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Suicide assisté, le pire assuré

"Autant jeter les fils vivants dans les brasiers"


Suicide assisté, le pire assuré
Shanti De Corte, victime des attentats de Bruxelles, a été euthanasiée à 23 ans pour "souffrance psychique inaltérable" © Benoît De Freine

Le récent suicide assisté d’une jeune Belge de 23 ans en « état de souffrance psychique » représente plus qu’une dérive de la légalisation de l’euthanasie. C’est un meurtre légal qui permet à notre société d’assumer son incapacité à sauver une génération totalement déconstruite.


« Autant jeter les fils vivants dans les brasiers. » Pierre Legendre

Rendu public en octobre dernier, le « suicide assisté » en Belgique d’une jeune femme de 23 ans, suite à l’aval donné par la Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie (laquelle justifia après-coup du bien-fondé de sa décision en expliquant que « la jeune fille était dans un état de souffrance psychique telle que sa demande a été logiquement acceptée »), m’a fait penser à la mort du canari dans le puits de la mine. Une mort qui, pour signaler la modification invisible de l’environnement, prévenait les mineurs de l’explosion prochaine.

L’événement une fois connu suscita un certain émoi, de sévères critiques se firent entendre. Mais suite à un signalement (Le Monde, 7 septembre 2022), le parquet d’Anvers, estimant que la « procédure avait été suivie », classa l’affaire. Il s’était en effet trouvé deux psychiatres démiurges pour porter le diagnostic fatal de « maladie incurable » autorisant dans la loi belge le suicide assisté. Et cela arguant du fait qu’à la suite des traumas subis (un viol quelques années plus tôt, et sa présence lors de l’attentat terroriste de 2016 à Bruxelles), les hospitalisations et les traitements médicamenteux n’avaient pu délivrer cette jeune femme d’une « souffrance psychologique insupportable ». Sans autre considération d’une causalité psychique interne de sa souffrance subjective, plus profonde et antérieure à ces traumas. Notons que la jeune femme avait refusé la proposition d’une psychothérapie.

La décomposition de l’Interdit

Ce cas – à ma connaissance une première européenne pour une personne de cet âge et un tel motif – signe, je le crains, un pas supplémentaire dans la dérive folle de ce juridisme dé-civilisateur qui, légitimant le fantasme meurtrier sous-jacent aux demandes les plus insensées, déconstruit depuis plusieurs décennies la barrière de protection : les digues du droit civil soutenant l’architecture des filiations. Il n’est à tout prendre qu’une conséquence dernière de la décomposition de l’Interdit civilisateur – civilisateur des deux dimensions solidaires du désir qui spécifie l’animal parlant : celles de l’inceste et du meurtre. Un Interdit dont le droit civil, pour procéder de la Loi – la loi langagière de la différence des sexes et des générations –, a sous nos cieux vocation (anthropologique) à garantir la logique[1].

Longtemps témoin du recul des pratiques du soin et de l’assistance éducative et sociale


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Mai 2023 – Causeur #112

Article extrait du Magazine Causeur




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