Je vais vous demander de faire un petit effort de mémoire. Souvenez-vous de ces années sombres où la France vivait sous le joug lugubre de Nicolas Sarkozy et de ses ministres sans scrupule. Les loups erraient dans les rues des villes moyennes. Les récoltes étaient désastreuses. La stérilité frappait les femmes. L’élite intellectuelle hexagonale quittait massivement le pays (Souvenez-vous des menaces insoutenables de Yannick Noah et de Jamel Debbouze…). Nous traversions une période obscure, marquée par des atrocités quotidiennes. Le Prince était amoureux d’une intermittente du spectacle, et le démoniaque ministre de l’Intérieur avait des cheveux rouges (Souvenez-vous de Brice Hortefeux…) L’air était vicié et l’ère glaciaire. Heureusement, grâce à l’élection de François Hollande nous sommes passés de l’ombre à la lumière – mais personne n’a encore répondu à la question que je posais dès la proclamation des résultats : mais qui va payer l’électricité ?
Dans ces temps obscurs, les Roms, comme nulle part ailleurs en Europe, étaient honteusement pourchassés par des hordes de policiers assoiffés de sang. Les nomades et leurs zenfants étaient continuellement traqués et expulsés. La presse eut alors l’idée d’employer le mot « rafle » pour désigner ces opérations de police – terme qui n’est pas sans évoquer, évidemment, les grandes rafles sans retour de la police française lors de la seconde guerre mondiale. Depuis que la gauche est au pouvoir, étrangement, la presse utilise moins ou même plus du tout le terme infamant de « rafle », alors que les expulsions se poursuivent. « Les évacuation continuent au même rythme qu’avant », expliquait Laurent Ghozi, cofondateur du collectif Romeurope à nos confrères du Point. Sur ce dossier, la seule rupture avec le précédent gouvernement semble être une circulaire nébuleuse imposant un « diagnostic social » avant d’évacuer un camp rom. Une circulaire « sociale » d’ailleurs non appliquée selon les observateurs. Mais, dans le grand concert médiatique, où sont passées les associations, les indignations, les jaccusations, la dénonciation des « rafles » ? Les réactions seraient donc à géométrie variable ?
Comme souvent, tout semble être une question de vocabulaire. Une honorable correspondante de Seine-et-Marne me signale d’ailleurs la publication récente dans Le Parisien d’un article portant ce titre abyssal : « Les quelques 200 Roms du Bois de Grâce se sont auto-expulsés » ! Oui, sous François Hollande les Roms ne sont plus pourchassés et raflés… ils sont même devenus raisonnables et « s’auto-expulsent ». Le journaliste explique : « Le campement de Roms du bois de Grâce, qui a abrité jusqu’à environ deux cents personnes, s’est auto-expulsé en fin de semaine dernière. Les habitants sous le coup d’une expulsion imminente prévue en milieu de semaine, ont préféré déménager » Finies les « rafles » vive les « auto expulsions » ! Qui a dit que François Hollande n’était pas le président des miracles et des bisous ?
Post-Scriptum : Notez, par ailleurs, dans le contexte de l’affaire « Clément Méric » que le groupuscule d’extrême droite Troisième Voie et son « service d’ordre », les Jeunesses nationalistes révolutionnaires (JNR), en passe d’être dissous par le gouvernement, se sont « auto-dissous », a annoncé mardi 25 juin leur chef Serge Ayoub. Décidément, tout le monde a atteint une certaine maturité depuis que Pépère est arrivé à l’Élysée…
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