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École: exigence zéro, bienveillance infinie

Élisabeth Lévy et Jonathan Siksou présentent notre grand dossier du mois de mars


École: exigence zéro, bienveillance infinie
Rentrée des classes dans une école primaire bordelaise © Ugo Amez/SIPA

L’école est chaque jour un peu plus une machine à décerveler et à formater. Alors que les jeunes cerveaux sont pris en tenaille entre wokisme et islamisme, des parents, des professeurs et des élèves se rebiffent. Le combat contre le « Grand Endoctrinement » lancé par Eric Zemmour est loin d’être gagné. Mais savoir que certains ont décidé de le livrer est une excellente nouvelle.


La plupart des parents se soucient de ce que mangent leurs enfants. Alors qu’une innocente pizza est susceptible d’abriter une bactérie mortelle, on peut le comprendre même si l’obsession du bio et du « manger sain » prive nos bambins du plaisir coupable d’un bon McDo. En revanche, il est incompréhensible, voire criminel, que les mêmes parents se fichent des nourritures immatérielles, insipides ou hautement toxiques, enfournées à jet continu dans le cerveau de leur progéniture. On dirait que ce qu’un enfant a dans son assiette est bien plus essentiel que ce qu’il a dans la tête, comme si la nouvelle devise de l’époque était « un esprit vide dans un corps sain ». L’ennui, c’est que le contenu des jeunes cervelles affecte durablement l’existence quand celui des assiettes disparaît rapidement.

Pourtant, le succès des « Parents vigilants » révèle que nombre de parents sont très conscients des saccages idéologiques perpétrés à l’école et qu’ils n’entendent pas les subir sans réagir.

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C’est dans son discours de clôture des universités d’été de Reconquête, début septembre 2022, qu’Éric Zemmour a sonné la charge contre le « Grand Endoctrinement ». Sans doute la bande de Reconquête espérait-elle faire un bon coup politique en s’emparant d’un sujet qui concerne tout le monde. Le résultat, au-delà de ses attentes, a révélé un scandale qui devrait être l’obsession de tous, gouvernants et gouvernés. Ce qui se joue, ou plutôt ce qui se détruit dans l’indifférence générale, c’est la vie de chaque jeune, mais aussi notre avenir comme communauté politique. Que restera-t-il de la France, de sa culture, de sa littérature, quand toutes les générations vivantes seront passées par la machine à décerveler et à formater qu’est devenue l’École de la République ?

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En à peine six mois, « Parents vigilants » a constitué un réseau de plus de 40 000 personnes, et les témoignages affluent par milliers de tout le territoire, postés par des parents mais aussi des élèves et des enseignants qui ne sont pas tous des sympathisants ou des électeurs du Z. Ainsi, beaucoup de gens qui se croyaient isolés, et finissaient parfois par se demander si le problème ne venait pas de leur incapacité à apprécier toutes les beautés de la post-modernité inclusive et écologique, ont découvert qu’ils n’étaient pas seuls, donc peut-être moins désarmés qu’ils ne le pensaient. Premier fait d’armes, ce sont des « Parents vigilants » qui ont levé le lièvre de la professeure de philosophie du Nord qui projetait d’emmener ses élèves d’hypokhâgne visiter un camp de migrants à Calais en leur recommandant d’apporter des vêtements et de la nourriture. Sarah Knafo et Damien Rieu, qui s’emploient à structurer ce mouvement naissant, ne sont pas peu fiers de ce premier succès : « Nous avons réussi à faire annuler la visite », se réjouit la jeune femme, première conseillère (et compagne) de Zemmour. 

On trouvera dans les pages suivantes une sélection de ces témoignages souvent hilarants, autant que terrifiants. Comme le résume très bien un parent d’élève de première, « l’anglais est woke, le français féministe, l’économie marxiste, la géographie écologiste et l’histoire déconstructiviste ». Allez en paix.

Une partie concerne les tares déjà anciennes de notre système scolaire, l’effondrement du niveau et le gauchisme. On ne s’étendra pas sur le niveau : « le déclin continu de l’intelligence critique et du sens de la langue auquel ont conduit les réformes scolaires » a été fort bien analysé il y a déjà vingt-cinq ans par Jean-Claude Michéa dans L’Enseignement de l’ignorance (« Climats », Flammarion, 1999). Alain Finkielkraut, Jean-Claude Milner, Jean-Paul Brighelli et bien d’autres n’ont cessé de sonner l’alarme. En vain. Aujourd’hui, plus personne ne s’étonne que des grands gaillards, d’une habileté prodigieuse avec leurs écrans, soient incapables d’écrire une phrase, voire un mot, sans faire d’énormes fautes. Le fait qu’ils passent en classe supérieure – la loi permet désormais aux parents de s’opposer à un redoublement – jusqu’à obtenir un bac qui ne vaut plus rien ne suscite guère de protestation, comme si nous avions intégré que l’École, c’est l’exigence zéro.

L’autre dérive bien connue est le sinistrisme du corps enseignant et, largement, de l’institution. Certes, un professeur, comme tout citoyen, a le droit d’être de gauche. L’ennui, c’est que beaucoup considèrent leurs préférences politiques non pas comme des opinions, mais comme des vérités. « L’école est le cœur du pouvoir culturel des Insoumis, souligne Sarah Knafo. C’est pour cela que nos actions les mettent en rage. » Les cours d’histoire sont fréquemment des meetings anti-droite, anti-réac, anti-Zemmour, etc. Sans surprise, l’immigration est exclusivement présentée comme une chance pour notre pays, les élèves étant invités, pour leurs dissertations, à se mettre dans la peau d’un migrant ou à parler de leurs parents venus d’ailleurs (ceux qui ont la malchance d’appartenir au peuple old school n’ont qu’à se taire ou inventer). Au cas où certains auraient encore mal compris, des associations comme la Cimade ou SOS Méditerranée ont table ouverte dans les établissements.

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Logiquement, l’École accueille et promeut toutes les lubies du nouveau progressisme. Les jeunes cerveaux sont donc pris en tenaille entre islamisme et wokisme. Toutes les expressions de l’islam bénéficient d’une tolérance de principe, parfois au mépris de la loi de 2004. Et le meilleur accueil est réservé à la propagande LGBT, surtout T d’ailleurs. Dès leur plus jeune âge, les enfants sont incités à s’imaginer d’un autre sexe que celui de leur naissance. En résumé, la jeunesse de France doit apprendre que le mâle blanc hétérosexuel et catholique est un résidu de l’Histoire, prié de se déconstruire ou à disparaître.

Le plus désolant, c’est que l’enseignement privé sous contrat n’est pas en reste. L’école catho d’aujourd’hui, plus pape François que Charlotte d’Ornellas, ne cherche plus à contrôler les esprits à coups d’Évangiles ou de versets bibliques, comme feignent de le croire les prétendus libres-penseurs. Comme la laïque, elle s’adonne au relativisme de la bienveillance – tout se vaut, tout est respectable. Ce qui conduit beaucoup de familles à se ruer sur le hors-contrat.

En phase de structuration, les Parents vigilants pourraient présenter des candidats aux élections des représentants de parents d’élèves et concurrencer le quasi-monopole de la funeste FCPE. D’ailleurs, il paraît que leur activisme commence à inquiéter sérieusement Rue de Grenelle. Le combat est loin d’être gagné, mais certains ont décidé de le livrer. C’est la meilleure nouvelle de ce début d’année.

Mars 2023 – Causeur #110

Article extrait du Magazine Causeur




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Elisabeth Lévy est directrice de la rédaction, Jonathan Siksou rédacteur en chef des pages culture

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