La France est-elle devenue majoritairement « populiste » ? La stratégie islamo-gauchiste de LFI aura-t-elle définitivement dégouté à gauche les alliés d’hier ? Alors que sondeurs et éditorialistes rivalisent de talent ce matin pour analyser les nouveaux rapports de forces politiques, Elisabeth Lévy nous promet déjà trois semaines formidables de « République en danger » ! Décidément, Emmanuel Macron a bel et bien raté sa « révolution ».
Que penser du coup de théâtre d’Emmanuel Macron hier soir ? La décision de dissoudre l’Assemblée nationale est en tout cas conforme à l’esprit des institutions, institutions mises à mal par l’omniprésence du président de la République à deux jours du scrutin – on fait plus républicain. Face au désaveu, il est légitime de revenir au peuple, même si Emmanuel Macron fait un pari avec le siège des autres. Beaucoup estiment ce matin qu’il joue l’avenir du pays sur un coup de dé : « Après moi le déluge ». Nicolas Beytout le compare carrément à Néron, qui regardait bruler Rome…
Dissolution : le coup de poker d’un président très affaibli
Quoi qu’il en soit, Emmanuel Macron dressait hier l’acte de décès du macronisme. Il s’agit d’un échec magistral. Il promettait une révolution, titre de son livre, une nouvelle façon de faire de la politique. Patatras, le clivage droite/gauche qu’il pensait avoir dynamité est toujours là, sinon les électeurs de Raphaël Glucksmann auraient voté Macron, au moins pour l’Ukraine et les questions internationales. Le « en même temps » consistait à dire à chacun ce qu’il voulait entendre ; plus personne n’est dupe.
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Surtout, le président Macron devait être celui qui arrêterait ce qu’il appelle « l’extrême droite ». Il a joué et rejoué l’air de « moi ou le nazisme » pendant des années. Sauf que ce prêchi-prêcha tourne à vide. Aujourd’hui, le président Macron semble encore espérer que les Français vont l’écouter. Macron veut changer le peuple, comme le recommandait ironiquement Brecht ; il ne comprend pas que pour combattre le RN, il faut répondre aux attentes et aux inquiétudes de ses électeurs: moins d’Europe, moins d’immigration, moins d’islamisme et plus de France. Mais voilà que le pouvoir recommence la moraline en prétendant séparer les fréquentables des infréquentables. On disait ainsi hier soir qu’il n’y aurait pas de candidat « Renaissance » face aux sortants « républicains ». Est-ce toujours d’actualité ? Bref, on va avoir trois semaines de République en danger. Et si la seule révolution macroniste avait été d’amener aux marches du pouvoir le parti fondé par Jean-Marie Le Pen ?
Ça, on ne le saura que dans un mois, se rassurent certains…
Aux marches du pouvoir, les RN y sont déjà. Et l’espoir de créer une majorité antifasciste me semble totalement hors-sol, et traduit l’ignorance ou le mépris de l’humeur du pays. Certains murmurent que le président de la République espère une assemblée encore plus ingouvernable. Je ne peux croire qu’il joue cyniquement une crise de régime.
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En attendant, dans l’immédiat, un autre enjeu se dessine pour l’avenir du pays. C’est l’avenir de la gauche. Après l’expérience calamiteuse de la Nupes où l’on a vu le PS, le PCF et les écologistes compromis par la stratégie de bordélisation et de flirt avec l’islam radical des Insoumis, on pensait que c’était fini… Du moins, on l’espérait. Mais dès hier soir, Olivier Faure (PS), toute honte bue, courtisait Mathilde Panot (LFI) qui lui battait froid. Et on entendait une petite musique parmi les militants de « Place Publique » : il faut s’unir contre le fascisme. Tout est pardonné : la haine des flics, l’encouragement des émeutiers, le déni de l’antisémitisme… Certes, sans union, la gauche raisonnable perdrait moult plumes. Mais au moins elle sauverait son honneur.
J’ai tout de même une excellente nouvelle pour conclure. Nous allons profiter de trois semaines sans J.O. dans les journaux !
Cette chronique a d’abord été diffusée sur Sud Radio (99.9 FM Paris).
Retrouvez notre directrice de la rédaction dans la matinale de Patrick Roger.
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