsqu’on y prête attention. Je veux parler ici de l’étrange et criante consanguinité existant entre les uns et les autres, les conseilleurs et les conseillés. Tous sortent peu ou prou du même moule : même cursus, passage par les mêmes écoles de pouvoir, même modus vivendi, mêmes références socio-culturelles. Et, pour faire bonne mesure, mêmes souliers pointus et costards ajustés au plus près. Ce point-là aussi peut paraître bizarre à quiconque observe cela de loin. Pourquoi cultiver cette consanguinité ? Pourquoi ne pas aller chercher ailleurs avis et conseils ? Pourquoi se condamner à l’infertilité de l’entre-soi ? Pourquoi refuser d’emblée toute surprise, toute secousse que provoqueraient des suggestions venues d’ailleurs, différentes, voire divergentes ? Pourquoi ne pas chercher appui du côté des vrais gens, des acteurs de la vraie vie, de ceux qui font fonctionner le pays au quotidien et qui, de ce fait, n’ont pas forcément face aux problèmes qui se posent l’approche copie-conforme à ses propres vues que le pouvoir obtient inévitablement par effet miroir en s’en tenant au recours à ses consanguins, à ses clones ?

Question embarrassante

Qu’aurait-il donc à craindre en se tournant vers le « pays réel » ? De quoi les gouvernants ont-ils peur ? Car il s’agit bien de cela. La peur. La défiance que leur inspire le peuple. C’est ce qu’on a bien vu lors du second tour des législatives avec la fameuse et fumeuse théorie du barrage. Ils ont eu beau jeu de présenter leur stratégie de « barrage » comme une exigence « morale », le refus de pactiser et de se compromettre avec une force politique artificiellement présentée comme sulfureuse. Eux-mêmes croient-ils une seule seconde à la pertinence de l’argument ? La vérité toute simple ne serait-elle pas que ce barrage était en fait un barrage contre le peuple ? Contre l’organisation politique qui en est aujourd’hui, de loin, – les tout récents sondages le confirment clairement – la plus proche ?




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Ex-prof de philo, auteur, conférencier, chroniqueur. Dernières parutions : "Marie Stuart: Reine tragique" coll. Poche Histoire, éditions Lanore. "Le Prince Assassiné – le duc d’Enghien", coll. Poche Histoire, éditions Lanore.

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