De tous les facteurs d’enlaidissement de l’espace sensible, la profusion signalétique est un des plus agissants. Faut-il y voir encore une manifestation du terrible « remplacisme global », le remplacement de tout par son signe, son nom, son double, sa contre-façon?
Tant qu’il s’agit de la laideur, on me laisse le choix du sujet. Je n’en ai que l’embarras. Ce pourrait être la laideur de la langue, bien sûr, mais je me suis déjà beaucoup exprimé là-dessus ; la laideur du vêtement, qui fait que les sites, les villes et les monuments les plus beaux de la Terre sont tout de même affreux puisqu’il s’y presse des foules venues comme elles étaient, l’idée de s’habiller en fonction des circonstances, des heures et des lieux, ayant tout à fait disparu ; la laideur des manuels scolaires, et de la plupart des livres pour enfants, et d’ailleurs de tout ce qui est pour les enfants, à commencer par les jouets, comme si les éditeurs et les industriels se sentaient un devoir moral de préparer les futurs pensionnaires du Bidon-Monde à l’horreur qui les attend ; la laideur des éoliennes, mais j’en ai déjà parlé ici même ; la laideur de la Grande Pelade, cette manie de l’arrachement des enduits, sans doute un des éléments qui, avec les éoliennes et l’artificialisation, a le plus dévasté le paysage depuis un demi-siècle, tout en rendant inintelligibles l’architecture et la syntaxe des façades. Mais je choisis pour cette fois le signe. Il a pourtant un joli
