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André Chaix, maquisard

Hervé Le Tellier publie « Le nom sur le mur » (Gallimard, 2024)


André Chaix, maquisard
Hervé Le Tellier, écrivain français © Francesca Mantovani

Rien ne liait le résistant André Chaix à l’auteur à succès Hervé Le Tellier. Jusqu’à ce que ce dernier fasse fortune grâce au best-seller L’Anomalie et déménage dans la Drôme.


Hervé Le Tellier avait créé la surprise en obtenant le prix Goncourt 2020 – année ô combien étrange – pour L’Anomalie (Gallimard). Les lecteurs en avaient fait un phénomène éditorial puisque les ventes s’envolèrent jusqu’à atteindre le chiffre d’un million et demi d’exemplaires, de quoi acheter une maison en province, le rêve du Parisien mal remis d’un confinement arbitraire de deux mois. Hervé Le Tellier a trouvé la sienne dans la Drôme provençale, entre Montjoux et Dieulefit. C’est en rénovant la vieille bâtisse de deux étages, un ancien relais de poste, qu’il découvre, derrière une plaque de céramique vernissée, un nom et un prénom gravés à la pointe en lettres majuscules : ANDRÉ CHAIX.

Enragés volontaires

L’écrivain, intrigué, va mener son enquête pour connaitre la vie de cet homme dont le destin vient de lui faire un signe. Hervé Le Tellier nous propose, non pas un roman, mais un récit circonstancié, émaillé de réflexions personnelles, sur une période sombre de notre histoire, qui n’en finit pas d’enflammer les débats contemporains, la France de Vichy (1940-1944). Chaix figure sur le monument aux morts du village ; c’est bien de s’arrêter pour lire les noms, le devoir de mémoire est essentiel, surtout quand on s’aperçoit que le garçon est mort à l’âge de vingt ans, deux mois, et trente jours.

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Le Tellier, membre de l’Oulipo et admirateur de Perec, délaisse les jeux lexicaux pour reconstituer le parcours du jeune homme foudroyé. On apprend très vite qu’il s’agit d’un maquisard, fils du boulanger de Montjoux, tué par les Allemands en août 1944. Il avait une fiancée, Simone Reynier. Durant ses recherches, il tombe sur une boîte en carton qui recèle des fragments de la vie d’André. Il y a, notamment, une photo où le jeune résistant est avec son frère. Il sourit au photographe. Le Tellier va tomber sur une autre photo où André est avec son cousin et son frère. C’est pendant une perm, parce que les maquisards avaient droit à des perms, apprend-on. André sourit encore. Il croit en l’avenir. Mais comme dans le livre de Malraux, L’Espoir, c’est la mort qui attend ces enragés volontaires.

Il y a de très belles pages, émouvantes et épiques, dans le récit d’Hervé Le Tellier, intitulé Le nom sur le mur. Il raconte le quotidien des résistants qui ont faim, froid et peur. Ils sont désorganisés, leurs armes sont dérisoires, mais leur courage est immense ; insensé, pourrait-on écrire. André a pris comme pseudonyme Olivier, « un prénom et un nom d’arbre qui ne pousse pas en Allemagne ». Il a intégré le maquis dirigé par « Yves Morvan » pseudonyme de Félix Germain, un sacré gaillard à la forte personnalité. Le contexte politique, particulièrement embrouillé, n’est pas exclu du récit, au contraire. Le Tellier n’hésite pas à décrire ces Français qui se gobergent à Paris pendant que les jeunes patriotes se font occire. Et puis arrive le jour funeste. Le face à face est inégal. Les blindés de la 11e Panzerdivision « accrochent » une colonne de maquisards du maquis « Morvan ». Chaix et cinq de ses compagnons sont tués. Le Tellier nous apprend que sur les réseaux sociaux des nostalgiques de l’Elfte continue de la glorifier. C’était un sale temps où il fallait se méfier de tout le monde. C’est un des placards de notre histoire qu’il convient d’ouvrir. Ça pue, certes, mais c’est salutaire.
À la fin du livre, Le Tellier confie : « Je ne sais pas qui a écrit ANDRÉ CHAIX sur le mur, et aucune des personnes que j’ai pu interroger non plus. » L’important était de savoir qui il est. C’est désormais chose faite.


Hervé le Tellier, Le nom sur le mur, Gallimard.

Le nom sur le mur

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Pascal Louvrier est écrivain. Dernier ouvrage paru: « Philippe Sollers entre les lignes. » Le Passeur Editeur.

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