Notre collaboratrice, persuadée que consacrer son temps libre au iaido et non à l’usage de la télécommande dans le starting block du canapé, est socialement déterminant, s’est amusée à lire La Tyrannie du divertissement, le dernier essai d’Olivier Babeau. Il l’a apparemment convaincue. Dis-moi ce que tu glandes, je te dirai qui tu es, y apprend-on… Et à la vieille interrogation sur le sens du travail doit se substituer une autre, non moins redoutable, sur le sens du loisir, prévient l’économiste.
Le jeune Olivier Babeau s’était entendu dire par son universitaire de père : « Prends un livre et lis ». Et aujourd’hui ses deux fils sont avides de vidéos footballistiques. C’est parce qu’il balance entre deux âges qu’il livre sa réflexion sur cette voie du temps libre, car « il est urgent de mieux transmettre à tous l’art de résister à soi ».
Entre une génération qui a créé le cordon USB sur le modèle du cordon ombilical et une autre qui croit fermement que ce dernier est la base du premier, le rapport à l’écran, à la lumière qui fut bleue, les nouvelles technologies proposent un nouveau pacte faustien, comme celui que Yuval Harari avait expliqué, concernant l’agriculture, dans Sapiens.

Le stade néolithique a permis la tripartition du temps : temps pour les autres, temps pour soi et temps pour rien. Les loisirs qui s’indexent sur ces temps sont socialement déterminants : « Les loisirs creusent aujourd’hui les inégalités de façon plus dramatique qu’autrefois. » Autrefois, c’était par la skholè et l’otium qu’on reconnaissait un bon citoyen, maintenant, c’est à son degré de consommation, comme le disent certains qui y décèlent l’origine ontologique du « crétin ». Évident pense-t-on : encore faut-il en avoir compris les principes.
Centres d’intérêt
Il y a trois loisirs : l’aristocratique (concentré sur le rapport aux autres, il est obsédé par l’appartenance au groupe), le studieux (reposant sur la mise à distance du plaisir. Il exerce le corps ou l’esprit pour
