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Homme cis au volant…

Accident au tournant?


Homme cis au volant…
D.R.

Alors qu’on leur reproche déjà de squatter le barbecue, voilà que les hommes – ces fous de vitesse – sont accusés par la Sécurité routière d’ensanglanter nos routes plus que leurs compagnes, dans un nouveau spot télévisé.


La nouvelle est tombée. Un article alarmant relaie les statistiques de la Sécurité routière et nous apprend que les conducteurs masculins sont responsables de 84% des accidents de voiture. On y découvre aussi que 93% des accidents dus à l’alcool sont le fait des hommes. Ça sera donc le thème d’une nouvelle campagne de prévention à destination prioritaire de la gent masculine. Il faut quand même se demander si ces statistiques ne sont pas faussées par la surreprésentation des hommes parmi les chauffeurs de taxi, les routiers, les livreurs, les représentants en commerce de la société Ricard – autant de professions qui impliquent de faire beaucoup de route, et dans le dernier cas, parfois avec un coup dans le nez.

Bien sûr, il y a toujours un risque, à manier de telles données, que des petits malins détournent le message initial. Dans ça c’est Palace, Jean Carmet, en smoking-papillon, faisait quand même remarquer que si « 40% des accidents sont provoqués par l’alcool, ça veut dire que les 60% sont des buveurs d’eau ».

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Masculinité toxique

En fait, on n’est pas complétement surpris d’apprendre que les conduites à risques sont plutôt masculines. Longtemps, les assureurs ont d’ailleurs appliqué des tarifs plus avantageux aux femmes, censées être moins dangereuses. En son temps, Renaud chantait: « Femme je t’aime parce que/ Une bagnole entre les pognes/ Tu n’deviens pas aussi con qu’eux/ Ces pauvres tarés qui se cognent/ Pour un phare un peu amoché/ Ou pour un doigt tendu bien haut/ Y’en a qui vont jusqu’à flinguer/ Pour sauver leur auto-radio ». En exhumant les archives de l’ORTF, on retrouve un documentaire – fort douteux – de 1959 qui illustre les périls de la conduite féminine, plutôt brusque et rapide, mais marquée aussi par de soudains ralentissements le long des vitrines…

Un type d’humour qui a encore la vie longue. En mars dernier, quand Sandrine Rousseau annonçait sur les réseaux sociaux qu’elle allait monter au créneau contre les attaques misogynes, un plaisantin rétorquait : « pour ça faudrait déjà en réussir un ».

L’avis de la Science, avec Alain Mergier

En fait, la bagnole appartiendrait à toute une mythologie masculine. « Très tôt, dès l’enfance, la petite voiture commence à être un objet intime, un objet de transmission entre le père et son fils », nous indique Alain Mergier, l’un des deux sociologues auteur de cette étude pour la Sécurité routière. Albert Camus a perdu son père avant d’atteindre sa première année, ce qui ne l’a pas empêché de mourir ensuite dans un accident de voiture. Plus globalement, la voiture serait l’un des fétiches virilistes au même titre que… le barbecue ! Il ne manque plus que la clope et on a le portrait du néo-beauf dépeint par Benjamin Griveaux au tout début de la crise des gilets jaunes.

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Il y aura donc toute une rééducation à mener contre un gros siècle de culte de la vitesse et de la bagnole. Dans le manifeste du futurisme, Marinetti, en 1909, s’enflammait tel un fan de la saga « Fast and furious » : « Nous déclarons que la splendeur du monde s’est enrichie d’une beauté nouvelle : la beauté de la vitesse. Une automobile de course avec son coffre orné de gros tuyaux tels des serpents à l’haleine explosive… Une automobile rugissante, qui a l’air de courir sur de la mitraille, est plus belle que la Victoire de Samothrace ». Une tradition perpétuée dans un autre style par Hara-Kiri et les bons conseils de Bison Bourré:




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Professeur démissionnaire de l'Education nationale

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