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Reconfiguration du monde arabe : quelles clés pour surmonter les tensions ?

Maintneir l'infuence occidentale au Moyen Orient


Reconfiguration du monde arabe : quelles clés pour surmonter les tensions ?
Les 3 lieus de culte, la synagogue Moses Ben Maimon, la mosquée Imam al-Tayeb et l'église Saint Francis d'Assise, à la Maison de la famille abrahamique, Abu Dhabi, Emirats arabes unis, 21/2/2023 Kamran Jebreili/AP/SIPA

Afin de protéger leurs intérêts, l’Europe et la France se doivent de mieux comprendre les relations et tensions complexes existant entre les différents acteurs au Moyen Orient. Il s’agit surtout de pouvoir choisir les meilleurs partenaires arabes pour contrer à la fois le salafisme, le frérisme et l’axe russo-iranien. L’analyse de Gabriel Robin.


Depuis plusieurs décennies, le monde musulman est caractérisé par d’importantes tensions et une instabilité politique qui ont des conséquences graves sur les ensembles voisins, à commencer par l’Europe. Dans ce jeu d’échecs que se livrent des puissances et intérêts divergents, la France doit pouvoir compter sur des pôles moins hostiles alors que son influence au Sahel et dans le Moyen-Orient décline au fil des ans.

La guerre déclenchée par le Hamas le 7 octobre 2023 a notamment pu mettre en lumière l’insigne fragilité de la région du Levant, où de nombreux Etats sont en passe de faillir et peinent à envisager sereinement le futur (Liban, Syrie). Pourtant, cette région du monde qui fut la première à s’éveiller au Néolithique détermine toujours une grande part de notre prospérité collective, tant par les richesses en hydrocarbures qu’elle contient que par sa nature intrinsèque jamais contestée de « route de la soie ». La mer Rouge est ainsi toujours l’un des principaux canaux des échanges commerciaux maritimes, d’où les préoccupations légitimes entourant les velléités impérialistes de l’Iran qui agit par ses « proxys Houthis » au Yémen en déroutant les navires marchands qui opèrent la jonction entre la mer de Chine et la Méditerranée.

Car, au fond, la nouvelle phase du conflit opposant Israël à la Palestine est intervenue au pire moment, peut-être du reste à dessein puisqu’une partie des pays arabes étaient entrés dans une phase de normalisation avec l’Etat juif grâce aux Accords d’Abraham signés sous le patronage américain de Donald Trump. Ce dernier avait réussi à réunir cinq signataires menés par les Emirats arabes unis et le Bahreïn, rejoints ensuite par le Maroc et le Soudan. Le président égyptien al-Sissi et le gouvernement d’Oman avaient de leur côté salué ces avancées. L’enjeu était d’ailleurs que ces pays ayant normalisé leurs relations avec Israël soient finalement rejoints par l’Arabie saoudite, ce que la guerre a reporté à un futur incertain. Reste que la politique constante des Emirats arabes unis n’a pas été remise en question, s’agissant d’un partenariat stratégique de long terme.

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Il nous faut comprendre que les pays arabes stables sont aujourd’hui engagés sur deux fronts qu’ils doivent contenir afin de poursuivre sereinement leur développement : celui de l’axe iranien et celui de l’islam politique sunnite. Ces deux fronts se trouvent en filigrane de tous les conflits actuels dans la région et au-delà, qu’il s’agisse du Sahel, du Yémen ou du Soudan, qu’a encore illustré le sommet de la Ligue Arabe de 2022. L’Algérie y a affiché un positionnement antisioniste radical mais aussi une détermination à conserver son emprise sur le Sahel que les généraux jugent être une arrière-cour naturelle dans laquelle toute concurrence arabe est vue d’un très mauvais œil. Depuis, de nouvelles crises ont contribué à complexifier les relations et alliance internes. Le 17 janvier, Alger a par une formule lapidaire signifié son hostilité en exprimant ses « regrets concernant les agissements hostiles émanant d’un pays arabe frère ». Concluant la réunion du Haut conseil de sécurité présidé par le chef de l’Etat Abdelmajid Tebboune, le communiqué évitait soigneusement de citer le « pays arabe frère », mais ne cachait pas qu’il s’agissait des Emirats accusés de s’ingérer dans les affaires sahéliennes.

Nous évoluons dans un monde de guerre « hors limites » où chaque conflit est connecté aux autres. Ce qui se passe à Donetsk n’est pas neutre à Erevan, Gaza ou Bamako. Et dans cet environnement qui menace d’exploser à chaque instant, la France et l’Europe doivent avoir à cœur leurs intérêts en privilégiant des partenariats de nature à les protéger de nombreux dangers qui, s’additionnant, pourraient causer des dommages irréversibles. Il y a bien sûr la lutte contre le terrorisme islamiste et pour l’accès aux ressources naturelles, mais aussi contre l’axe russo-iranien hostile. Dans ce cadre, nous ne pouvons pas nous permettre d’entretenir des relations difficiles avec tout le monde. Il est ainsi de notre intérêt de privilégier les pays arabes qui veulent faire pièce au salafisme et à l’islam frèriste soutenu par la Turquie ou le Qatar. C’est notamment le cas des Emirats ou de Bahreïn.



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Gabriel Robin est journaliste rédacteur en chef des pages société de L'Incorrect et essayiste ("Le Non Du Peuple", éditions du Cerf 2019). Il a été collaborateur politique

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