L’entrée fracassante de certains députés de la Nupes au Palais Bourbon, hier, ne déçoit pas. Elle entérine le fait que la gauche ne siègera à l’assemblée que pour amuser la galerie. Les propos outranciers de figures gauchistes ont invisibilisé les députés de gauche plus responsables.
N’en déplaise à notre ami Jérôme Leroy, qui a vu le retour de la politique avec un grand P (et un caillou dans la chaussure que Macron venait d’enfiler pour son nouveau quinquennat) dans le succès électoral de la baroque Nupes, l’arrivée en fanfare de quelques députés « Insoumis » ou écolos à l’Assemblée nationale, hier, est un démenti sanglant à toute analyse qui se voudrait optimiste.
Des députés de l’extrême gauche se sont en effet surpassés et ont adopté des postures abracadabrantesques lors de la première séance de la 16e législature, où Yaël Braun-Pivet (LREM) a été sans surprise élue au perchoir – elle partait favorite. En dehors de l’hémicycle, des propos délirants nous sont rapportés, que nous allons aborder.
Une arrivée tonitruante
Tout avait pourtant si bien commencé ! Peu avant 15 heures, la Nupes (insoumis, socialistes, communistes et verts) faisait une arrivée triomphale, groupée et très remarquée. Mais cette démarche, en réalité, visait vraisemblablement à rassurer ceux qui parmi les citoyens commencent à avoir de sérieux doutes quant à la capacité des groupes de gauche à faire le poids face à Renaissance (LREM, Modem et Horizons). En effet, cela ne fait que sept jours que socialistes, communistes et écologistes ont opposé un refus ferme à la proposition du Fidel Castro de la Canebière de créer un groupe parlementaire uni derrière lui…
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Une photo du site du Monde a ainsi montré une arrivée côte à côte des députés Olivier Faure (socialiste, Seine-et-Marne), Mathilde Panot (insoumise, Val-de-Marne), Julien Bayou (EELV, Paris) et Boris Vallaud (socialiste, Landes). Des communistes, comme le député du Puy-de-Dôme André Chassaigne, suivent de près ce cortège infernal. Sur le cliché, l’union est parfaite !
Malheureusement, tout de suite après, l’attitude et les propos de quelques-uns des 131 députés de la fameuse Nupes ont gâché ce beau tableau. Qu’est-ce que disait Marine Le Pen, pendant la campagne, déjà ? «La Nupes est une sorte de ZAD généralisée, emmenée par un Jean-Luc Mélenchon qui a sorti la carte magouilles»… Nous ne reprendrons pas des propos aussi extrémistes, même s’il faut bien constater, en parodiant un ancien ministre de l’Intérieur de Sarkozy, que les députés gauchistes, quand il y en a un ou deux, ça va, mais c’est quand il y en a beaucoup qu’il y a des problèmes…
Les gamineries d’Obono et Boyard face au RN
Tout d’abord, comme me l’apprend Hala Oukili, en attendant les élections des secrétaires de l’assemblée, une tradition héritée de la Révolution veut que ce sont les six plus jeunes élus qui remplissent cette fonction.
Louis Boyard, le benjamin (LFI) de l’Assemblée nationale – du moins de la métropole – et dont nous avions prédit l’élection, s’est donc vu confier cette lourde tâche mardi. Lors du vote pour la présidence de l’assemblée, il était assesseur du scrutin. Tous les députés glissaient devant lui leur bulletin secret dans l’urne, et étaient invités à lui serrer la main. Le jeune élu en a profité pour manifester son opposition aux élus du RN, refusant notamment de saluer le député de l’Oise et ancien journaliste de LCI Philippe Ballard (la vidéo de la séquence était très commentée sur les réseaux sociaux hier soir, sur le mode du fascisme qui ne devait pas passer). Reste une question: Louis Boyard était-il aussi impoli, lorsqu’il s’adressait aux clients à qui il vendait de la drogue pour financer ses études ?
De son côté, le député RN de l’Yonne Julien Odoul s’est plaint d’un « bizutage ». Lors de cette première séance, les députés ne siégeaient pas par groupes, mais par ordre alphabétique, les compositions n’étant publiées au Journal Officiel que mercredi. Odoul s’est ainsi retrouvé dans la panade, étant placé à côté de son ennemie jurée, la députée de Paris LFI Danièle Obono, qui a à son tour ostensiblement refusé de lui serrer la main qu’il lui tendait.
Une robe, et une évocation historique qui passe mal
De leur côté, les Verts n’étaient pas totalement en reste. Ainsi, comme l’agit-prop néoféministe ne semble pas devoir s’arrêter aux portes du Palais Bourbon, la députée EELV du Rhône Marie-Charlotte Garin avait décidé de revêtir la robe à fleurs bleues portée en 2012 par sa célèbre ancêtre Cécile Duflot (et qui lui avait valu des quolibets à l’époque). « C’est un symbole de comment le corps des femmes est toujours sujet de commentaires » a-t-elle crânement expliqué devant des journalistes visiblement aussi ravis de sa toilette que de son niveau de français. Par ailleurs, dans la dimension parallèle où elle semble avoir élu domicile ces derniers mois, Sandrine Rousseau affirmait sur Twitter qu’elle entrait à l’Assemblée nationale « sans aucune ambiguïté sur [son] soutien sans faille aux personnes trans ». Sans commentaire.
Mais les propos les plus outranciers venus de la gauche lors de cette première séance ont concerné un sujet pour le moins inattendu, l’Algérie ! Avant que Mme Braun-Pivet ne soit élue et entame à la tribune l’habituel prêchi-prêcha sur les inégalités entre les hommes et les femmes, la séance était présidée par le doyen de l’Assemblée nationale, le député des Bouches-du-Rhône RN de 79 ans, José Gonzalez. Dans son discours inaugural, ce Pied-noir né à Oran a évoqué sa terre natale d’où les Français d’Algérie ont été chassés en 1962, et a notamment indiqué, très ému, avoir « laissé là-bas une partie de [sa] France et beaucoup d’amis ». Que n’avait-il pas dit là ? « Le RN veut montrer patte blanche, mais ça explose dès le premier discours » s’est indignée l’impayable Sandrine Rousseau, quand Mathilde Panot a carrément vu dans ces propos d’une grande banalité rien de moins que « l’apologie de l’Algérie française et des crimes de la colonisation »…
C’est que le début, d’accord d’accord…
Aujourd’hui, RN et Insoumis devraient passer à autre chose, et se chamailler autour de l’importante commission des Finances, dont le président sera désigné jeudi – un poste pour lequel s’affrontent le député RN de la Somme Jean-Philippe Tanguy et le député LFI de la Seine-Saint-Denis Eric Coquerel. Même si la gauche continue de manœuvrer en coulisses, la place semble en toute logique promise au RN.
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En attendant, Mme Panot a fait une nouvelle démonstration mardi de la volonté de la LFI de s’enfermer dans la posture du refus de toute démarche constructive. Elle a indiqué que son groupe était défavorable à la loi en préparation au gouvernement sur le pouvoir d’achat, rappelant des éléments de langage altermondialistes convenus. « Dans un pays dans lequel il y a cinq milliardaires qui détiennent autant que 27 millions de personnes », cette loi ne serait bien sûr pas à la hauteur, a expliqué cette férue de chiffres. Le ministre de la Fonction publique, Stanislas Guerini, est malheureusement venu couper l’herbe sous le pied de la députée gauchiste, un peu plus tard, annonçant une augmentation générale des traitements des fonctionnaires de 3,5% à compter du 1er juillet. Non, le gouvernement n’est pas insensible à la question sensible du pouvoir d’achat des Français!
Un soupçon de wokisme, une pincée de pensée décoloniale ou altermondialiste, et un mépris total du protocole et du respect républicains au sein de l’hémicycle, voilà le bilan de cette première journée à gauche, alors que les citoyens attendent des mesures concrètes pour affronter la crise de l’énergie ou pour remplir le panier de la ménagère. Il n’est vraiment pas certain que les Français apprécient bien longtemps cette attitude (un peu) puérile et si peu constructive de leurs nouveaux députés de gauche.
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