Avec la nouvelle Assemblée, le nouveau gouvernement et la nouvelle crise, on ne sait plus où donner de la tête !
Le deuxième quinquennat a très mal commencé pour le président réélu et pour les Français. La guerre en Ukraine n’a fait qu’aggraver les déficits structurels de l’entreprise France qui, jusqu’à présent, n’avait eu besoin de personne pour dépenser toujours plus et arriver au total phénoménal de 3.000 milliards d’euros de dettes. Ou plutôt, il aura fallu qu’un président ultra dépensier, tout en n’arrivant même pas à tenir la plupart de ses promesses, fasse monter le curseur aussi haut, jusqu’à cette infernale montagne de dettes. Résultat, à ce jour, les encours de dettes arrivant à échéance chaque année, de 2022 à 2026, selon une enquête en profondeur de la Fondation iFRAP parue dernièrement dans son bulletin mensuel, sont compris entre 170 et 180 milliards d’euros par an.
À ces seuls remboursements des emprunts du passé, il faudra ajouter le financement des déficits publics de ces années 2022-2026, lesquels selon l’iFRAP sont prévus à hauteur de 160 milliards en 2022 pour arriver à un peu moins de 100 milliards en 2026, à condition que l’État respecte bien ses prévisions budgétaires, ce qui n’est pratiquement jamais arrivé pendant les dernières décennies, encore moins pendant les deux derniers quinquennats. Quoi qu’il en soit, et pour ne pas se retrouver en cessation des paiements, le Trésor français devra continuer d’emprunter massivement lors des quatre prochaines années, aux alentours de 300 milliards par an de titres à moyen long terme et cela uniquement pour se tenir à flot et pour assurer les fins de mois de notre pays, devenu au fil du temps le plus impécunieux d’Europe. Et de loin !
Les vertiges de Ghislaine Ottenheimer
Les dernières statistiques d’Eurostat pour l’année 2021, qui sont maintenant connues, le confirment : la France s’est encore classée au premier rang de l’Union Européenne pour le niveau de ses « superdépenses » publiques avec 59,2 % du PIB, devant la Grèce (56,9 %) et une moyenne de 52,4 % du PIB pour l’ensemble de la zone euro. Bravo messieurs Hollande et Macron, vous resterez en l’espèce et sans doute pour longtemps les meilleurs pour le pire, au tableau d’horreur des gouvernants européens !
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Une observatrice expérimentée et avisée de la chose publique, Ghislaine Ottenheimer, est tombée de sa chaise de rédactrice en chef à Challenges, devant « l’étrange dérive » des 50 milliards d’euros d’addition supplémentaire de dépenses décidée par Emmanuel Macron pour répondre à « la perte de pouvoir d’achat » de nos concitoyens. Ce qui « fait définitivement basculer la France du côté des mauvais élèves de l’Europe, écrit-elle, alors que le chef de l’État s’est fait élire en raison de son sérieux… face à des extrêmes jugés trop dépensiers. » Son édito du 30 juin est titré « l’arroseur arrosé » et commence par un seul mot : « Vertigineux ».
Dans le même numéro de Challenges, la chronique de l’économiste Pierre Cahuc, professeur à Sciences-Po Paris, était justement consacrée à une superdépense très française, le RSA, qui a depuis longtemps dépassé le seuil de l’admissible en matière de charité publique. On n’en est plus à un coût de 2 ou 3 milliards d’euros par an, ce qui le rendait à peu près supportable, mais à 11 milliards aujourd’hui. « La logique des « droits » et « devoirs » a été largement dévoyée, écrit Cahuc, notamment en raison de la défaillance du suivi et de l’accompagnement des allocataires ». Tout est dit : comme il n’y a plus aucun contrôle, tous les excès sont permis. Une seule règle, celle des trois « G » : Gachis et Gabegie à Gogo !
Le matraquage fiscal des automobilistes
Au chapitre des « superprofits », il est beaucoup question en ce moment des « entreprises qui profitent de la crise » comme le pétrolier Total ou l’armateur CMA CGM. La gauche et l’extrême gauche proposent ainsi une nouvelle taxe pour un total – c’est le cas de le dire – de 10 milliards d’euros. Fort bien, mais savent-ils ces « insoumis », ces socialistes, ces écolos et communistes que ces deux méga entreprises font la quasi totalité de leur chiffre d’affaires et de leurs bénéfices sur le marché mondial et qu’ils paient déjà des impôts très élevés à l’étranger ? Savent-ils en outre ce que rapportent à l’État français les diverses taxes sur les automobilistes en France ? Nous avons un chiffre en provenance de l’ACA (Automobile Club Association) qui nous donne pour l’année 2019 un total de 40 milliards d’euros pour les seules taxes sur les carburants, l’essentiel provenant de la célèbre TICPE (Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques), le tout étant surtaxé d’une TVA à 20 % !
En fait, à la pompe, nos automobilistes dépensent plus de taxes (60 %) que de carburant (40 %) selon l’ACA qui est la plus importante organisation française de défense des automobilistes avec 800 000 adhérents et dont le siège est à Strasbourg. Si les prix à la pompe augmentent de 30 %, les taxes et « supertaxes » augmentent aussi de 30 %, et ainsi de suite… Le bastonnage des seuls automobilistes doit également tenir compte des autres taxes qui leur sont imposées, essentiellement de la TVA. Pour 2019 : 9 milliards sur les péages, 8 milliards sur les véhicules neufs, 7 sur l’entretien, 4 sur l’assurance, 3 milliards d’amendes forfaitaires, 2 de certificats d’immatriculation et un dernier milliard pour quelques autres taxes mineures, ce qui fait bien (40 + 34) un total général de taxes et surtaxes de 74 milliards d’euros en 2019, 13 milliards de plus qu’en 2017. Un immense matraquage fiscal pour les automobilistes ! Par comparaison, l’impôt sur le revenu a rapporté 77 milliards d’euros pendant cette même année 2019.
Les explications embrouillées de Gabriel Attal
Évidemment, l’État se garde bien de mettre de l’huile sur le feu. Le sémillant Gabriel Attal, le nouveau ministre des Comptes publics, fait comme d’habitude : il embrouille, répond à côté la plupart du temps, enchaîne les éléments de langage fournis par son équipe, fait des promesses qui n’engagent que ceux qui les reçoivent et parle tellement vite qu’on finit par en oublier l’essentiel. La seule façon de le suivre, c’est de le lire. Ainsi de cette interview écrite (et sans doute réécrite par Bercy) parue le 10 juillet dans Le Parisien. À la question, « que répondez-vous à ceux qui accusent l’État de s’engraisser sur le dos de la crise, par exemple via la TVA sur la hausse des prix du carburant ? », voici sa réponse : « Ceux qui tiennent ce discours mentent aux Français (…) L’inflation a fait augmenter nos recettes fiscales liées à l’essence de 3 milliards d’euros, mais on en dépense 8 milliards, notamment via la ristourne de 18 centimes à la pompe. » Or nous savons que les automobilistes français dépensent dans les stations service plus de taxes (60 %) que de carburant (40 %), la taxe la plus importante, la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) étant elle même taxée d’une TVA à 20 %. La surtaxe sur la taxe ! Une hérésie fiscale sans doute unique au monde ! Pour le moins, un abus de pouvoir fiscal !
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Sur 2 euros le litre de carburant, l’État encaisse ainsi 1 euro 20 de taxes diverses et les 40 milliards d’euros de recettes fiscales sur les carburants de 2019, vont se transformer au bas mot, si la crise continue, à un chiffre situé entre 50 et 70 milliards sur une année entière. C’est d’une logique implacable parce que mathématique, sauf à ce que la consommation de carburant s’effondre en chemin, ce qui ne semble pas être le cas actuellement sur les routes et les autoroutes pendant cette période de vacances ! En attendant, Total s’est engagé à une baisse de 20 centimes par litre dans ses stations-service dès le 1er septembre et pour deux mois. Quant à la CMA CGM, elle a annoncé une nouvelle baisse de ses tarifs, ce qui a fait dire à Bruno Retailleau, le président du groupe LR au Sénat, toujours dans Le Parisien (le 23 juillet) : « C’est de la démagogie… Les entreprises ne sont pas des vaches à lait (…) Il faut sortir des raisonnements économiques qui aboutissent au déclin de la France et à l’appauvrissement des Français. »
L’État, donneur de leçons, c’est soit risible, soit abusif, soit les deux : selon les estimations de la Commission de régulation de l’énergie (CRE), les énergies renouvelables pourraient rapporter « au moins » 8,6 milliards d’euros au budget de l’État sur deux ans, en 2022 et 2023, alors que la prévision initiale de la CRE était une dépense de 10,3 milliards ! Un véritable « jackpot » donc, de près de 19 milliards d’euros (8,6 + 10,3) et une « révolution » pour ce secteur selon le vénérable quotidien Les Échos, en raison des prix stratosphériques sur le marché de gros de l’électricité fournie par l’éolien. Et cela uniquement via l’éolien terrestre puisque nous avons pris un énorme retard sur l’édification de parcs éoliens maritimes, ce qui est bien dommage. Comme l’expliquait le ministre Attal, ceux qui disent que la crise et l’inflation enrichissent l’État « mentent aux Français » !!! De peur que les mots dépassent notre pensée, nous en resterons là…