La nation française se divise et se morcelle sous nos yeux. Les professeurs qui sont en première ligne en sont les premières victimes. L’un d’eux sonne l’alarme.
L’attentat commis contre Dominique Bernard, professeur de lettres au collège-lycée Gambetta-Carnot d’Arras, nous a presque tous cruellement touchés.
Je dis « presque » tous, car la nation française est loin d’être unie dans la douleur. Le plus triste, c’est qu’il ne faudrait même pas en être surpris : la disparition de l’unité nationale est aussi, trop souvent, la cause première des attentats qui nous ébranlent.
Rancœurs silencieuses
M’accuserait-on de pessimisme ? Le réel plaide en ma faveur : plus de 350 incidents recensés lors de la minute de silence organisée dans les écoles en hommage au professeur. Mesure ô combien symbolique, rassembleuse, émouvante ! – qu’il est proprement insupportable de voir bafouée par les haïsseurs de la patrie. Et l’on ne compte plus les commentaires injurieux sur les réseaux sociaux contre une victime devenue héros dans son sacrifice, ni les rancœurs silencieuses que l’on préfère ignorer pudiquement, par effroi de la vérité.
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Ce n’est pas tout de s’indigner, il faudrait peut-être agir. Et pas seulement par « l’exclusion » de 68 élèves (!), comme l’a proposé le ministre de l’Éducation nationale, mais par des sanctions exemplaires. Ce traitement inconséquent des soutiens, même passifs, à des entreprises terroristes est indigne, et démontre bien à quel point le mot de « nation » est désormais descendu. On rappellera, à tout hasard, que le fait d’entretenir des intelligences avec une organisation étrangère « en vue de susciter des hostilités ou des actes d’agression contre la France » est puni de trente ans de détention et de 450 000 euros d’amende (art. 411-4 du code pénal). La suscitation d’une « intelligence », d’une « hostilité », d’une « agression » même, c’est pourtant bien, il me semble, à quoi ressemblent les « incidents » constatés dans les écoles : on parle pour certains lycéens de menaces de mort contre les enseignants ! – « T’es le prochain », disent-ils. Chahuter dans ces circonstances atroces une minute de silence, c’est grave. Hélas ! pour ce genre d’élève qui bouscule l’hommage à la victime d’un attentat fanatique, une exclusion, c’est certainement une bonne nouvelle. L’État est encore une fois défaillant.
Fracture culturelle
Donc, s’indignera-t-on chaque année inutilement ? En 2021, déjà, une centaine d’incidents avaient été dénombrés lors des hommages à Samuel Paty. Combien y en aura-t-il en 2024, en 2025, lors de nouveaux hommages à de nouveaux professeurs assassinés, à Reims, à Lille ou peut-être Toulouse ? De plus en plus, à n’en pas douter.
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Si l’exécutif voulait nous protéger efficacement, ce qui devrait être son premier vœu, puisque c’est son rôle premier, il prendrait des mesures nationalistes, par exemple une limitation drastique de l’immigration. L’importation du conflit israélo-palestinien sur notre territoire a révélé à quel point sont chez nous profondes, irréconciliables et nombreuses les fractures culturelles. Mais la nation, on aime mieux décidément la faire disparaître ; alors l’Intérieur, malgré tous ses beaux discours, préfère installer des portiques de sécurité aux entrées des écoles, quand c’est devant la France entière qu’il faudrait mettre des barrières, et poursuivre en justice tous ceux qui ne vont pas dans son sens. Quel est l’intérêt de saisir la justice contre Danièle Obono ? Le ministre la croit-il sincèrement délinquante ? Mais il devrait l’écouter, plutôt, et avec attention : car n’en déplaise, elle est la porte-parole d’une proportion de la population qui ne cesse d’augmenter, et qui deviendra majoritaire si rien n’est fait.
Gérald Darmanin peut bien taper des poings sur la table. En 2022 (chiffres du ministère de l’Intérieur), 320 330 premiers titres de séjour ont été délivrés, rien que ça. Et je ne reviendrai pas sur l’historique de l’assassin de Dominique Bernard, affligeant, comme toujours.
Prenez donc des mesures d’urgence, Monsieur le ministre ; faites des hommages, tenez des discours de fermeté. Et « en même temps » habituez-vous, comme nous tous, à entendre crier « Allah Akbar » sur la place de la République : ce sera votre bilan.
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