Au-delà de l’équation personnelle, le départ de Guillaume Peltier témoigne de l’impasse politique dans laquelle s’enfoncent Valérie Pécresse et les Républicains : tourner le dos aux électeurs d’Eric Zemmour et de Marine Le Pen pour tenter de séduire ceux de Macron…
LR, c’est fini !
Et dire que c’était le parti de mes premiers amours
LR, c’est fini
Je ne crois pas que j’y retournerai un jour !
LR, c’est fini… en tout cas pour Guillaume Peltier, qui a annoncé hier son soutien à Eric Zemmour et a été instantanément exclu du parti. Alors, même si les premiers amours de Guillaume Peltier se nouèrent au Mouvement pour la France de Philippe de Villiers, le député du Loir-et-Cher était adhérent de l’UMP depuis 2009 et numéro 2 des Républicains depuis 2019. Son départ est ainsi un séisme politique.
Pour expliquer son choix, Guillaume Peltier avançait ce dimanche qu’Eric Zemmour était « le seul candidat de la droite, le seul candidat fidèle aux valeurs du RPR, le seul candidat capable de battre Emmanuel Macron parce que capable de rassembler tous les électeurs de droite », avant de poursuivre : « Le vote pour Valérie Pécresse est un vote inutile ! »
Immédiatement, les porte-flingues des Républicains ont sorti l’artillerie lourde avec leur bonne foi légendaire. Le champion étant sans doute Guillaume Larrivé qui se permet d’attaquer Guillaume Peltier sur sa loyauté et sa constance, alors que le député de l’Yonne, après avoir fait campagne à droite toutes aux élections internes LR de 2019, a voté à l’été 2020 la confiance à Jean Castex pour tenter – sans succès – d’obtenir un maroquin ministériel chez Macron ! On notera que Christian Jacob a l’exclusion moins rapide quand il s’agit de députés LR Macron compatibles…
Mais au-delà du cas personnel de Guillaume Peltier, le départ du numéro 2 du parti témoigne de l’impasse politique dans laquelle s’enfoncent Valérie Pécresse et les cadres des Républicains.
Cette impasse, c’est de tourner le dos à l’électorat conservateur, identitaire et populaire qui constitue l’essentiel du peuple de droite. Cet électorat qui avait voté Fillon en 2017 et dont une bonne partie est partie chez Eric Zemmour ou Marine Le Pen. Le mépris des Républicains depuis des années, et de Valérie Pécresse aujourd’hui, pour les Français qui sont pourtant le cœur de l’électorat de la droite explique que la candidate LR peine à dépasser les 15% dans les sondages quand Eric Zemmour et Marine Le Pen dépassent à eux deux les 30%. Ce mépris pour les électeurs de droite va également aux cadres qui les défendent, y compris aux Républicains. Eric Ciotti, pourtant arrivé en tête au 1er tour du Congrès LR, a dû ainsi donner de la voix quelques heures après le second tour pour éviter d’être mis au placard par une Valérie Pécresse alors peu soucieuse de rassemblement.
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À l’inverse, Valérie Pécresse a les yeux de Chimène pour tous les élus Macron-compatibles, choisissant comme porte-parole nationale Christelle Morançais qui n’avait pas hésité à se faire prendre en photo en train de partager une bière avec Edouard Philippe à la veille du 1er tour des élections régionales.
La tentative d’aller convaincre les électeurs d’Emmanuel Macron de voter pour Valérie Pécresse est pourtant vouée à l’échec, malgré la surenchère démagogique sur la crise sanitaire de la présidente de la Région Île-de-France, qui demandait il y a peu de fermer les écoles à la rentrée scolaire de janvier. Alors que l’on attendrait d’une candidate de droite qu’elle démonte la propagande sanitaire d’Emmanuel Macron, Valérie Pécresse a servi la soupe du locataire de l’Élysée, uniquement guidée par la volonté de marquer des points auprès de l’électorat retraité qui est le dernier resté fidèle aux Républicains.
Plus profondément, le peu d’attention porté à Guillaume Peltier par Valérie Pécresse – qui déclarait, à peine désignée par le Congrès LR, « si vous n’êtes pas à l’aise avec ma candidature, partez ! » – témoigne qu’elle ne comprend ni le peuple de droite ni l’enjeu stratégique de cette campagne : l’union des droites. Cette méconnaissance de son électorat s’est illustré la semaine dernière encore. Se réclamer de Sarkozy en promettant de « passer le Kärcher », c’est réveiller la blessure du peuple de droite, lequel se souvient avoir vu le candidat de la rupture se transformer en candidat de l’ouverture – passant du Kärcher au Kouchner – à peine entré à l’Élysée. Quitte à promettre une ouverture, c’est une ouverture à droite que Valérie Pécresse aurait dû promettre. Une ouverture en direction d’Eric Zemmour, ou tout du moins de ses électeurs.
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Au contraire, Valérie Pécresse continue de mépriser les électeurs d’Eric Zemmour. En annonçant qu’elle refuserait de débattre avec les candidats n’ayant pas obtenu leurs signatures. En avalisant le chantage aux subventions ou les menaces d’exclusion de LR à l’attention des maires qui accorderaient leurs parrainages à Eric Zemmour. Cette attitude est, pour elle, une double faute politique. Si Eric Zemmour ne peut se présenter faute de signatures, Valérie Pécresse n’aura aucune chance d’accéder au second tour. Si Zemmour obtient ses signatures, l’attitude de Valérie Pécresse confortera dans leur choix les électeurs de l’ancien journaliste… et les poussera à l’abstention dans une hypothétique qualification de Valérie Pécresse au second tour.
Au lieu d’engager une union des droites que permettait la nouveauté d’une candidature d’Eric Zemmour, Valérie Pécresse a choisi de rétrécir la droite à sa portion congrue, la portion centriste déjà passée chez Emmanuel Macron. La portion chiraquienne qui n’a rien fait pour sortir des politiques de gauche mise en place par Mitterrand puis Jospin. La portion juppéiste qui a trahi Fillon en 2017.
La droite rabougrie, c’est aujourd’hui celle de Valérie Pécresse, une droite qui n’est ni patriote, ni libérale, ni conservatrice, ni sécuritaire, ni identitaire… une droite qui aspire uniquement à transiger avec Emmanuel Macron au printemps prochain pour obtenir les ministères dont ses cadres se sentent « injustement » privés depuis trop longtemps.
Guillaume Peltier, lui, a tiré les conclusions qui s’imposaient de la cécité politique et des arrière-pensées boutiquières des Républicains. Si Valérie Pécresse et Emmanuel Macron sont sur la même ligne, le vote Pécresse est un vote inutile, et il ne reste qu’Eric Zemmour pour tenter de réaliser l’union des droites sans laquelle il ne pourra y avoir de véritable alternance à Emmanuel Macron, et sans laquelle aucun redressement du pays ne sera possible. Qu’elles qu’en soient les motivations personnelles, le courage du co-fondateur de la Droite Forte doit être salué. Et ce d’autant que la météo sondagière d’Eric Zemmour n’est pas particulièrement favorable en ce début 2022.
Mais les sondages de janvier font rarement l’élection d’avril…
… à suivre !
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