Dans son dernier roman La danseuse paru chez Gallimard, Modiano résiste encore et toujours aux forces de la transparence
Il y a quelque chose de perpétuellement embué, comme si le reflet des miroirs masquait le contour des visages. Modiano refuse, par éthique littéraire, la netteté des traits, les biographies moulées dans le marbre, les dates que l’on rabâche par peur de les oublier, toutes ces minuscules pierres qui dessinent les relations humaines trop précisément, et les figent à défaut de les saisir vraiment. La transparence est le meilleur moyen de passer à côté de l’autre et d’oublier l’incandescence d’une rencontre. Dans le brouillon des papiers collés, dans les réminiscences vagues, dans tous les souvenirs confus de la mémoire, dans l’embarras des situations réellement vécues ou rêvées, c’est là que se niche une forme de vérité. Forcément parcellaire et équivoque. Les personnages commencent alors à vibrer, à se mouvoir, on s’approche de leur peau et de leurs manques,
