Philippe Bilger revient sur les événements qui ont eu lieu aux abords du Stade de France lors de la finale de la Ligue des champions. Mensonges ministériels, euphémisme de la classe politique, non-réaction présidentielle, risée à l’international…
Ce titre m’a paru pertinent mais comme nous sommes en France, je sais que rien ne se passera et que sauf bouleversement législatif, les deux ministres concernés – celui de l’Intérieur et celle des Sports – demeureront là où ils sont.
Pourtant l’idée qui vient immédiatement à l’esprit est que depuis l’immense fiasco de la soirée du 28 mai, ils n’ont cessé de « patauger », le premier ajoutant le mensonge à l’incurie et la seconde emplie de bonne volonté, venant d’être nommée et terriblement maladroite (l’aval des structures officielles du football contraintes d’être sur la même ligne que celle des ministres comptant pour rien).
Mais qui se soucie d’eux, de ces deux ministres abandonnés en rase banlieue ?
Difficile de cacher « l’éléphant dans la pièce » (E. Zemmour)
Pourtant on ne peut plus se dissimuler la vérité. Les événements, les agressions, les violences, les vols et les intimidations odieuses – certains des auteurs ricanaient en voyant des enfants pleurer – qui ont fait subir le pire à des Français comme aux supporters anglais et espagnols, ne relevaient plus de la délinquance ordinaire mais d’une coagulation de voyous venus de diverses cités et sachant qu’ils pourraient se livrer en toute impunité à ce qu’une syndicaliste policière a qualifié de « razzias ».
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Il a fallu du temps, notamment grâce aux médias étrangers et à des déclarations de témoins anglais révélant qu’ils avaient été tétanisés par l’angoisse, effrayés comme jamais, et pour certains craignant de mourir. L’absence de la police mêlée à l’emprise de ces bandes se régalant face à la facilité de leurs spoliations a été traumatisante, sans comparaison possible avec d’autres incidents.
Je n’ai pas besoin d’engager un débat théorique sur le point de savoir si nous étions, dans ces lieux et avec ces honteuses péripéties, encore en France ou s’ils ne se rapportaient pas à une prise de possession par d’autres de notre pays.
Macron absent sur le dossier, s’en va à Cherbourg
Il m’importe de déplorer l’étrange silence de la Première ministre, sans doute soumise à une injonction présidentielle, et la choquante indifférence d’Emmanuel Macron qui semble prendre la France et les Français de haut puisqu’à Cherbourg il a refusé de manière ostentatoire et condescendante de répondre à une question pourtant tellement légitime sur le désastre du 28 mai. Alors que, paraît-il, il aurait dénoncé « un mauvais coup porté à la France » (selon le Le Canard enchaîné).
On peut d’ailleurs aussi regretter le ton trop léger d’Edouard Philippe qui, soutenant l’ancienne ministre des Sports candidate aux législatives Roxana Maracineanu, s’est contenté du strict minimum.
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Les desseins du président de la République sont impénétrables. L’image de la France est vilipendée en Europe à cause de la gestion de la finale de la Ligue des champions de l’UEFA imposée au Stade de France grâce au forcing d’Emmanuel Macron. Une fois de plus le président a eu les yeux plus gros que le ventre et s’est abandonné à son péché mignon de vouloir sans être capable de réaliser.
Certes il était important de tweeter sur la formidable victoire de La Rochelle et, encore davantage sur la mort tragique, en Ukraine, de ce jeune journaliste tellement apprécié par BFMTV et tant d’autres confrères et consœurs.
Emmanuel Macron ou les singes de la sagesse
Mais ce qui a produit des effets délétères depuis le 28 mai, et va sans doute peser dans les élections législatives, aurait mérité une intervention présidentielle immédiate, sauf à considérer que la France salie à cause de son impuissance et de son amateurisme, aux yeux de ses concitoyens comme des étrangers présents ou effarés dans leur pays, n’avait pas le moindre intérêt pour Emmanuel Macron.
Ainsi cet opprobre, ces scènes de spoliation et de violences, cette profonde dénaturation de l’image française, ne concerneraient que Gérald Darmanin et Amélie Oudéa-Castera ! J’avoue ne plus rien comprendre à la manière de présider d’Emmanuel Macron, présent sur le dérisoire et le festif (réussi) mais absent sur l’intolérable. S’appropriant le facile et le confortable mais dédaignant l’essentiel et l’alarmant.
Après les élections législatives, va-t-il nous montrer une autre facette de sa personnalité ? Possible mais au fond peu importe puisqu’il se sera tu quand il aurait fallu qu’il parle, s’explique, batte sa coulpe et sanctionne. Mais c’est son propre pouvoir qu’il aurait été contraint de fustiger !
J’ai peur que demain nous n’ayons que cette alternative pour l’insécurité et la Justice. Entre l’impuissance et le mépris du président – et de ceux qui l’entourent et sont aux ordres – ou l’angélisme et la haine de la police de la Nupes.
Nous attendons désespérément autre chose que cette terrifiante impasse…