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A mort les kouffars

L’islamisme est à la manœuvre...


A mort les kouffars
Hommage à Shemseddine, assassiné quelques jours plus tôt à proximité du collège des Sablons à Viry Châtillon (Essonne), 12 avril 2024. © ISA HARSIN/SIPA

Les lynchages de Samara et Shemseddine ont révélé que des musulmans français vivent – et parfois meurent – sous la coupe d’une police des mœurs islamiques. En abandonnant sa mission, l’École prive toute une jeunesse de notre culture et laisse prospérer la loi du clan et l’hyperviolence.


Maurice Ravel, Arthur Rimbaud… des figures parmi tant d’autres, innombrables, qui peuplent la culture française. On a beaucoup entendu leur nom ces dernières semaines, mais ce n’était pas pour parler littérature ou musique. Ils étaient tristement associés, dans des faits qui ne sont divers qu’en apparence, à ce qui nie radicalement la France et sa culture.

C’est au lycée Maurice-Ravel, à Paris, qu’un proviseur a été poussé à la démission par des menaces de mort sur les réseaux sociaux. Sa faute ? Avoir exigé d’une étudiante le retrait de son voile au sein de l’établissement, conformément à la loi (qu’elle n’ignorait pas et défiait sciemment). C’est devant le collège Arthur-Rimbaud de Montpellier qu’une élève de 13 ans, Samara, a subi une agression d’une violence extrême. Sa faute ? S’habiller « à l’européenne », ce qui n’était pas du goût des adolescents qui l’ont laissée pour morte.

L’islamisme, ça arrive près de chez vous

Dans ces deux cas, l’islamisme est à la manœuvre, crachant sa haine de la laïcité en feignant de la croire oppressive, et sa détestation de l’Occident en punissant ceux (et surtout celles) qui seraient tentés de lui ressembler. L’affaire de la jeune fille voilée n’est pas nouvelle : on a désormais l’habitude de cet entrisme islamiste, qui passe par la provocation, le retournement victimaire puis la menace. Cette stratégie est depuis longtemps théorisée et prônée par les Frères musulmans pour déstabiliser des sociétés qu’ils savent enclines à battre leur coulpe et à se reprocher un racisme en réalité largement fantasmé. Ce sont les islamistes, rappelons-le, qui ont imposé le concept d’« islamophobie » pour interdire toute critique en l’assimilant à un discours haineux.

Ce qui est inédit, et que révèle l’agression de Samara, c’est la mise en place sur le sol français d’une véritable police des mœurs, au sein de la communauté musulmane, pour contrôler les pratiques des uns et des autres : désormais les pressions, les menaces, le lynchage médiatique, voire physique s’exercent aussi entre coreligionnaires, certains s’érigeant en défenseurs de la morale et de la foi. Les juifs et les chrétiens ne sont plus les seules cibles : les « mauvais » musulmans viennent grossir les rangs des victimes potentielles du fanatisme, et peuvent devenir au même titre que les non-musulmans des « kouffars » à éliminer. Personne en France ne connaissait ce terme il y a trente ans, personne n’aurait pensé qu’un jour on puisse sur notre sol condamner à mort au motif d’une mécréance réelle ou supposée…

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Le jeune Shemseddine, 15 ans, s’est fait massacrer près de son collège de Viry-Châtillon parce qu’il échangeait des messages avec la sœur de ses futurs assassins ; ceux-ci ont cru bon de défendre la réputation de la famille en s’acharnant à coups de pied sur la tête du « coupable ». Tous les agresseurs obéissent ici à une logique clanique, à l’échelle de la famille ou du quartier, qui repose essentiellement sur la défense de l’honneur : le sens de l’honneur est en soi une vertu, mais où est l’honneur dans la mise au pas et jusqu’à la mise à mort de ceux, à peine émancipés, par qui le scandale arrive ?

Ce qui a frappé les esprits dans ces affaires d’extrême violence, c’est le très jeune âge des agresseurs. Et les médias de s’interroger sur ce qu’il est maintenant convenu de nommer « ensauvagement » ou « décivilisation ». Le constat d’une violence exponentielle ne peut plus faire débat. Mais on s’arrange encore pour éviter les explications qui fâchent : on relativise cette nouvelle barbarie en pointant l’hyperviolence de toute la société, ou bien en la ramenant à l’existence de toute éternité des affrontements entre jeunes gens (en gros, toute une sociologie idéologisée – pléonasme – nous dit « circulez, y a rien à voir ! »). Et bien sûr on nous fait le coup des réseaux sociaux, Emmanuel Macron en tête, dont la brillante analyse mettait déjà en avant TikTok et l’oisiveté des jeunes pour expliquer les émeutes dévastatrices de juin 2023. S’en tenir à leur seule responsabilité dans le processus actuel d’ensauvagement relève du déni, de la lâcheté intellectuelle ou de la manœuvre politicienne.

Agression de Samara à Montpellier : le personnel du collège Arthur-Rimbaud, en grève, affiche sa colère, 22 avril 2024. © D.R

Si les réseaux avaient existé il y a cinquante ans, aurions-nous été confrontés à un tel délitement ? Non, car le pays était culturellement beaucoup plus homogène et souscrivait globalement à une forme de common decency garante de la paix sociale. La plupart des violences que notre société connaît aujourd’hui sont liées à des conflits ethnoreligieux qu’une immigration massive, voire incontrôlée a importés sur notre sol. Les expéditions punitives qu’on a vues relèvent de codes et de pratiques qui ne sont pas les nôtres, mais ceux de musulmans fanatisés punissant par la mort ce qu’ils perçoivent comme une offense à leur religion ou leur clan. Ne pas le voir, ne pas le comprendre, ne pas le dire, par naïveté ou par idéologie, c’est s’empêcher d’endiguer le phénomène et se condamner à la répétition. En ce sens, la réaction du maire de Viry-Châtillon, après le meurtre de Shemseddine, est éloquente : ses larmes et son désarroi, qu’on peut juger sincères, disaient son incompréhension, il n’avait que son chagrin à opposer à la barbarie. On peut rappeler utilement que ce même édile, en 2022, déposa une plainte pour diffamation contre Éric Zemmour qui avait comparé sa ville, comme celles de Trappes ou Roubaix, à l’Afghanistan. Shemseddine est mort pour avoir échangé des messages avec une jeune fille. CQFD… On pourra toujours dire qu’en Afghanistan la jeune fille aussi aurait été mise à mort, et sans doute par ses propres frères.

Le hara-kiri de l’enseignement

Quid de l’école dans ce contexte ? Le jeune âge des protagonistes et le lieu des agressions nous y ramènent. « L’école est un sanctuaire », répète comme un mantra la ministre Nicole Belloubet, cherchant à se convaincre de la vertu performative de sa formule. On rirait si la situation n’était aussi tragique. Il y a bien longtemps que l’école n’est plus le sanctuaire qu’elle n’aurait jamais dû cesser d’être : plus personne ne considère le savoir comme sacré, à commencer par l’institution elle-même, qui lui préfère l’acquisition de vagues « compétences » ; par voie de conséquence, plus personne ne considère le professeur comme sacré, et un principe d’égalité devenu fou, en instaurant l’horizontalité des rapports avec l’élève, a entériné sa mise à mort symbolique ; d’ailleurs, comment respecter un individu, dans une société qui confond réussite et montant des revenus, quand on sait qu’il gagne à la fin du mois beaucoup moins d’argent qu’un chouf de 13 ans en bas de l’immeuble ?

L’école a tout fait pour ne plus être un sanctuaire, par l’effondrement de la transmission, par la relégation du professeur, mais aussi par l’injonction qui a été faite aux élèves, au nom du respect des différences, de venir comme ils sont. La classe devrait être le lieu provisoire de l’oubli de soi, où l’on cherche à s’élever plus haut que sa personne, où l’on s’arrache aux déterminismes de ses origines, qu’il faut apprendre à reconnaître pour ce qu’ils sont, pure contingence. On doit se déprendre pour apprendre. Cela suppose d’admettre une hiérarchie entre ignorance et savoir, entre ce que je crois être et ce que je m’apprête à devenir, entre le maître et moi, et cela demande une forme de patience et d’humilité dont sont incapables beaucoup d’adolescents shootés à la contemplation de leur nombril sur les réseaux et à la gratification immédiate de leurs likes. Puisque l’école McDo n’exige plus de discipline sur soi, elle devient le lieu de toutes les pulsions et de toutes les violences. Un sanctuaire, qu’y disaient…

On devrait pouvoir civiliser par l’école, y affiner un rapport sensible et réflexif au monde, à soi-même et aux autres. La littérature est essentielle dans ce processus, irremplaçable dans ce qu’elle donne à voir de l’être humain, de ses méandres intérieurs, de sa complexité, de sa fragile condition. Mettre en place des « cours d’empathie » pour lutter contre les violences est ridicule : l’empathie ne s’apprend pas en s’obligeant à embrasser son voisin, mais en découvrant par la littérature ce qu’est une vie humaine, dans laquelle on peut se projeter ou se reconnaître, et même reconnaître l’autre en soi.

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Ceux qui ont assassiné Shemseddine à proximité du collège Arthur-Rimbaud savent-ils ce que recouvre ce nom ? Savent-ils qu’il s’agit d’un poète ? Savent-ils, par une tragique ironie qui devrait les couvrir de honte, qu’ils ont le même âge que lui lorsqu’il écrivait ses premiers vers ? Quelqu’un leur a-t-il dit un jour que le jeune Rimbaud bouillait d’une révolte intérieure, mais qu’il l’a nourrie de ses lectures et qu’il l’a mise en mots ? Leur a-t-on appris par son exemple qu’on peut conjuguer l’irrévérence et la sensibilité, et que la colère n’empêche pas la retenue ?

Ils ne savent probablement rien de tout cela, et n’en veulent rien savoir, comme à peu près toute leur génération qui n’accorde aucun intérêt à la lecture et lui préfère massivement la facilité des écrans. Ce plébiscite est à la fois cause et conséquence de l’effondrement de la langue. Mais là encore l’école porte une responsabilité directe, en ayant renoncé à l’apprentissage systématique et rigoureux du français, seule condition de l’accès aux textes.

C’est un truisme d’établir un rapport entre une langue en déshérence et la montée de la barbarie : une langue maîtrisée structure un rapport au monde qui passe par la conversation, la civilité, la nuance, l’humour, quand l’impuissance verbale, qui vaut frustration, convoque la brutalité de la pulsion. Le barbare pour les Grecs était bien, littéralement, celui qui ne se fait pas comprendre. Si Rimbaud le rebelle versifiait à 15 ans, c’est que sa parfaite maîtrise de la langue, appuyée sur une solide connaissance du grec et du latin, lui donnait la possibilité d’exprimer son rejet des ordres établis sans devenir un voyou.

Le péché de l’assimiliation

Les barbares qui ont tué Shemseddine ne savent rien d’Arthur Rimbaud. Mais sans doute l’indifférence chez eux confine-t-elle au mépris parce que Rimbaud est français, qu’il représente un pan de cette culture dont ils rejettent toutes les manifestations. Notre culture est haïssable, ou si elle ne l’est pas, elle ne les concerne pas, il faut se tenir à distance de peur d’être contaminé. Les pressions exercées sur les membres de leur communauté trahissent bien cette peur de les voir se comporter comme des Français… L’assimilation est perçue comme une trahison, voire un péché, ce qu’Erdogan ne manque pas de rappeler régulièrement aux populations turques implantées en Europe.

Il serait temps que les responsables politiques prennent la mesure du problème : le refus de l’assimilation couplé à une volonté de conquête islamiste ne peut que très mal se terminer. Les gesticulations ne suffiront pas, personne ne croit après chaque atteinte à la laïcité, après chaque attaque au couteau, après chaque attentat, que le gouvernement sera « intraitable » et ne laissera rien passer, comme il se plaît à le répéter sur un ton pathétique et martial. On le croira lorsqu’il sanctionnera les élèves, lorsqu’il soutiendra les personnels menacés, sans travestir la peur des menaces de mort en « convenances personnelles », on le croira lorsqu’il s’interdira toute complaisance judiciaire pour acheter la paix sociale, on le croira lorsqu’il réduira drastiquement les flux migratoires en provenance de pays dont les codes sont aux antipodes des nôtres, et lorsqu’il imposera une assimilation culturelle, seule capable d’empêcher ou d’accroître une partition du pays déjà en marche. Tant que cela n’est pas fait, rien n’est fait.

Rimbaud, encore lui, écrivit un jour à Georges Izambard : « Que voulez-vous, je m’entête affreusement à adorer la liberté libre. » Le gouvernement devrait se souvenir que les Français aussi adorent la « liberté libre » et qu’ils détestent tout ce qui la menace.

Mai2024 – Causeur #123

Article extrait du Magazine Causeur




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Professeur agrégé de Lettres

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