Notre chroniqueur, qui à notre grande stupéfaction ne paraît pas choqué par la nomination de Christine Angot au jury du Goncourt, profite de l’événement pour dresser un tableau quelque peu ironique de la production littéraire contemporaine.
Sur quel critère irréductible appréciez-vous — ou non — une œuvre littéraire ? Sur sa capacité à vous amuser, distraire, divertir — certes. Sur son ambition de créer une belle forme, peut-être. Mais essentiellement sur son décalage par rapport à ce que Roland Barthes appelait avec justesse « le degré zéro de l’écriture », ce plancher de l’expression, ce niveau abyssal à partir duquel tout écart fait style. Disons, pour simplifier, la langue des recettes de cuisine et des bulletins météo. Un texte parfaitement insipide — parce que le degré zéro littéraire correspond à ce péché mortel culinaire, le fade.
Vous avez reconnu là une description assez précise de 90% de la littérature contemporaine. Pensez que le Prix Nobel a été décerné à la championne hors catégorie du degré zéro, Annie Ernaux. Depuis que Serge Doubrovsky, en 1977, a inventé avec Fils ce qu’il a appelé l’autofiction, nos littérateurs s’en gavent jusqu’à l’écœurement — celui du lecteur, bien sûr.
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Christine Angot a enfourché très tôt ce mauvais cheval. Son premier roman publié, Vu du ciel, parlait de viol, mais sous une forme quelque peu allégorique. Interview, en 1995, revenait sur le sujet — si bien que Gallimard refusa cette fois de l’éditer, et que l’auteur (personne
