Le consensus bourgeois autour du président n’augure pas la refondation du contrat social. Il est l’aboutissement d’un mépris profond pour les classes laborieuses et annonce des révoltes populaires d’autant plus violentes que la disparition de toute référence à l’intérêt général rend le dialogue impossible.
La récente présidentielle a révélé une France plus clivée que jamais. Les sujets de stupéfaction ne manquent pas : absence de campagne électorale et de débats, vote téléguidé par des centaines de sondages, unanimisme du champ médiatique, ingérences étrangères et religieuses, fascisation de l’adversaire en guise de programme, etc.
Mais au-delà des aspects idéologiques, internationaux et médiatiques, le plus frappant est la confirmation de ce qu’a révélé le premier quinquennat d’Emmanuel Macron : la réunification autour de lui du bloc bourgeois, sans équivalent depuis la monarchie de Juillet et son vote censitaire. En contrepoint, une véritable populophobie s’est déployée dans certains médias.
La bourgeoisie, principale pourvoyeuse de voix d’Emmanuel Macron
La bourgeoisie, intacte, est presque unanime dans ses quatre composantes sociologiques : la bourgeoisie d’argent et la banque ; la bourgeoisie intellectuelle et ses clercs ; les notables de province guidés par les grands médias parisiens ; et les retraités aisés issus de ces trois catégories, véritable génération-classe, détachée du monde du travail, plus aisée que les actifs, qui constitue un bloc électoral déterminant dans le vote.
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La bourgeoisie réunifiée pèse pour 20 % de la population et de l’électorat, et plus de la moitié du vote Macron ; l’autre pilier de ce vote est constitué du reste des retraités boomers. L’unité du monde bourgeois a été rendue possible par l’effondrement du socialisme et par l’affaissement du catholicisme, qui permettent d’oublier les pauvres – ou plus exactement de les trier. L’effacement du clivage droite/gauche autorise la bourgeoisie, avant tout soucieuse de préserver ses intérêts matériels et ses positions sociales, à ne plus s’embarrasser de considérations idéologiques et politiques. C’est le retour à Balzac sans les romantiques. La bourgeoisie n’a été patriote que lorsque ses intérêts vitaux étaient en jeu : face à l’aristocratie ; quand il lui fallait défendre la liberté économique ; contre l’émeute populaire ou la menace de collectivisation. Seul De Gaulle, qui la méprisait, est parvenu à la dominer parce qu’elle avait collaboré sans vergogne avec les nazis. Ayant tiré la leçon, notre bourgeoisie met aujourd’hui en avant le supplément d’âme qu’elle s’est choisi.
Un mépris de classe qui se banalise
Lors de la crise des Gilets jaunes, le pouvoir avait appelé au secours et mis à l’écran une poignée d’intellectuels organiques issus de Mai 1968 pour criminaliser le peuple révolté. Certains l’avaient accusé de fascisme et d’antisémitisme. D’autres avaient appelé l’armée et la police à tirer à vue. Les intérêts supérieurs de la bourgeoisie étaient effectivement
