De A comme antenne-relais à Z comme zone industrielle, il est possible de faire entrer dans un abécédaire toutes ces verrues qui défigurent notre quotidien. La mocheté est partout, de la ville à la campagne.
Parcourir les routes de France, comme quelques millions d’entre nous l’ont fait cet été, c’est désormais s’exposer à la laideur ordinaire. Celle des périphéries des villes, des autoroutes et de leurs équipements, des cités commerciales et artisanales géantes qui ennoient les agglomérations de toutes tailles, et puis celle de cette triste et banale architecture qui n’en est pas une, qui pose sur les sols de nos régions ces vilains petits pavillons préfabriqués, identiques du nord au sud, avec leur plan carré, leur fausse tour carrée et leurs tristes huisseries chinoises ou turques, on ne sait plus. Tant de maires se sont distingués en donnant des permis de construire débilitants que l’on pourrait dire, à l’instar de Voltaire des ecclésiastiques, qu’il faut « pendre le dernier urbaniste avec les tripes du dernier paysagiste » !
« Le droit à la laideur pour tous » est certainement une contribution majeure de la Ve République à la vie des classes populaires, avec une mention spéciale pour la dénaturation et la destruction de l’harmonie architecturale des provinces et de leurs campagnes, désormais constellées d’équipements plus laids les uns que les autres.
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Une mention spéciale est à attribuer à la Bretagne, région autrefois belle à couper le souffle, désormais envahie par un urbanisme et un activisme économique terrifiants – soutenus à droite comme à gauche – qui, en de nombreux secteurs, rend le saccage irréversible : dans la banlieue des deux métropoles, le long des rocades et du chapelet de villes moyennes intérieures et côtières (même la belle Saint-Malo est entourée d’une gangue urbaine devenue terrifiante), sur le littoral, en passe d’être asphyxié, en maints endroits, par des maires qui mettent les bouchées doubles pour combler les « dents creuses » avant l’entrée en vigueur de la loi interdisant l’artificialisation des sols. On trouvera dans cet abécédaire un échantillon qu’il faudra éprouver et nourrir par des visites de terrain. Bons week-ends d’automne !
Antennes-relais : Omniprésentes dans les villes – où leur nombre a crû au rythme de la téléphonie mobile –, sur les points hauts et les toits d’immeubles, auxquels elles ajoutent une touche de laideur, les antennes-relais se composent d’un bloc métallique compact et touffu, sans la légèreté aérienne des antennes TV de jadis. Parfois, ces antennes prennent les atours d’un haut palmier ou d’un arbre métallique qui
