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On veut l’électricité, pas des feux de poubelle

Rendez-nous aussi des cerveaux qui ne soient pas reptiliens!


On veut l’électricité, pas des feux de poubelle
Lyon, 14 avril 2023 © Laurent Cipriani/AP/SIPA

Un président souffleur de braises

La dernière allocution de notre Impuissant de la République qui vient de promulguer sa Réforme des retraites est, on en a pris l’habitude, aussi incantatoire que nébuleuse. Elle ne manquera pas, on s’en doute, d’attiser l’incendie qui couve sous toute poubelle en France. Notre thaumaturge sollicite 100 jours pour redresser, à coups de projets improbables pilotés par des comités Théodule, un pays qui vacille. 100 jours, puis, l’exil à Sainte-Hélène pour un président stendhalien, épigone de Julien Sorel, qui rejouerait son Waterloo personnel ? Voilà de quoi conforter dans leur volonté d’allumer le feu, blacks blocs et autres illuminés adeptes du désordre comme ultime finalité ou activistes au service d’une écologie sectaire.

C’est le Grand Soir? Non, Madame, juste le crépuscule!

Les manifestations réitérées contre la réforme des retraites, la joyeuse réunion de Sainte-Soline et, peut-être même le printemps, avaient déjà ragaillardi les blacks blocs et les faibles d’esprit de tout poil, séduits par le chaos. Après la dernière sortie présidentielle, on en est à peu près sûr, nos jeunes sots, produits d’une école en faillite et d’une autorité en crise, dûment remobilisés, sont regonflés à…bloc. Encapuchonnés et tout de noir vêtus, ces révolutionnaires d’opérette, aussi décérébrés que nuisibles, vont pouvoir perpétuer leurs ravages dans les centres de nos villes et continuer à attaquer nos policiers. Ces fantoches, confortés dans leurs exactions par certains politiques qui ont pour eux les yeux de Chimène, sont à la contestation citoyenne ce qu’est la grêle aux vignes.

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Jeunes sots infatués, ils s’imaginent préparer un nouveau Grand Soir. Las, ce n’est que la tombée du crépuscule qu’ils hâtent. L’histoire, on le savait, se répète, bégayant, de la tragédie à la farce. Mais voilà maintenant qu’elle éructe ; on a perdu jusqu’aux mots que l’école a cessé d’enseigner. Des vocables frustes et grossiers qui confinent à l’onomatopée, badigeonnés à la hâte sur les murs de nos villes par ces Huns modernes, attestent de cette inquiétante volatilisation du langage. La violence tend à se substituer à toute possibilité de verbalisation.

Image d’illustration Unsplash

Au XIXè siècle, déjà, une génération s’égare…

Au début du XIXe siècle, dans une situation de perte de repères semblable à la nôtre, le tout jeune Musset pouvait encore formuler l’absence de perspectives et l’inaction qui corrodent lentement la vie d’une jeunesse rendue veule par l’inertie. Ainsi, dans La Confession d’un enfant du siècle, après la succession des révolutions et la fin des Guerres napoléoniennes, Alfred écrivait, commentant son époque : «Trois éléments partageaient (…) la vie qui s’offrait alors aux jeunes gens : derrière eux un passé à jamais détruit, s’agitant encore sur ses ruines, avec tous les fossiles des siècles de l’absolutisme ; devant eux l’aurore d’un immense horizon, les premières clartés de l’avenir ; et entre ces deux mondes… quelque chose de semblable à l’Océan qui sépare le vieux continent de la jeune Amérique (…) Un sentiment de malaise inexprimable commença donc à fermenter dans tous les cœurs jeunes. Condamnés au repos par les souverains du monde, livrés aux cuistres de toutes espèces, à l’oisiveté et à l’ennui, les jeunes gens voyaient se retirer d’eux les vagues écumantes contre lesquelles ils avaient préparé leurs bras. Tous ces gladiateurs frottés d’huile se sentaient au fond de l’âme une misère insupportable. (…) »

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Des gars et des dégâts

Les mots qui tenaient la nuit en respect ont disparu au profit des comportements décadents et violents. J’ai pu le constater lors de la manifestation lyonnaise du 13 avril. Voyez plutôt: la préfecture, modifiant le parcours de la procession a permis à la médiocrité intellectuelle d’une partie de la jeunesse, biberonnée à la haine de l’effort comme à celle de la réussite et au mépris la culture de s’afficher sans complexe. Ce jour-là, on avait eu, en haut lieu, la géniale idée de faire passer le cortège par le vénérable boulevard des Belges, bordé d’hôtels particuliers qui jouxtent le Parc de la Tête d’Or. Bien sûr, les précédentes journées avaient été, elles aussi, chaotiques : destruction systématique des abris bus, des vitrines des banques, assurances et agences immobilières, sans oublier la pause- café chez Nespresso. Le tout sur fond de feu de poubelles et de provocation des forces de l’ordre. Maintenant, il s’agissait de faire trembler ces salauds de nantis, totale réussite : intrusions dans les propriétés, jets de projectiles sur les façades des bâtiments, slogans anti-riches et tags qui, tels des crachats, souillaient les murs.

Misère des slogans

Voici un florilège de cette expression rupestre d’un genre nouveau, assez inquiétante pour l’avenir de la jeunesse et par voie de conséquence pour les moins jeunes : « Macron pendaison », « Mangez les bourgeois », « Tout le monde déteste les bourgeois », « Vengeance pour Sainte-Soline : vengeance SS (sic) », « On est né pour la retraite », « On veut des cunis pas des képis » et bien sûr, les inévitables « ACAB », ou autre « Tout le monde déteste la police. » Le seul hôtel particulier épargné lors de cet après-midi festif, l’aurait été, selon ce qu’on m’a rapporté, parce que ses propriétaires qui montaient la garde sur le pas de la porte auraient précisé aux jeunes vandales soutenir la cause palestinienne !

Quand l’école préfère s’occuper du sexe des anges et du bien-être de ses usagers plutôt que de nourrir des esprits qui ne tournent plus qu’à vide, craignons que cette minorité facétieuse ne devienne rapidement majorité. La nuit est peut-être sur le point de tomber.

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est professeur de Lettres modernes

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