La mort aurait dû se retenir…
Il y a des êtres tellement vivants que les faire mourir est un crime contre la condition humaine. J’ai souvent croisé Philippe Tesson, j’ai échangé avec lui, je l’ai écouté, je l’ai lu, j’ai été le témoin admiratif de ses multiples activités où son esprit libre et inventif s’en donnait à cœur joie, sans jamais laisser sa gaîté être envahie, devant les autres, par la lucidité et le pessimisme de son intelligence. Pour moi, Philippe Tesson était le son miraculeux, toujours déconnecté de l’aigreur et de la vulgarité, pétillant, spirituel, cultivé sans lourdeur, aimable sans mièvrerie, léger sans superficialité, d’une personnalité hors du commun.
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Il était aussi la lumière éclatante, mozartienne dans son humeur toujours victorieuse des ombres de l’existence, toute d’infinie tolérance pour ses frères humains, emplie d’une insatiable curiosité à l’égard des mystères et des trésors de la vie. Il était la lumière qui, dès la première minute d’une rencontre, éclairait et donnait le moral. Son allégresse n’était jamais ridicule et sa mélancolie avait toujours l’élégance de se cacher. Je ne pouvais m’empêcher de comparer Philippe Tesson à l’un de ces abbés du XVIIIe siècle chez qui on pouvait venir puiser l’universel parce qu’ils avaient réponse à tout, et de quelle manière ! Philippe Tesson était un maître singulier : toutes les fibres de son être, de son esprit et de sa sensibilité nous apprenaient « le dur métier de vivre » et il demeurait fraternel dans ses enseignements.
Le faire mourir est un scandale de plus dans l’absurdité du monde.
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