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La transidentité propulsée au sommet de la hiérarchie militaire américaine


La transidentité propulsée au sommet de la hiérarchie militaire américaine
Rachel Levine, février 2021 © CNP/NEWSCOM/SIPA Numéro de reportage : SIPAUSA31549340_000027

Un pas décisif a été franchi par l’administration Biden, le 19 octobre 2021, avec la nomination de la ministre transgenre Rachel Levine au grade d’amiral 4 étoiles [1]. La porte est désormais ouverte pour la promotion d’officiers généraux transgenres aux commandes de l’armée américaine.


Comme annoncé par le magazine Causeur dans l’article « Une armée d’un autre genre » paru en mai dernier [2], aux Etats-Unis, le débat sur la transidentité au sein des forces armées a vocation à s’amplifier sous la houlette de Joe Biden. Le président américain avait défrayé la chronique dès son arrivée au pouvoir en nommant la pédiatre transgenre et spécialiste de médecine LGBT [3], Rachel Levine (qui s’appelait, avant sa transition, Richard Levine), au poste de ministre adjoint de la santé [4]. Cette nomination a été confirmée au Sénat le 25 mars 2021.

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Depuis son élection, Joe Biden s’est attelé à faire annuler toutes les restrictions imposées par son prédécesseur Donald Trump concernant l’enrôlement des personnes transgenres dans les forces armées. Sous l’administration Trump, les personnes transgenres souhaitant s’enrôler dans l’armée ne pouvaient le faire qu’en adhérant à leur identité sexuelle d’origine. Avec Joe Biden, ces restrictions ont été annulées. Les soins hormonaux, la psychothérapie et surtout les actes chirurgicaux de changement de sexe pour les militaires « en transition » seront désormais pris en charge par l’armée. Les procédures de changement administratif d’identité ont également été facilitées.

Un nouveau cap franchi

Le 19 octobre 2021, l’administration Biden a franchi un nouveau cap dans cette voie en élevant la ministre Levine, 63 ans, au grade d’amiral 4 étoiles au sein du US Public Health Service Commissioned Corps, lui permettant ainsi de devenir le plus haut responsable servant sous l’uniforme ouvertement transgenre aux États-Unis.

Levine, avec 6000 personnels servant sous ses ordres, espère désormais que cette nomination – qu’elle considère comme « historique » – ouvre la voie à de nombreuses autres promotions similaires, dans l’optique d’acheminer le pays vers « un avenir diversifié et plus inclusif » [5]. Au sein du Parti républicain, les réactions d’hostilité ont été très vives [6].

Cette nomination constitue en fait un moyen détourné pour amorcer la nomination d’officiers généraux transgenres aux Etats-Unis, car jusqu’à présent, les militaires transgenres étaient surtout visibles parmi les personnels non-officiers. Elle permet de contourner l’opposition d’une majorité de l’institution militaire face à de telles évolutions sociétales, car d’une manière générale, les militaires d’active votent majoritairement pour les Républicains [7]. En effet, le fait que le United States Public Health Service Commissioned Corps (PHSCC) soit placé sous l’égide du US Public Health Service fédéral et non sous celle du ministère de la Défense, facilite cette démarche, ses membres servant sous l’uniforme et sous l’autorité d’une personne qui a le grade d’amiral.

Je ne suis pas folle vous savez…

Loin de demeurer une question spécifiquement américaine, il est à prévoir que dans le sillage de Joe Biden, le débat sur la transidentité dans les forces armées prenne de plus en plus d’ampleur à l’échelle planétaire dans les mois à venir, comme en témoigne d’ores et déjà en Allemagne, le cas du lieutenant-colonel transgenre, Anastasia Biefang (anciennement Marc Biefang), dont la transition a été soutenue par la Bundeswehr [8]. Biefang a 700 personnels sous ses ordres. Au plan personnel, après sa transition, elle a divorcé de sa première femme pour se remarier… avec une femme.

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L’institution militaire ressortira assurément transformée en profondeur par de tels changements en son sein, avec une question lancinante qui demeure pour l’heure en suspens. En effet, on peut se demander si l’exigence de stabilité psychologique demandée à l’ensemble des personnels servant dans les forces armées est réellement compatible avec les séquelles laissées par la souffrance psychologique occasionnée par la « dysphorie de genre », c’est-à-dire le sentiment de détresse né de l’inadéquation entre le sexe assigné et l’identité de genre chez les personnes transgenres.

Ne pas laisser l’opérationnel pâtir de la polémique

Interrogé par Causeur, l’amiral Jean-Michel L’Hénaff, ancien commandant du bataillon de marins-pompiers de Marseille et de deux bâtiments de combat, considère que ces évolutions sociétales témoignent incontestablement d’une évolution des mentalités, mais s’agissant des forces armées, il ne faut pas perdre de vue que seule prime la réussite de la mission opérationnelle. Il faut en effet que les forces soient aptes à servir en tout temps et en tout lieu, d’où la nécessité de prendre en compte le risque induit par d’éventuelles perturbations psychologiques des personnes transgenres. Et d’ajouter : « Je pense qu’on verra ce genre de situation d’abord, et principalement, dans les services de soutien et non dans les unités de combat, mais ces dernières seront concernées tôt ou tard par ces évolutions. On peut d’ores et déjà anticiper que surgiront des difficultés en ce qui concerne la vie en commun des équipages sur des bâtiments de combat – a fortiori à bord des sous-marins – ou en opération en général. La cohésion du groupe est la garantie de son efficacité, qui plus est au combat et plus généralement dans l’action ».

En conclusion, l’élévation de Rachel Levine au sommet de la hiérarchie militaire est un exemple marquant de discrimination positive en faveur des personnes transgenres. La ministre n’a en effet jamais servi dans les forces armées et n’a aucune expérience militaire. De toute évidence, ces développements ne sont pas de nature à favoriser la cohésion de l’institution militaire, qui reste avant tout fondée sur la compétence et le mérite au long cours. Plus largement, on peut légitimement s’interroger sur la pertinence d’opérer des changements aussi considérables au moment où l’armée américaine, encore sous le choc du retrait d’Afghanistan, est confrontée à d’innombrables périls sur la scène internationale. La même question se posera bientôt inévitablement pour les autres armées occidentales. Il faut alors espérer que les réalités du terrain et du commandement permettront de conserver au sein des armées une exigence constante de professionnalisme et d’efficacité opérationnelle.

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[1] https://twitter.com/CBSNews/status/1450529801564037134

[2] https://www.causeur.fr/etats-unis-une-armee-transgenre-usa-army-transgender-ana-pouvreau-biden-trump-204388

[3] https://www.rtbf.be/info/societe/detail_lgbtqi-que-signifie-ce-sigle-lettre-par-lettre?id=10763345

[4] https://goqnotes.com/61545/lgbt-history-month-october-22-rachel-levine/

[5] https://www.bbc.com/news/world-us-canada-58974627

[6] https://www.metroweekly.com/2021/10/republican-congress-members-criticize-dr-rachel-levine-after-she-becomes-first-transgender-four-star-officer/

[7] https://www.washingtonpost.com/politics/2020/11/18/trumps-election-fraud-allegations-suggest-that-military-voters-uniformly-supported-him-its-not-so/

[8] https://www.dw.com/en/german-bundeswehrs-first-transgender-commander/av-55945552



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Analyste géopolitique (Russie, Turquie), auteur et spécialiste en relations internationales et en études stratégiques.

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