Les Français se méfient tellement du secteur privé, des entreprises et des bénéfices qu’ils se targuent de n’admirer que ce qui est à but non lucratif. Pourtant, sans la passion du « lucre », une société ne crée pas de richesses et n’a pas de quoi financer les services publics ou les associations caritatives. Le billet de Sophie de Menthon.
Le jugement tombe comme un couperet. En France, toute activité à but lucratif est suspecte ; comme sont suspects les riches, les patrons qui ont réussi, les initiatives qui font gagner de l’argent, les cliniques, les cours privés, etc. N’a de valeur chez nous que ce qui est à but « non lucratif », c’est-à-dire qui ne rapporte rien, mais rassurez-vous, qui coûte néanmoins de l’argent.
Et qui finance toutes ces activités à but non lucratif ? Vous et moi, pardi ! Contrairement à ce que pense la majorité des Français, l’argent ne tombe pas du ciel lorsqu’il vient des caisses de l’État. Cet argent, il a fallu le gagner, le prélever (pire), le trouver, le récolter, le distribuer, savoir à qui et sous quelles conditions, etc. Et qui d’autre produit de la richesse en France sinon vous et moi, qui travaillons dans des secteurs lucratifs et sommes payés avec le reste de ce que laissent les prélèvements ? La Fonction Publique n’est pas une entreprise, et si elle offre des services (moins bons et plus chers) elle ne les finance en aucun cas. Ces services publics existent grâce à nos impôts et aux « usagers » – en d’autres termes des clients. Non, la Fonction Publique n’est pas gérée comme une entreprise et pourtant, il s’y trouve toute une partie managériale, administrative et fonctionnelle qui devrait l’être…
Ne pas aimer les riches ne part pas d’un bon sentiment, c’est préférer les pauvres et refuser que l’on gagne « bien » sa vie. Cette mentalité perdure depuis la Révolution française et fait beaucoup de mal car elle contribue à soupçonner l’entreprise et à nier sa participation entière et totale à la richesse nationale. Au contraire, nous en sommes venus à nous féliciter et à admirer tout ce qui est à but non-lucratif, c’est-à-dire public, sachant par ailleurs que ce qui est gratuit n’a pas de valeur, d’où cette hausse permanente des dépenses. Gratuité des médicaments – nous sommes les plus intoxiqués du monde à la fois par une prise en charge excessive et par les médicaments eux-mêmes objets de consommation. « Qu’est-ce que je vous mets ? » dit le médecin en rédigeant l’ordonnance.
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La faute est double : faire croire aux Français que l’État les prend en charge gratuitement alors que comme dans le cas du Canada Dry, ça ressemble à de la gratuité, ça a le goût de la gratuité, mais en fait « ça coûte un pognon de dingue ! » Et surtout, on n’incite pas ainsi les gens à travailler plus. On ne va pas davantage diminuer le chômage, qui lui-même est à but non lucratif ; on ne risque pas plus de s’enrichir, et enfin, on déresponsabilise allègrement tous les acteurs de la vie publique. Au nom du non lucratif, on élimine nombre d’entreprises d’appels d’offre lancés dans l’intérêt général au simple motif que ce sont des entreprises et qu’elles pourraient gagner de l’argent… Quant aux agriculteurs, ils en ont clairement assez d’être des acteurs économiques à but quasi non lucratif ! Heureusement là, les Français ont compris mais on trouve cependant le moyen de les ramener à l’étatisme en parlant de « prix plancher », lesquels ne verront pas le jour, car ce serait une entente constitutionnellement illégale sur les prix.
En revanche, on a beaucoup critiqué Emmanuel Macron qui n’avait pourtant pas tort lorsqu’il a lancé qu’il souhaitait que tous les jeunes « aient envie de devenir milliardaires ». La solution au redressement du pays ? Libéraliser ! Libéraliser, c’est responsabiliser ; c’est faire faire par le secteur privé avec un cahier des charges ce que l’État fait mal et plus cher ; c’est introduire une concurrence maitrisée ; c’est permettre aux entreprises innovantes d’accéder aux appels d’offres. C’est œuvrer à un libéralisme vertueux pour rétablir les comptes publics et développer nos PME.
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