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Sarkozy et Mélenchon sont furieux. Il y a de quoi


Sarkozy et Mélenchon sont furieux. Il y a de quoi

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Nicolas Sarkozy et Jean-Luc Mélenchon ont au moins un point commun : ils se mettent facilement en rogne. La colère n’est pas forcément, d’ailleurs, une mauvaise chose en politique. Elle est un excès et l’excès réveille. Que cette colère soit sincère, feinte, surjouée, peu importe finalement. L’homme politique moderne, qui se doit d’être un animal médiatique, rencontre le même problème que le comédien et son paradoxe chez Diderot. Diderot distinguait ceux qui « jouaient d’âme » et ceux qui « jouaient d’intelligence », ceux qui ressentaient les émotions qu’ils devaient donner à voir et ceux qui ne les ressentaient pas.
On a l’impression que ce qui fait que Sarkozy et Mélenchon « passent »,  c’est que chez eux, les deux jeux se mélangent, s’imbriquent et qu’ils sont constamment en équilibre, à la merci d’un dérapage plus ou moins contrôlé.
Nicolas Sarkozy et Jean-Luc Mélenchon ont éprouvé récemment deux grosses colères. Sarkozy parce qu’il a été mis en examen dans le cadre de l’affaire Bettencourt pour « abus de faiblesse » et Mélenchon parce que sa charge virulente contre Pierre Moscovici a été interprétée comme… de l’antisémitisme ! Oui, rien que ça…
On peut penser que Nicolas Sarkozy a trouvé extrêmement désagréable cette qualification d’« abus de faiblesse ». Les images que cela suscite ne sont pas glorieuses, c’est vrai. On se croirait dans un roman de Balzac ou une comédie italienne quand les personnages s’agitent autour de vieillards fortunés par des manœuvres qui provoquent le rire ou le dégoût. On peut comprendre que ça énerve. Mais ce qui a dû encore plus mettre en difficulté l’ex-président, c’est l’excès de zèle de ses amis. Les seconds rôles ont tapé avec une telle force que la colère de Sarkozy s’est retrouvée dépassée d’une manière que l’ancien président n’aurait peut-être pas souhaité tant elle a été excessive.
Ceci dit, dans le contexte actuel de la société française, l’accusation d’abus de faiblesse, à côté de celle d’antisémitisme, c’est presque de la petite bière. En cas d’innocence, Sarko sera blanchi par la justice qui l’a mis en cause.
L’antisémitisme en revanche, comme la pédophilie, est la saloperie la plus disqualifiante que l’on puisse imaginer quand on veut éliminer un artiste, un penseur ou un homme politique de l’espace public. On rappellera comment cela est tombé sur le dos de Mélenchon. Lors du congrès du Parti de Gauche, ce week-end, il a piqué une colère à propos de la politique de Moscovici, notamment vis-à-vis de l’UE : « Donc c’est un comportement irresponsable. Ou plus exactement c’est un comportement de quelqu’un qui ne pense plus en français… qui pense dans la langue de la finance internationale. »
Aussitôt, les grands amis du Front de gauche que sont Jean-Michel Aphatie et Jean Quatremer parlent de « tournant nationaliste » pour le premier et  de « sifflet à ultra-sons antisémites » pour le second. Vient se rajouter une retranscription fautive de l’AFP : « Un comportement de quelqu’un qui ne pense pas français, qui pense finance internationale ». Vous voyez, il suffit d’une petite préposition entre « penser » et « français » pour transformer un discours anticapitaliste en crapulerie maurassienne. Du côté du PS, l’occasion est trop belle : il faut dire qu’un Mélenchon antisémite serait tellement plus facile à combattre qu’un Méluche rappelant à la gauche de gouvernement ses reniements toujours plus grands.
Harlem Désir va y aller très fort : « C’est un vocabulaire des années 30 que l’on ne pensait plus entendre de la bouche d’un républicain et encore moins d’un dirigeant de gauche ». En gros, Mélenchon, c’est Doriot en pire. On aurait beau jeu de faire remarquer à ses accusateurs qu’assimiler la finance internationale aux Juifs n’est pas forcément très malin.
Plus généralement, l’imputation d’antisémitisme à toute personne ayant tendance à trouver que la finance et les banques imposent leur ordre sans que les peuples aient leur mot à dire a une fâcheuse tendance à se généraliser, comme si les arguments manquaient dans le camp d’en face. Si on est aussi sûr de son coup, du côté de la Troïka et du mainstream libéral des partis de gouvernements, pourquoi en arrive-t-on à ce genre de mise en cause ?
On a reproché aux antisarkozystes d’avoir comparé sans vergogne leur bête noire à Pétain. C’était effectivement pour le moins approximatif et idiot. Mais taxer d’antisémitisme une colère antilibérale est tout aussi abject et inconséquent.

*Photo : Remi Noyon.



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