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Le Reductio ad Hitlerum inciterait-il à la violence meurtrière?

Le leader populiste américain a fait l'objet d'une forte nazification depuis des années, devenue banale


Le Reductio ad Hitlerum inciterait-il à la violence meurtrière?
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Après la tentative d’assassinat de Donald Trump, la presse américaine, qui a diabolisé à outrance le 45e président des États-Unis, est priée de faire son examen de conscience.


Chaque époque donne au mal absolu un visage. Un visage facilement reconnaissable et symboliquement fort. Le diable a délaissé ses cornes, ses oreilles pointues et sa barbiche de bouc pour la petite moustache à la Chaplin et une large mèche bien gominée. Le brassard à la swastika, marque du démon de l’ère moderne, n’est jamais bien loin. Malgré leurs efforts répétés, la faucille et le marteau n’arrivent pas à la cheville de la croix gammée quand il s’agit de diabolisation. Le bruit des bottes sera toujours celui de la peste plus brune que rouge, tapie dans l’ombre des heures les plus sombres, prête à jaillir du ventre fécond si l’on n’y prend garde.

L’anathème est facile mais redoutablement efficace ; l’actualité récente chez nous peut en témoigner. D’ailleurs, il y a peu de dirigeants dans le monde qui n’ont vu leur faciès affublé de la petite moustache pangermanique. Donald Trump, Angela Merkel, Marine Le Pen, Emmanuel Macron, Giorgia Meloni, Justin Trudeau… Progressistes, populistes : tous en prennent pour leur grade. Tout le monde s’y est habitué et trouve le procédé éculé et assez banal, dorénavant. Sauf que cela n’a rien de banal d’assimiler une personnalité politique au mal incarné. Il n’y a rien de banal à exagérer le danger d’une élection. Hurler à qui veut l’entendre que quiconque rejoindra un certain camp politique sera à jamais marqué du sceau de l’infamie n’a absolument rien de banal. Pas d’amalgame, pas d’amalgame, s’époumonent certains. Alors qu’on n’en a jamais cultivé autant.

L’ultra-polarisation de la société, dans son goût macabre pour le sensationnel, encourage la violence ad hominem sans le moindre scrupule. La presse elle-même, en relayant la stigmatisation excessive du camp qu’elle méprise, se rend complice de cette incitation. Plusieurs couvertures de journaux et de magazines grand public, américains et européens, ont clairement comparé le quarante-cinquième président des États-Unis à Adolf Hitler. Et on le surnomme le Hitler Orange dans certaines émissions de talk-show.

Comment ne pas imaginer que le jeune auteur de l’attentat contre Donald Trump était persuadé d’être sur le point de réaliser un acte héroïque, un acte de résistance à la menace fasciste que représente, pour une grande partie de la gauche américaine, l’ancien président ? Convaincu par des organes de propagande que sa cause était juste, il était prêt à devenir un martyr en se sacrifiant. Comme la plupart des terroristes, toutes causes confondues. La presse américaine démocrate ne paiera probablement jamais le fait d’avoir inculqué ces idées délirantes à tous ces jeunes militants. Le Reductio ad Hitlerum auquel elle s’est adonnée à cœur joie depuis des années fait dorénavant partie du jeu politique, de ce côté de l’Atlantique comme de l’autre. Elle ne paiera probablement jamais la radicalisation de la jeunesse d’extrême gauche dont elle est pourtant en partie responsable par son incitation implicite à la violence. Elle a pourtant contribué à rendre cette violence hystérique en entretenant la haine du camp adverse. Aux États-Unis, la folie haineuse irrationnelle développée contre Donald Trump est même surnommée le Trump Derangement Syndrome (Syndrome d’aversion à Trump). Les mêmes qui nous alertent sans cesse sur des risques de guerre civile s’amusent à souffler sur les braises et jubilent de voir que cela fonctionne. Le sang devait bien commencer à couler un jour et n’allons pas croire naïvement que personne ne l’a souhaité.




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Metteur en scène et auteur dramatique.

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