Avec Laurence Bibot, la maman d’Angèle qui sévit depuis la rentrée chez Charline Vanhoenacker et Alex Vizorek, ils commencent vraiment à nous casser les pieds.
Laurence Bibot est Belge et humoriste. On peut l’entendre sur France Inter, dans l’émission « Par Jupiter » animée par deux humoristes belges, Charline Vanhoenacker et Alex Vizorek. Guillermo Guiz, un autre humoriste belge, a lui trouvé refuge dans l’émission de Nagui sur cette même radio qui semble être devenue une sorte d’asile pour humoristes belges. Ils ont beau être Belges, ces humoristes ont beaucoup de points communs avec les humoristes français de la radio publique : ils sont de gauche, ils sont progressistes, ils ont le cœur sur la main, ils sont payés avec nos impôts, et ils ne sont pas très drôles. Reconnaissons toutefois que Laurence Bibot parvient à être beaucoup plus drôle que Guillaume Meurice ; mais ça, ce n’est pas très difficile : tous les humoristes de France Inter sont beaucoup plus drôles que Guillaume Meurice, tous les humoristes de toutes les radios francophones sont beaucoup plus drôles que Guillaume Meurice, même ma tata Simone ou Jean Lassalle sont beaucoup plus drôles que Guillaume Meurice.
Que des Belges: et la diversité, alors?
Si on veut en croire Laurence Bibot, la scène humoristique française des années 90 était plus vide qu’un meeting d’Anne Hidalgo: « Quand j’étais plus jeune, il y avait en France cinq personnes qui faisaient de l’humour, tous des hommes blancs. Maintenant ça se diversifie et c’est super intéressant » [1]. C’est comme ça dorénavant : les « hommes blancs » d’hier, comme ceux d’aujourd’hui ou de demain, ont interêt à se faire tout petits, quoi qu’ils aient fait, quel qu’ait été le domaine dans lequel ils ont pu exceller, la conquête spatiale, la philosophie, la médecine, la peinture à l’huile, la musique atonale ou l’humour. C’est comme ça dorénavant (bis) : pour que quelque chose devienne « super intéressant » il faut que ce quelque chose « se diversifie » – si ce quelque chose est en plus « inclusif », on atteint alors les sommets de la félicité progressiste.
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Le contribuable français paie, bon gré mal gré, une redevance audiovisuelle. Celle-ci sert entre autre à rémunérer une humoriste belge pour un court et calamiteux billet hebdomadaire, quatre minutes durant lesquelles elle ricane avec ses compatriotes en comparant par exemple la pâlichonne vie politique de son plat pays natal à… L’homme du Picardie [2], feuilleton français qui, dit-elle, était très français, très ringard et très plat. La preuve : « Il y avait du Christian Barbier »(sic), et « les personnages s’appelaient Thérèse, Yvette et Joseph, ça donne une idée du ton ». Eh oui, chère Laurence Bibot, nous étions en 1968 et les prénoms des Français ressemblaient encore à ceux-là – Thérèse Durtol était jouée par Yvette Étiévant, Joseph Durtol par Christian Barbier, Yvette Durtol par Léone Veron ; on savait ainsi immédiatement sur les eaux de quel pays naviguait le Picardie.
Dans sa dernière chronique (2 février), Laurence Bibot corrobore la thèse du « grand remplacement » : « Pour avoir pris le RER, je confirme que, dans tous les sens du terme, la femme française est colorée, et le chiffre de trois sur quatre ne me semble pas exagéré. » Mais, là où Richard Millet décrit le même RER en en déplorant le « principe évacuateur du peuple français » [3], Laurence Bibot, en bonne bourgeoise bohême progressiste ayant la possibilité d’échapper à la promiscuité multi-ethnique et multiculturaliste, ne cache pas sa satisfaction de voir Paris atteint du même mal que sa région-capitale de la Belgique bientôt entièrement molenbeekisée. Toutefois, la France a encore du retard, sur ce sujet comme sur tant d’autres : le gouvernement belge vient de désigner un ministre de la fonction publique… transgenre. « C’est une première en Europe – chez nous ça ne fait pas débat », claironne-t-elle devant ses compatriotes radiophoniques enjoués, fiers de leur pays qui en remontre à la France pour ce qui est des « avancées sociétales ».
Voici venu le temps des artistes belges arrogants
Les deux enfants de Laurence Bibot sont également « artistes » et sévissent aussi en France. Roméo Elvis Van Laeken (alias Roméo Elvis) est rappeur. Il aurait pu s’appeler Christian Joseph Roméo André Van Laeken mais ses parents ont préféré le prénommer Roméo Johnny Elvis Kiki, persuadés que c’était moins ridicule. Il parle et chante comme n’importe quel autre rappeur, ce qui nous le rend immédiatement antipathique. Angèle Van Laeken, dite Angèle, est chanteuse et féministe. Elle écrit des chansons contre le sexisme (Balance ton quoi), soutient le collectif NousToutes co-fondé par Caroline De Haas, assume d’être une icône LGBT après avoir révélé sa bisexualité et d’avoir brisé le « tabou de la pilosité féminine » en exhibant sur les réseaux sociaux ses aisselles poilues. On ne sait pas encore ce que cette artiste contestataire belge, fille d’une humoriste non-conformiste belge, a décidé de faire pour dénoncer ce que certaines féministes appellent « l’injonction à l’épilation du maillot ». On craint le pire.
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Annie Cordy, Raymond Devos ou Jacques Brel (pour ne nommer que quelques-uns des plus fameux artistes belges qui connurent un grand succès en France) n’avaient pas l’arrogance de ces humoristes et chanteuses belges qui nous font aujourd’hui la morale et délivrent des brevets de bonne conduite. Ils pratiquaient leur art imprégnés de cette instinctive considération sur eux-mêmes décrite par Simon Leys : « S’il est une chose dont le Belge est pénétré, c’est de son insignifiance. Cela, en revanche, lui donne une incomparable liberté – un salubre irrespect, d’une tranquille impertinence, frisant l’inconscience » [4] – raison pour laquelle ils conquirent le cœur de nombreux Français qui n’eurent jamais honte de cette culture populaire et de ces Belges talentueux qui les amusèrent, les émurent, les firent rire ou pleurer, sans jamais chercher à les embrigader. Il fut un temps où « un Belge arrogant [était] une contradiction dans les termes » [4]. Ce temps-là est révolu. Au contraire de leurs illustres prédécesseurs, Laurence Bibot et ses arrogants collègues humoristes ont des ambitions prosélytes : ce sont des artistes engagés. Leurs blagues sont des messages. Leur impertinence est citoyenne et inclusive. Ils baignent dans cette époque moralisatrice comme des poissons dans l’eau du bassin wokiste, en ne nageant jamais à contre-courant. Ils sont devenus, comme leurs homologues français, des « mutins de Panurge » (Muray) se transformant à l’occasion en matons, irrespectueux surtout avec ceux qui renâclent à croire que « les avancées sociétales » et le multiculturalisme sont des progrès indispensables et indiscutables. Ils se moquent de nous, salement, sans vergogne ; et nous payons pour ça. Il faut les entendre ricaner ! Car, dans les studios de France Inter, on ne rit plus. Le rire des humoristes d’antan a été remplacé par le ricanement, ce minuscule orgasme buccal des cuistres, des mouchards et des prétentieux…
[1] Entretien donné au site Bruzz le 02 décembre 2021.
[2] L’homme du Picardie, feuilleton français diffusé en 1968 mêlant fiction et aspect documentaire. Il fut parmi les plus regardés des feuilletons de l’ORTF.
[3] Paris bas-ventre : le RER comme principe évacuateur du peuple français, Richard Millet, Éditions La Nouvelle librairie.
[4] Le studio de l’inutilité, Simon Leys, Flammarion.
P.S : Tout n’est pas fichu. Il existe encore des artistes capables de moquer cette époque et de nous faire franchement rire. Je conseille, en vrac, le DVD de la comédie d’Eric Judor intitulée Problemos, les DVD des spectacles de l’humoriste Slovéno-Suisse (l’a failli être Belge, mais non) Gaspard Proust, le dernier DVD de Blanche Gardin tiré de sa série télévisée La meilleure version de moi-même,ou lesdrôlissimes vidéos YouTube de l’humoriste suisse Claude-Inga Barbey. Enfin, dans un autre genre, je conseille le film Les émotifs anonymes (de Jean-Pierre Améris, avec Isabelle Carré), dans lequel le plus génialement foldingue des acteurs belges actuels, Benoît Poelvoorde, joue un de ses plus beaux rôles.
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