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Au Niger, la situation politique et économique s’aggrave

En partenariat avec la revue « Conflits »


Au Niger, la situation politique et économique s’aggrave
Des jeunes se rassemblent pour s'inscrire comme volontaires pour défendre le pays dans le cadre d'une initiative de volontariat, à Niamey, Niger, le samedi 19 août 2023. © Photo AP/Sam Mednick / XSM101/23231460558573//2308191456

Expulsion d’Orano (ex-Areva) des mines d’uranium, entrisme de la Chine et de la Russie, crise économique et aggravation des relations avec le Bénin voisin, la situation politique et économique du Niger ne cesse de se dégrader.


Situé à l’ouest du massif de l’Aïr, dans le nord du Niger, le site d’Imouraren est considéré comme l’un des plus importants gisements d’uranium au monde, avec 200 000 tonnes de réserves. Orano avait obtenu son permis d’exploitation en 2009, mais le projet était resté en suspens depuis 2015 et des essais pilotes devaient débuter en 2024. Le nouveau gouvernement nigérien a utilisé cette lenteur pour appuyer sa décision.

Cet épisode s’inscrit dans le mouvement d’expulsion progressive de la France du Niger. Après son coup d’État le 26 juillet 2023, la junte militaire nigérienne a opéré un rapprochement net avec la Russie. En s’emparant du pouvoir, elle s’était engagée à rompre les liens avec l’Occident « dominateur et colonialiste » et donc à revoir les concessions minières. Le renversement de situation est problématique pour l’Europe qui renoue avec l’énergie nucléaire. Selon l’Agence internationale de l’énergie atomique, le Niger a fourni plus d’un quart de l’uranium de l’Union européenne en 2022, et représentait environ 20% de l’uranium importé en France. Une riche production sur laquelle d’autres puissances ambitionnent de mettre la main.

Progression de l’ « anti-France »

La prise du pouvoir par la junte militaire au Niger a été le sixième coup d’État réussi en Afrique de l’Ouest depuis 2020. Il fut dirigé par le général Abdourahamane Tiani contre le président Mohamed Bazoum.

Les campagnes de désinformation anti-France menées sur WhatsApp, Facebook et Telegram ont largement relayé de fausses allégations concernant l’implication de la France dans la déstabilisation du pays. Les groupes pro-russes en ont été des acteurs clés, comme le Groupe panafricain pour le commerce et l’investissement (GPCI), agence de communication dirigée par Harouna Douamba, connu pour sa proximité avec les sphères russes. Le 10 août, par exemple, l’une de ces pages, INFOS DU FASO, avait affirmé que la France préparait un « complot de déstabilisation » du Niger et armait des « terroristes » (TV5Monde).

La concrétisation politique ne s’est pas fait attendre. En septembre 2023, Emmanuel Macron annonçait le départ contraint du Niger des 1 500 soldats français déployés pour lutter contre les bandes armées terroristes. En janvier 2024, la junte ordonnait l’expulsion de l’ambassade de France à Niamey qui a été rapatriée à Paris.

Les États-Unis dans l’incertitude

Les États-Unis sont implantés au Niger pour surveiller l’Afrique de l’Ouest au nom de la lutte contre le djihadisme depuis 2012 et pour profiter des mines d’uranium.

Ils sont partenaires de la mine DASA, exploitée par la société canadienne Global Atomic Corporation dont les travaux ont débuté en juin 2022. Le projet est en partie financé par les agences de Credit-export du Canada et par la Banque de développement des États-Unis. Cette mine d’uranium est d’importance pour les États-Unis qui ont récemment acté leur retour vers l’atome. En mars dernier, la Chambre des représentants a adopté L’Atomic Energy Advancement Act pour accélérer le développement des réacteurs nucléaires de nouvelle génération sur le sol américain.

Mais, en janvier 2024, la junte nigérienne a révoqué l’accord de coopération militaire, obligeant la Maison-Blanche à rapatrier ses 1 000 soldats. L’incertitude plane désormais sur la mine DASA. Les nouveaux enjeux de l’uranium et le probable retour de Donald Trump aux commandes pourraient rendre les États-Unis offensifs sur la question nigérienne. Surtout, il est impensable qu’ils acceptent l’arrivée des Russes et des Iraniens dans les mines du pays.

Rapprochement avec la Russie

Après une décennie d’influence sur le continent africain pour y déstabiliser les Occidentaux, la Russie profite des coups d’État pour recomposer les alliances. En septembre 2023, le Niger a formé l’Alliance des États du Sahel avec le Mali et le Burkina Faso sous l’égide de Moscou, rompant avec le G5 Sahel, sous influence française.

Le 4 décembre 2023, le général Abdourahamane Tiani a accueilli le vice-ministre russe de la Défense, le colonel général Yunus-bek Yevkurov, pour discuter du renforcement de la coopération en matière de défense. Un protocole d’accord a été signé, mais les détails restent secrets. Des troupes russes, comprenant des formateurs militaires et des équipements, ont été déployées à Niamey en avril 2024, à la base aérienne 101.

Les mines d’uranium se libèrent, et les Russes se verraient bien en nouveaux exploitants.

La Chine s’étend au Niger

La Chine a fait son apparition dans les mines d’uranium au Niger en 2007 pour exploiter la mine d’Azelik. Surtout, elle a financé et exploite désormais le pipeline qui relie le Niger jusqu’au port de Sèmè au Bénin. L’enjeu économique est conséquent pour la région où 90 000 barils de pétrole doivent être exportés tous les jours. Mais, les tensions entre le Niger et le Bénin ralentissent la production. À la suite du coup d’État, la frontière entre les deux pays avait été fermée. En mai 2024, un accord provisoire a été trouvé pour permettre le passage des premières cargaisons de pétrole nigérien, mais les tensions persistent. Le 8 juin, cinq employés de la compagnie pétrolière chinoise Wapco Niger ont été arrêtés dans le port de Sèmè par les autorités béninoises, qui les accusaient d’être entrées illégalement sur le site.

Vers l’instabilité

Le Niger, malgré les sanctions économiques imposées par la CEDEAO après le coup d’État de juillet 2023, devrait enregistrer le taux de croissance le plus élevé d’Afrique en 2024, avec un PIB attendu en hausse de 11,2%, selon la Banque africaine de développement (BAD). Cette prévision est fondée sur…

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