Entretien avec le propriétaire du compte Twitter parodique que la gauche rêve de faire interdire…
Ce vendredi 26 août 2022, le compte parodique Twitter Sardine Ruisseau a dépassé le compte certifié de la députée écologiste Sandrine Rousseau (Nupes). Une première dans la foire aux gazouillis.
Le 24 août 2022, Sandrine Rousseau, députée Nupes, se réjouissait de la suspension du compte parodique Twitter Sardine Ruisseau, par ces mots : « Un an de cyberharcèlement prendrait-il fin ? #OuiLesTempsChangent » et remerciait ses soutiens pour les signalements systématiques.
On peut s’étonner que ce compte parodique suscite un tel rejet de la part de l’élue écologiste quand son existence et sa popularité lui offrent une notoriété certaine. En d’autres temps, avoir sa marionnette aux Guignols de l’info était vécu comme une consécration. À l’heure de la com’ 2.0, Sandrine Rousseau pourrait s’enorgueillir d’avoir un compte parodique à son nom ayant autant de succès. Il existe en effet beaucoup d’autres comptes parodiques Twitter de personnalités politiques qui n’obtiennent pas la même audience.
Sardine Ruisseau nous a accordé un entretien exclusif.
Causeur. Bonjour. Comment doit-on vous appeler ? Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Sardine Ruisseau. Mon nom est Sardine Ruisseau, compte humoristique sur Twitter qui tourne en dérision les délires du wokisme et qui parodie la femme politique Sandrine Rousseau.
Vous avez créé le compte parodique Sardine Ruisseau sur Twitter en septembre 2021. Pourquoi avoir choisi de parodier spécifiquement Sandrine Rousseau ?
J’avais l’intention de créer un compte parodique sur les délires du wokisme depuis un moment, un peu sur le même modèle que Titania McGrath. En septembre dernier, en l’espace de quelques jours j’ai entendu des propos complètement lunaires, émanant de membres de EELV : «Le fait d’avoir des terroristes en France permet de les surveiller» ou bien «le monde crève de trop de rationalité». Je me suis rendu compte que ces propos venaient de la même personne : Sandrine Rousseau. Je me suis dit alors : «Génial, je vais faire un compte parodique sur elle».
Vous avez été classé dans le Top 5 des comptes à suivre par le journal La Dépêche. Vous êtes dans la tendance Twitter de l’été. Vous attendiez-vous à ce succès ?
Je ne m’attendais pas à un tel succès et encore moins aussi rapidement. Moins d’un mois après la création de mon compte, le journal Le Point a publié un article comparant mes propos à ceux de Sandrine Rousseau. Mes tweets sont parfois repris sur des chaines d’info en continu. Près d’une quarantaine de députés me suivent. J’ai plus de 90 000 abonnés et mon compte génère 15M d’impressions par mois, c’est-à-dire que mes messages sont affichés 15 millions de fois par mois !
Sandrine Rousseau vous accuse de faire partie de « la fachosphère ». Vous reconnaissez-vous dans ce portrait ?
Je ne me reconnais pas dans cette appellation de « fachosphère » ou d’extrême droite. Je me rappelle qu’Hidalgo avait affirmé de son côté que l’extrême droite était derrière le hashtag #SaccageParis. C’était ridicule. Mes détracteurs font de même. Traiter quelqu’un de facho pour le discréditer et éviter ainsi tout débat, c’est une technique classique de la gauche. Mais cela ne fonctionne plus. Les termes de « facho » ou « extrême droite » sont dorénavant complètement galvaudés. La gauche ferait mieux de relire « L’enfant qui criait au loup ». Le jour où les fachos seront là, malheureusement plus personne ne les écoutera.
Alors, où vous situez-vous sur le spectre politique ?
Je suis plutôt un électron libre ! J’ai des idées qui couvrent l’ensemble de l’échiquier politique. Néanmoins, la gauche s’est tellement radicalisée dernièrement que mécaniquement je me trouve maintenant plutôt à droite sur l’échiquier politique. On a ressorti certains de mes vieux tweets qui pris au premier degré et hors contexte peuvent être considérés comme racistes, misogynes ou homophobes. Mais si je joue un soldat nazi dans un film, est-ce que je fais l’apologie du nazisme ? J’ai tweeté plusieurs fois qu’il fallait enseigner la tolérance aux fachos « à coup de batte de baseball », mais personne ne m’a traité d’antifa ou d’extrême gauche car cet humour-ci est toléré. J’ai traité Marine Le Pen de « sorcière à chats », Zemmour de « Gargamel sans talent » et je n’ai pas été tendre non plus avec Valérie Pécresse.
Tout cela a suscité très peu de réactions, car je pense aujourd’hui que la droite a plus d’humour que la gauche.
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Pour qui avez-vous voté aux dernières élections présidentielles ?
Je n’ai pas voté à la dernière élection présidentielle car j’ai déménagé et je ne me suis pas réinscrite sur les listes électorales à temps. Je ne suis pas marquée politiquement. Je suis avant tout très attachée à la liberté d’expression. J’estime qu’elle est actuellement en danger en France. Beaucoup de journalistes ont bloqué mon compte alors que je ne leur avais jamais adressé la parole. Un chroniqueur de Mediapart a consacré quinze minutes sur sa chaine Twitch pour parler de moi alors qu’il avait bloqué mon compte depuis plusieurs mois. Une journaliste a même regretté que mon compte n’ait pas été censuré. Je trouve plutôt inquiétant que des journalistes soient contre la liberté d’expression. Mon humour doit sans doute taper juste pour susciter tant d’appels à la censure.
Sandrine Rousseau déclare être victime de cyberharcèlement avec vos tweets. Que répondez-vous à cette accusation ?
Je récuse toute forme de cyberharcèlement de ma part. Je me moque de ses positions mais cela reste de la parodie et Sandrine Rousseau n’est pas la cible exclusive. Je tape sur tout le monde. La mention « parodie » était présente dès la création du compte. Bien que je ne partage pas ses idées, elle a un coté attendrissant et attachant. À vrai dire j’ai de la sympathie pour elle. Mes intentions premières étaient de faire rire en exagérant le trait sur le wokisme, mais nullement de blesser Sandrine Rousseau qui était juste un support. En tant que personnage politique, elle aurait du jouer le jeu. Au contraire elle m’a immédiatement bloqué et a cherché à faire censurer mon compte alors que ce dernier respecte les conditions d’utilisation de Twitter. Mais il faut avouer qu’elle est une grande comique malgré elle et qu’à de nombreuses reprises elle a suscité la raillerie avec des déclarations complètement surréalistes.
Pour quelles raisons avez-vous désactivé votre compte cet été ?
J’ai désactivé mon compte car un groupe de personnes cherchait des éléments dans mon historique en vue de me doxer (NDLR : rechercher et communiquer des informations personnelles sur une personne dans le but de nuire à cette personne). J’ai également reçu de nombreuses menaces de procès. Une sénatrice EELV a même dit que j’avais « des pratiques terribles pour notre démocratie ». Des journalistes ont dit que je pratiquais la désinformation. Est-ce que le Gorafi est aussi un outil de désinformation pour ces journalistes ? Toutefois, je dois dire que de nombreuses personnalités sont également venues à la rescousse. J’avais ouvert ce compte pour rire, mais j’étais devenu un sujet politique et la tournure des évènements n’était plus drôle.
Une fois la polémique passée, vous avez décidé de réactiver votre compte.
J’ai réactivé mon compte une fois que mon historique a été effacé et que les esprits s’étaient un peu calmés… J’ai estimé que pour la liberté d’expression je devais revenir car les censeurs ne doivent jamais gagner. Les menaces de procès étaient bien réelles car mon compte a été signalé auprès de la police française dès qu’il a été réactivé. Des membres d’EELV et de la Nupes ont également lancé une campagne de boycott à mon encontre. Cette campagne a été un désastre pour eux car mon compte a gagné près de 15 000 abonnés en quelques jours.
Une moustache est alors apparue sur la photo de profil. Que représente cette moustache ?
La moustache est apparue après la réactivation de mon compte. Je voulais apparaître incognito car j’étais recherchée par la police de la bien-pensance et du wokisme. C’était également une façon supplémentaire d’éviter la confusion avec Sandrine Rousseau.
Pour quelles raisons Twitter a suspendu votre compte ?
J’ai reçu une notification de Twitter qui indiquait que les forces de l’ordre française demandaient la suppression d’un tweet, 24 heures seulement après l’avoir posté. Le tweet en question représentait Ben Laden et Staline à côté de Sandrine Rousseau. C’était un détournement d’une photo où Sandrine Rousseau apparaissait à côté de Taha Bouhafs et Assa Traoré. On m’a expliqué que je ne risquais pas grand chose car un procureur verrait rapidement qu’il s’agit d’humour au deuxième degré. Ensuite, Twitter a suspendu le compte pour « infraction aux règles relatives aux conduites haineuses » pour le tweet : « À chaque taliban que nous accueillons en France, c’est une femme lapidée en moins en Afghanistan. Afin de protéger les femmes afghanes, nous devons accueillir les talibans en France ».
Comment définiriez-vous la parodie ?
Ma conception de la parodie est très proche de sa définition dans le dictionnaire. C’est la contrefaçon grotesque d’une œuvre ou d’une personne en vue de la tourner en dérision.
Pensez-vous que l’on puisse rire de tout ?
Je citerai Rabelais : le rire est le propre de l’homme. Ce qui me fait rire avant tout, ce sont les cris d’orfraie de la bien-pensance. Durant l’Ancien Régime, le clergé dictait la morale. Aujourd’hui un clergé 2.0 constitué par certains politiques, journalistes et universitaires nous explique ce que nous devons penser en matière de mœurs, d’humour ou de politique. Jadis le clergé nous excommuniait, aujourd’hui ce clergé 2.0 nous « cancel ». Les gens en ont marre de ces curés de la bien-pensance et de ces Torquemada de bac à sable. Je pense que la raison de mon succès est liée à un ras-le bol d’une partie de la population. Donc on peut rire de tout, mais pas avec tout le monde ; et certainement pas avec les écoféministes qui pensent que le second degré est responsable du réchauffement climatique.
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