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Ne jouons pas sur les maux!

Le billet politique de Philippe Bilger


Ne jouons pas sur les maux!
Michel Barnier à Paris, 5 septembre 2024 © Sarah Meyssonnier/AP/SIPA

Pendant que Jordan Bardella indique que le RN met Michel Barnier « sous surveillance », la gauche fait preuve à son égard d’un dogmatisme et d’un sectarisme sans nuance.


Même si ce n’est pas une cohabitation stricto sensu, cela doit y ressembler ! Je comprends bien le souci du Premier ministre de montrer qu’il est ouvert, à l’écoute, qu’il n’a pas l’intention de ne nommer que des ministres de droite et qu’il veut ménager le président de la République. Mais ce dernier a perdu, à la suite de ses échecs, beaucoup de son pouvoir même si sa légitimité reste entière et ce n’est pas cette ridicule procédure en destitution qui démontrera le contraire !

Droite délicate

S’il a fallu du temps à la droite républicaine pour empêcher Emmanuel Macron de mener le je et le jeu, je ne voudrais pas que, par délicatesse, et malgré l’impudence démocratique du RN qui prétend le placer « sous surveillance », le Premier ministre oubliât que le peuple attend beaucoup de lui. Les citoyens n’ont pas à rentrer dans les jeux d’appareils, les combinaisons parlementaires et les mille difficultés que Michel Barnier va devoir affronter.
Dans des domaines cruciaux qu’il a d’ailleurs lui-même mis en évidence – sécurité, justice, immigration, pouvoir d’achat notamment -, notre pays ne peut se permettre d’atermoyer. Rien ne serait pire que d’avoir la déprimante certitude que la chance inouïe donnée à la droite républicaine ne va servir à rien. Et que le courage politique demeurera aussi rare sous Michel Barnier qu’avec certains de ses prédécesseurs.

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Gauche prévisible

Ce n’est pas de la gauche ni de l’extrême gauche que le Premier ministre aura à espérer, sinon le moindre soutien, du moins une compréhension minimale compte tenu de l’état de la France. Olivier Faure et Marine Tondelier n’ont déçu que ceux qui s’illusionnaient sur eux et le député François Hollande, engoncé dans une discipline de parti, reste pour l’instant dans le moule[1]. Il ne tentera rien pour une rénovation de la pensée et de la pratique socialistes. Pour ceux qui s’imaginaient que l’opposition politique du Nouveau Front populaire pourrait s’imprégner d’une sorte de correction républicaine souhaitant bonne chance au nouveau Premier ministre, par sollicitude à l’égard du pays, quelle déception ! L’accueil qui lui a été réservé, d’un dogmatisme et d’un sectarisme sans nuance, a au contraire révélé le manque tragique de femmes ou d’hommes d’État dans le camp de cet extrémisme, pourtant moins fustigé que celui d’en face…
Michel Barnier mènera son action de redressement et de vérité en n’étant pas tétanisé, je l’espère, par ceux qui au RN ou dans le macronisme, n’ont pour seule envie que l’alternance d’un pouce levé ou baissé, ou la menace intermittente d’une épée de Damoclès. Si ces partis s’adonnent à cette comédie, ils seront responsables et coupables de non-assistance à pays en danger. Jouer sur les maux sera une honte.
Que le Premier ministre soit attentif au fait que, pour que tout change, il sera impérieux de tout changer !


[1] François Hollande a confirmé au micro de France inter qu’il voterait une éventuelle motion de censure contre le gouvernement de Michel Barnier avec cet argument : « Quand un gouvernement va être de droite, sur une politique de droite, soutenu par l’extrême droite, comment voulez-vous que des hommes et des femmes de gauche y participent ? » NDLR



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Magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.

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