Accueil Édition Abonné Quand Louis Boyard accuse Yaël Braun-Pivet d’être un «agent de l’Élysée»

Quand Louis Boyard accuse Yaël Braun-Pivet d’être un «agent de l’Élysée»

Ma vie à l’Assemblée, la chronique d’Emmanuelle Ménard


Quand Louis Boyard accuse Yaël Braun-Pivet d’être un «agent de l’Élysée»
© Chang Martin / Sipa

Enfin, l’été est là ! Mais l’Hémicycle bouillonne toujours autant. Retour sur un mois de juin pas si tranquille !


Réalité pénitentiaire

Parmi l’arsenal mis à la disposition des députés pour contrôler le gouvernement, il existe les « questions orales sans débat ». Ce mardi matin, j’avais choisi d’interroger le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, au sujet de la prison de Béziers. En effet, notre centre pénitentiaire est confronté à un fléau bien réel : les projections. De quoi s’agit-il ? Chaque jour ou presque, une échelle est collée sur le mur d’enceinte de la prison. Dès qu’on en retire une, une autre réapparaît le lendemain. Des lanceurs de colis y grimpent et parviennent ainsi à escalader le mur qui entoure la prison. Ils lancent ensuite leurs colis à l’intérieur de l’enceinte. Et malheureusement, le temps que les surveillants arrivent, les détenus parviennent à récupérer les paquets en moins de dix minutes avec une sorte de canne à pêche et – il faut bien le reconnaître – une certaine habileté ! Malheureusement pour moi, le ministre n’est pas là. Il est retenu au Sénat. On m’a donc envoyé à sa place une ministre chargée de me lire la note que les services de la chancellerie lui ont préparée… Mais comme elle ne connaît pas le sujet, elle bute sur les mots et, par deux fois, me parle de mur « anti-protection » au lieu de mur « anti-projection ». Elle me ferait presque de la peine si je n’étais aussi agacée. Parce que, vous l’avez compris, je n’ai pas eu de réponse. Encore une matinée de perdue…

Niche LIOT – retraites suite et fin ?

Les niches parlementaires ressemblent à un bal de Cendrillon : à minuit, tout s’arrête et le carrosse redevient citrouille… Ce jour-là, nous étions tous prêts à passer la journée à ferrailler encore une fois sur la réforme des retraites. Mais finalement, le fameux article 40 dégainé par la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, a vite sifflé la fin de la partie. Et après les habituelles saillies – « la démocratie est en danger » et autre « dérive mafieuse de la Macronie » –, Cendrillon est rentrée chez elle toute penaude. La morale de l’histoire rappelle plutôt les Fables de La Fontaine : la grenouille LIOT qui voulait devenir plus grosse que le bœuf a fini par se dégonfler…

Harcèlement scolaire

Lors de la séance de questions d’actualité du 6 juin dernier, Élisabeth Borne explique qu’elle « va faire de la lutte contre le harcèlement la priorité absolue de la rentrée 2023 », et pour cela elle va « faire en sorte de pouvoir écarter d’une école un élève auteur de harcèlement ». Pour mémoire, le 1er décembre 2021, alors que nous discutions de ce même sujet, j’avais proposé un amendement prévoyant « la possibilité d’exclure l’élève harceleur de l’école afin d’accorder à l’élève harcelé un temps de répit. C’est [en effet] l’enfant harceleur qui devrait être mis hors d’état de poursuivre ses actes répréhensibles. » Réponse du rapporteur de l’époque : « C’est un très mauvais amendement ! » Il n’est jamais bon d’avoir raison avant l’heure…

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Jean-Baptiste Trogneux

À l’audience du tribunal qui devait juger les auteurs présumés de l’agression contre Jean-Baptiste Trogneux, Adrien F., l’un des suspects, se présente comme illettré et conteste avoir frappé le petit cousin de Brigitte Macron. Il explique par ailleurs avoir participé au rassemblement en tant que « journaliste indépendant » ! Comme quoi, on peut être journaliste et illettré… LOL

Retraites toujours

Le jour de la proposition de loi LIOT sur les retraites, le député LFI Louis Boyard crie à plusieurs reprises, alors que Yaël Braun-Pivet lui demande de se « taire » pour « écouter la Première ministre » : « Quand on aura le droit de voter, on se taira ! » Rappelé à l’ordre par la présidente de l’Assemblée, l’Insoumis poursuit : « Je n’ai pas de leçons à recevoir d’un agent de l’Élysée ! » Une insolence qui lui vaudra d’être privé d’un quart de son indemnité parlementaire. Pendant ce temps, la Nupes refuse de se lever et de saluer la présidente de l’Assemblée ou les ministres présents… On a les rebelles de pacotille qu’on peut…

Il est pas frais mon poisson ?

Alors que les députés débattent de l’aide médicale d’État (AME) dans l’Hémicycle, Mathilde Panot, présidente du groupe LFI, intervient. L’élu RN Jocelyn Dessigny l’a traitée de « poissonnière » !Ce n’est pas la première fois : en 2021 déjà, le député LREM Pierre Henriet avait, lui aussi, traité l’Insoumise de « poissonnière » : il avait alors été sanctionné par le bureau de l’Assemblée, perdant un quart de son indemnité parlementaire mensuelle. Mathilde Panot n’aime pas les poissonnières : elle qui prétend défendre les petites gens, elle trouve la comparaison injurieuse. Moi, si j’étais poissonnière, je serais vexée que l’on considère mon métier comme une insulte…

Femmes, je vous aime

Où l’on apprend le 14 juin, à l’occasion d’un texte sur l’égalité entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, que le cabinet du chef de l’État est composé de 11 hommes et… deux femmes. Pendant ce temps, les écosexuels courent tout nus dans les jardins de Lyon.

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Ma vraie vie à l’Assemblée

Pour illustrer une discussion sur les déserts médicaux en France, une députée MoDem – dont je tairai le nom – s’exclame : « Vous vous rendez compte, ça fait dix ans que je n’ai pas vu de gynécologue ! » Les députés sont-ils obligés de raconter toute leur vie dans l’Hémicycle ?

Nahel

Catastrophe ! Le jeune Nahel, décrit par ses proches (ou ses moins proches d’ailleurs) comme un saint ou un ange, décède tragiquement, alors qu’il refuse d’obtempérer aux ordres de la police. Au moment où j’écris ces lignes, trois nuits d’émeutes s’en sont suivies aux cris de « Justice pour Nahel ! ». Ce dernier a bon dos puisqu’il justifie apparemment le pillage de magasins (Nike de préférence…) et la dévastation de bâtiments publics – pas moins de 500 dans la nuit de jeudi à vendredi 30 juin ! À l’Assemblée, la présidente Yaël Braun-Pivet décide d’une énième minute de silence, précisant quand même qu’une « enquête est en cours et que la justice devra se prononcer ». Heureusement, je suis retenue dans une réunion en dehors de l’Hémicycle et je n’ai pas à y participer : je croyais – naïvement à coup sûr – que nous attendrions les résultats de l’enquête avant de rendre hommage à l’adolescent décédé. Entre le droit et l’émotion, la Macronie a perdu la tête !

Été 2023 – Causeur #114

Article extrait du Magazine Causeur




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Ancienne députée

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