En Inde et au Pakistan, ce sport hérité de la présence britannique est au cœur de nouvelles crispations religieuses
Seul joueur musulman de l’équipe indienne de cricket, Mohammed Shami a semé l’émoi dans le pays de Gandhi.
Le 24 octobre, il a pris dans ses bras le capitaine de l’équipe gagnante du Pakistan afin de le féliciter, déclenchant un tsunami de propos hostiles à l’islam qui a submergé la twittosphère.
Des députés nationalistes hindous du Bharatiya Janata Party, le parti au pouvoir, ont accusé le sportif de « sédition » et tous ceux qui ont osé se réjouir de cette défaite sur les réseaux sociaux de « terrorisme ». Une maîtresse d’école musulmane, Nafeesa Attari, qui a salué la victoire pakistanaise sur son compte WhatsApp, a été arrêtée et virée de son poste pour « déclarations préjudiciables à l’intégration nationale » selon le Code pénal. Au Cachemire, des étudiants en médecine qui auraient soutenu l’équipe pakistanaise ont été arrêtés en vertu d’une loi antiterroriste.
Héritage colonial, le cricket a toujours fait partie intégrante de la psyché indienne. Un récent sondage publié par le Pew Research Center a révélé que 56 % des Indiens pensent que, si on n’est pas supporteur de l’équipe nationale de cricket, on ne peut pas être un bon Indien. Du côté pakistanais, on n’est pas en reste. En 2016, un fan pakistanais du capitaine de cricket indien, Virat Kohli, avait été arrêté après avoir hissé le drapeau indien.
Selon la BBC, tous ces incidents concernant le cricket inquiètent de nombreux commentateurs qui estiment que, dans la plus grande démocratie du monde, l’espace pour la liberté d’expression se rétrécit drastiquement au fur et à mesure que les tensions communautaristes s’accroissent. Plus de soixante-dix ans après la partition de l’ancien Raj britannique, la religion est toujours perçue en Inde et au Pakistan comme le critère fondamental de l’identité nationale et de l’intégration culturelle.