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La France a besoin de ses entreprises


La France a besoin de ses entreprises
David Lisnard, Sophie de Menthon, lors de la conférence de presse au sujet de la Fête de l'entreprise, le 11 octobre 2022. Image (c) ETHIC

Honnies par l’extrême-gauche, trop souvent représentées dans les médias de manière caricaturale et négative, nos entreprises françaises sont essentielles pour la production des richesses. Il y a 20 ans, ETHIC, l’organisation patronale présidée par notre chroniqueuse, Sophie de Menthon, lançait la Fête de l’entreprise pour changer cette image. Un entretien croisé avec le parrain de la 20e édition, David Lisnard, maire de Cannes.


Sophie de Menthon : Jeudi 20 octobre, nous fêterons le 20ème anniversaire de la « Fête des Entreprises » en célébrant l’évènement « J’aime ma Boîte ». Le thème, cette année, est « La richesse d’une entreprise, ce sont ses salariés ». Je suis vraiment enchantée, David Lisnard, que vous en soyez le parrain. Ce n’est pas anodin car à travers ce parrainage ce sont tous les maires de France qui sont mobilisés pour fêter les entreprises de leur ville. Je sais que nous partageons les mêmes convictions en termes de management (qu’il s’agisse de l’État ou des entreprises), de valeurs, de détermination à faire… et peut-être – manquons de modestie ! – de courage. Pourquoi avez-vous tout de suite accroché au concept de « J’aime ma boîte » ? Je sais qu’à Cannes vous l’avez déjà largement célébré les années précédentes…

David Lisnard : Quand vous avez lancé « J’aime ma boîte » en 2003, j’y ai immédiatement adhéré pour plusieurs raisons. D’abord, c’est un moment de mise à l’honneur et de célébration de l’esprit d’entreprise, c’est-à-dire de la capacité de passer des idées aux actes, ce qui suppose créativité, innovation et prise de risques, ainsi que la capacité de programmer et de gérer des projets en vue de la réalisation d’objectifs. L’esprit d’initiative et d’entreprise est une qualité que je tiens en estime, car elle permet d’avancer et de s’inscrire dans une démarche dynamique. Vous parliez de courage, je pense qu’entreprendre, c’est courageux. Les entrepreneurs sont ceux qui prennent des risques, qui investissent en prenant un pari, celui d’innover, de créer – un concept, une structure, des emplois – et peut-être de réussir.

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Cette Fête des Entreprises rappelle et célèbre le rôle des entrepreneurs dans la société et il s’agit, à travers cet événement, de réaffirmer que la France est une terre d’entrepreneurs. Pour mémoire, la France compte 4 millions d’entreprises (données INSEE 2019 pour le Tableau de bord de l’économique française 2021), soit 6 entreprises pour 100 habitants en moyenne. L’entreprise, c’est ainsi une unité de production, mais aussi et surtout une unité humaine, une unité de vie, avec un ou des patrons, des salariés, des règles de vie en collectivité, un budget et des objectifs. C’est presque comme une famille finalement. Il n’est plus besoin de rappeler la relation intrinsèque entre bonheur au travail et productivité. Les études démontrent que des employés plus heureux sont plus performants. Ce temps de partage pendant « J’aime ma boîte » permet de rappeler aux employés à quel point ils sont importants et à quel point leur entreprise, qu’ils aiment, a besoin d’eux, autour de valeurs communes. D’où le slogan de cette année : « Que ferait-elle sans moi ? ».

Sophie de Menthon : J’ai la certitude que si nous vivons un nouveau rapport au travail, voire au non-travail, si les salariés qui le peuvent veulent travailler de chez eux, si on se met à son compte pour gérer son temps, etc., nous restons complètement attachés à la structure de l’entreprise. On a bien vu que, si le télétravail en enthousiasme certains, il a aussi provoqué de vrais dégâts psychologiques pendant le confinement.

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David Lisnard : La crise covid a en effet été un accélérateur de changement et a mis en exergue une certaine modification du rapport au travail, une hybridation du travail avec le développement du télétravail (9 millions de salariés le pratiquent aujourd’hui), du flex office, c’est-à-dire le fait de ne pas avoir de poste de travail attitré, mais aussi de nombreux départs de personnes qui ont voulu se mettre à leur compte. Toutefois, cette tendance n’a pas été le raz-de-marée que d’aucuns prédisaient. Et à titre personnel, je m’en réjouis car je crois en la pertinence de se retrouver physiquement sur le site entrepreneurial. Dans la plupart des structures, le télétravail a été mis en place partiellement, 1 ou 2 jours par semaine, et de nombreux salariés, je l’ai constaté en Mairie, ont ressenti un besoin de revenir physiquement au travail, de revoir leurs collègues et supérieurs, de participer à un collectif.

Sophie de Menthon : La remise en question des modes de travail est également un défi pour les encadrants, qui ont dû revoir leurs méthodes d’encadrement et de management, pour mettre en place des process adaptés et puis là, nous parlons de 25% des salariés, et que faisons-nous des 75% qui ne peuvent pas ne pas être à leur poste ?

David Lisnard : Oui, l’entreprise reste une aventure physiquement collective où patrons et salariés doivent collaborer, être ensemble : créer ensemble, rire ensemble… Je pense que la tendance ressentie le plus lourdement est la difficulté à fidéliser les employés. De nombreux salariés ont quitté leur entreprise pour créer leur autoentreprise, afin d’échapper à la structure entrepreneuriale classique ou réaliser leur rêve d’entreprendre.

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Sophie de Menthon : Ai-je tort de penser que finalement chaque mairie est un peu une entreprise ? Il me semble qu’un maire a finalement toutes les obligations et les contraintes d’un chef d’entreprise, même si l’intérêt général est bien différent de l’objet social d’une entreprise. N’avez-vous pas envie d’insuffler un esprit d’entreprise encore plus marqué à tous les maires de France ? Il faut de l’agilité, supprimer les technostructures inutiles, laisser liberté et responsabilité au maximum « d’encadrants ».

David Lisnard : Oui, la seule façon d’être efficace, et je crois heureux, est d’être responsable, donc libre de décider. Un maire est un praticien du quotidien. Dans un sens, et pour ma part je le revendique, les maires gèrent leur mairie comme une entreprise : ils gèrent un budget, une trésorerie, du personnel en vue de produire de la valeur (service ou bien public), et contrairement à l’Etat mais comme pour une entreprise, le budget des collectivités doit être voté en équilibre réel, et il n’est pas possible d’emprunter pour leur fonctionnement.

Sophie de Menthon : Comme des entrepreneurs, les maires doivent faire face au quotidien à de nombreuses contraintes administratives, parfois contradictoires, et à une obligation de réactivité et d’efficacité vis-à-vis de leurs « clients » que sont les usagers.

David Lisnard : La différence, c’est qu’une collectivité territoriale ne distribue pas du dividende, comme une entreprise économique, mais de l’intérêt général. Par ailleurs, comme vous le soulignez, pour les collectivités comme pour les entreprises, il faut aujourd’hui débureaucratiser notre société et simplifier les rouages administratifs pour libérer les initiatives et laisser les collectivités produire du service public et les entreprises produire des richesses. Pour rappel, la France est classée au 121ème rang sur 144 pays en termes de fardeau administratif par le Forum Economique Mondial (Rapport 2014-2015). Pour reprendre une citation de René Hans, fondateur de IDEE-PME, les contraintes en France sont telles qu’elles transforment le rêve d’entreprendre en cauchemar ! Il faut réintroduire de la liberté d’entreprendre et d’agir, et de la subsidiarité, qui permettent de responsabiliser les décideurs de décider au plus près des besoins !

Sophie de Menthon : Selon Jean Bodin, « Il n’est de richesse que d’homme ». Tel est la devise du mouvement ETHIC (Entreprises de Taille Humaine Indépendantes et de Croissance).



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Chef d'entreprise, présidente du mouvement ETHIC.

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