La revue numérique propose en accès libre des travaux scientifiques, artistiques et politiques « articulant recherches sur le genre et recherches sur le langage ». Liliane Messika l’a parcourue avec joie
Heureux qui, Féministe, a fait un beau voyage,
Ou comme celle.lui-là qui conquit le langage,
Et puis l’a retourné, points médians et collages,
En rendant inaudible la langue et le message !
Pour voyager dans le wokisme, une boussole a été mise au point. Elle se nomme GLAD ![1], le point d’exclamation permettant qu’on ne prenne pas cette revue bisannuelle de l’association « Genre, sexualités, langage » pour une exclamation de joie anglophone. Pour son numéro à paraître fin 2024, sur le thème « Genre-Animalité-Langage », la revue lance un appel à contributions sous la forme d’un « argumentaire » qui liste la faune et la flore d’une jungle au sabir impénétrable[2]. Le.la contributeur.e est invité.e à investiguer l’imaginaire commun partagé par « la consommation carnée et le viol ». Comme dessert, il y a du « Black veganism ». Il s’agit d’une conjugaison (à l’impératif) de l’antispécisme, battu en neige et incorporé soigneusement aux luttes antiraciste et antisexiste, afin d’ouvrir « une voie prometteuse pour penser la dénonciation et le dépassement des… animalisations péjoratives et essentialisantes ».
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Malgré leur empathie pour nos amies les bêtes, les charabiatologues admettent que le lion dévore la gazelle, mais la loi de la nature n’a rien à y voir: pour eux, viande et viol sont dans le même bateau. Si le lion mange, ce n’est pas parce qu’il est outillé carnivore, mais parce que son nom est un masculin. Et si la gazelle finit dans son estomac, ce n’est pas parce que son anatomie d’herbivore ne lui laisse aucune chance, mais parce que son nom est un féminin.
Vers une langue zoo-inclusive ?
Révélation: « il existe un continuum entre le traitement des corps des femmes, mais aussi des esclavagisé.e.s, des handicapé.e.s, des racisé.e.s et ceux des sols, des animaux, des végétaux. Tous.tes sont naturalisé.e.s, terrains d’expérimentation ou de conquête ». Un lecteur distrait comprendrait que les handicapés ont droit à autant de respect que les animaux et les végétaux, mais ce galimatias n’a pas vocation à faire sens. Il ne s’agit que d’une incontinence verbale consécutive à l’ivresse inclusive d’individu (point E point S) qui confondent leur nombril et leur neurone (au singulier).
Pour preuve, une question métaphysique: dans les verbalisations humaines adressées aux animaux domestiques « quelle place occupe le genre de l’énonciateur.rice, qu’iel soit l’humain.e s’adressant à l’animal ou l’animal dont on imagine le discours ? »
Cette sodomie coléoptérique posera les jalons d’une langue zoo-inclusive à laquelle les jargonneurs aspirent, tout en reconnaissant sa complexité: il faudra écrire systématiquement « cheval.jument » ou « poule.coq » et conjuguer au masculin fourmi, girafe et coccinelle…
– Vous êtes folle, dit le Chat à Alice.
– Comment savez-vous que je suis folle ? demanda Alice.
– Vous devez l’être, répondit le Chat, ou vous n’auriez pas lu cet argumentaire jusqu’au bout.
[1] https://journals.openedition.org/glad/5305
[2] Argumentaire_Genre_animalité_langage.pdf
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