Le philosophe s’est opposé à tous les courants intellectuels et littéraires de son temps. En défendant la raison et la pensée pure contre le règne montant de l’émotion, Benda s’est enferré dans la solitude. Pascal Engel rend hommage à cet intransigeant dans une biographie très complète.
« Son cœur absent ne reprochait rien à sa conscience abstraite, et il mourut odieux et maudit sans se sentir coupable » (Lamartine, à propos de Saint-Just, choisi comme épitaphe par Julien Benda).
Julien Benda (1867-1956) fut mal aimé, puis oublié. C’est injuste : il fut, sinon aimable (cadet de ses soucis), le « lieu géométrique » de nombre de débats de son temps, qui convergeaient vers lui, le concernaient, le requéraient. De tous, il se mêla – de l’affaire Dreyfus au stalinisme, où il s’égara un temps.
La raison gouverne tout…
Son kantisme, son obsession de « la raison » (sous-titre du livre de Pascal Engel : « Julien Benda ou la raison »), son rejet de l’idée de progrès et sa défense rationnelle de la République (et d’une Europe gouvernée par les idéaux républicains, aux antipodes du fédéralisme contemporain) : tout cela n’était pas rien. Mais dès alors inaudible.
Son antiromantisme (« trop vague »), sa défense du classicisme en littérature lui valurent l’intérêt des maurrassiens (que, juif, il n’aimait pas – ce fut par la suite réciproque), puis de Paulhan (avant leur rupture en 1944).
Il s’opposa successivement à Bergson (son « ennemi »
