L’attaque de Crépol est la version rurale de l’offensive anti-occidentale menée ailleurs en France, en Europe, comme en Israël. Certains y voient une guerre de civilisations. Mais les civilisations n’ont pas de numéro de téléphone, ni d’armée. Quel que soit le nom qu’on lui donne, comme l’avait prédit Gérard Collomb un face-à-face s’esquisse entre les deux peuples qui coexistent sur notre sol.
On dira que ça n’a rien à voir. Qu’il faut avoir un esprit tordu (également dit d’extrême droite) pour tirer un trait entre le 7 octobre et le bal tragique de Crépol le 18 novembre. Comment peut-on comparer le pogrom antijuif commis par le Hamas au sud d’Israël et le meurtre d’un adolescent, poignardé un soir de fête au village ? Les deux événements sont assurément sans commune mesure. Mais peut-être pas sans rapport. Peut-être que le drame de Crépol fait partie de la version locale d’un affrontement plus large qui se joue sur plusieurs fronts –Proche-Orient, Europe, Amérique – et sous plusieurs formes – terrorisme, séparatisme, guerre.
Quant à savoir si le syntagme « guerre de (ou des ?) civilisations » est ou non une grille de lecture pertinente du monde, chacun se fera une idée en puisant dans les vastes réflexions d’Éric Zemmour et de Michel Onfray, largement convergentes sur ce point. Ce dernier observe ironiquement qu’on accuse généralement les tenants du diagnostic d’encourager la maladie, comme si le mot guerre avait le pouvoir maléfique de créer la chose.
Quelles que soient ses vertus descriptives, le concept n’est guère opératoire, pour la bonne raison que les civilisations n’ont pas de numéro de téléphone. Elles n’ont pas d’armée ni de police, elles n’ont pas de lois écrites ni de frontières. Et pour finir, elles n’ont pas de chef suprême ni de Politburo. Aussi discréditées et empêchées soient-elles, les nations ont encore les premiers rôles dans l’histoire. Quand elles s’allient comme elles l’ont fait contre l’État islamique, les nobles combats pour les valeurs et les libertés se conjuguent toujours à des intérêts stratégiques plus ou moins compris – les Occidentaux étant passés maîtres ces dernières décennies dans l’art de se tirer des balles dans le pied. Si les Américains aident Israël, ce n’est pas par amour des juifs (heureusement, parce que l’ambiance sur les campus outre-Atlantique suggère qu’il n’est pas très tendance). Il se peut que des nations culturellement proches aient plus de facilité à coopérer. Elles en ont tout autant à se faire la guerre.
Anti-Juifs, anti-Blancs…
Nonobstant ces réjouissantes querelles conceptuelles, la France des bistrots ne s’empaille pas pour savoir si Huntington a gagné contre Fukuyama. Mais elle sait que trois points, ça fait
