My tailor is poor


My tailor is poor

vince taylor rock

Être vedette, c’est être n°1 ; être une star, c’est être unique.  (1939-1991) fut unique un an et demi, grâce à sa tenue de scène en cuir noir – prise à Gene Vincent, le créateur de Be-Bop A Lula – ses chansons empruntées à Elvis, Gene, Lewis, Cochran : son déhanchement, inspiré d’Elvis. Mais cet anglais se faisant passer pour américain, débarqua dans une France qui ne s’y attendait pas, où la majorité de la population restait provinciale, donc conservatrice.

Dire qu’il fit scandale – alors qu’Eddie Barclay le faisait passer partout y compris dans un jeu télévisé, pensant naïvement vendre beaucoup de disques chantés en anglais – est l’exacte vérité. Je m’en souviens. J’y étais. Je le vis trois samedis de suite, en matinée, à l’Olympia (Hiver 61-62) où il passait en vedette après l’entracte. La vedette américaine était Henri Tisot, mais le samedi il était remplacé par André Aubert, futur Don Patillo.

Dès les premières mesures de Trouble (If you’re lookin’ for trouble / Si tu cherches des ennuis) où il tenait une chaîne dans une main, la moitié de la salle foutait le camp. En vedette anglaise passait Rosalie Dubois (Parce qu’un air d’accordéon). Quatre ans plus tard, je chante dans un cabaret “rive gauche” où elle passe en vedette. Je le lui rappelle. Elle répond : “J’vais t’dire : sa version de Be-Bop A Lula est supérieure à celle de Gene”. Son jeu de scène ? Point n’est besoin de le décrire. Il suffit de visionner ses deux scopitones Shakin’ all over et Twenty flight rock sur Youtube. Johnny, penaud, va se rhabiller.

Le livre de Fabrice Gaignault[1. Vies et mort de Vince Taylor, Fayard] m’a déçu. Il s’inscrit dans une ligne de biographies débouchant sur une chute ressassée : Elvis trop gros ; Marylin trop névrosée, etc. Comme dit John Ford : “Dans l’Ouest, c’est la légende qu’on imprime”. Il y a suffisamment de vraie légende chez Vince. Il compose un classique du rock : Brand new cadillac (un groupe français prendra ce nom) et David Bowie crée un album et une chanson inspirés de Vince : Ziggy Stardust. Vince fut fabuleux l’espace d’un instant. Les ragots ne m’intéressent pas. Rien ne les prouve (Vince plongeur dans un restaurant, etc.). Le drame de Vince ne fut pas la drogue et l’alcool mais d’être limité, de ne pas pouvoir évoluer musicalement même s’il chanta Mack the knife et L’Homme à la moto -chanson d’origine américaine, en fait. La moindre des choses quand on écrit sur un chanteur, c’est de fournir une discographie, voire une filmographie (Le Temps de la fureur d’Henri Calef, court-métrage). Je conseille plutôt La Belle histoire des groupes de rock français [2. de Jean Chalvidant et Henvé Mouvet, Lanore, 2001] et, à paraître en septembre, Vince Taylor n’existe pas, roman graphique de Maxime Schmitt [3. L’Olivier]

Photo: D.R.



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est né et ne vit qu’à Paris. Il a développé une certaine idée de la contradiction et du paradoxe dans 33 livres à ce jour, notamment : Les Criminels du béton (1991) ; La crétinisation par la culture (1998) : Éloge du cul (2006) ; Manuel de résistance à l’art contemporain (2009). Dernier ouvrage paru : La France de Michel Audiard (Xenia, 2013).

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